Parallèles

1

Parmi les arts, celui de la parole est le plus décevant de tous, Maurice Garçon

Illéa n'était pas du genre à se plaindre, elle préférait se terrer dans son silence plutôt que de faire part de ses ennuis. Ses parents avaient toujours détesté cette manie insupportable qu'elle avait de se réfugier dans son mutisme lorsque quelque chose n'allait pas. En fait, elle ne faisait pas vraiment exprès, dans ces moments-là, Illéa préférait résoudre des problèmes de maths dans sa tête. Etrange façon d'évacuer le stress, mais les chiffres eux aux moins, ne lui posaient pas de questions dont elle-même n'avait pas la réponse.

Elle était ce que l'on appelle un génie des mathématiques. Elle n'a sauté qu'une seule classe mais pour les cours scientifiques, pas seulement les maths, les professeurs lui donnaient des problèmes à résoudre si compliqués que même des professeurs de grandes écoles avaient du mal à les terminer. Elle aimait cela. Aussi bizarre que cela puisse paraître.

Lorsque son réveil sonna, à six heures et cinquante cinq minutes, Illéa se redressa et éteignit posément l'engin. En fait, cela faisait exactement cinq minutes qu'elle était réveillée, comme tous les matins, afin de pouvoir profiter de quelques minutes dans son lit. Elle soupira longuement et se décida finalement à sortir du lit. Elle marcha jusqu'à la salle de bain, tout en essayant d'être la plus discrète possible, sa mère dormait encore. Elle se doucha et enfila les vêtements qu'elle avait soigneusement préparés la veille, un jean et un haut large à manches longues. Elle ne s'habillait pas mal, simplement elle ne faisait pas de grands efforts. Elle leva les yeux pour se regarder dans le miroir. Elle détourna le regard presque immédiatement. Elle n'aimait pas son reflet. Malheureusement.

Elle continua d'effectuer sa routine matinale tel un robot, selon elle chaque détail comptait.

En enfilant ses baskets, elle alluma son téléphone. Seulement des notifications sur les réseaux sociaux, rien qui ne retenu son attention bien longtemps. Elle sortit de sa maison, marcha exactement huit minutes dans les rues de Sacramento puis arriva à destination. Elle n'aimait pas cette ville de Californie dans laquelle elle avait déménagé quelques années auparavant. Elle était pressée de partir, très loin d'ici.

Cela faisait cinq jours qu'elle avait entamé sa dernière année de lycée avant l'université. Elle avait hâte d'en finir.

Son cœur battait à la chamade, mais elle n'avait pas le choix, elle devait y aller. Malgré son stress grandissant, son visage lui, restait froid et hermétique, rien ne semblait pouvoir l'atteindre. Elle avait mis du temps à apprendre à gérer son stress mais elle avait fini par réussir, heureusement.

- Illéa ! Illéa ! Attends-nous !

Cette dernière reconnu la voix fluette d'Ally, une de ses amies. Elle se retourna et celle-ci lui sauta dans les bras, Illéa ne la serra pas en retour, mais Ally avait l'habitude. Judie, une autre de ses copines lui sourit. Illéa avait une vie sociale plutôt développée, bien que cela ne l'intéressait que très peu. Au début, elle avait trouvé cela étrange, elle ne savait pas vraiment comment elle avait réussi à se faire apprécier malgré son allure froide et son incapacité à être sociable. Puis elle avait compris, sans grande difficulté, que les gens aimaient bien savoir qu'ils avaient un génie des maths en tant qu'«amie », c'était toujours très utile, surtout pour les devoirs à la maison. Illéa n'était pas dupe, ça ne la blessait pas, après tout, cela lui permettait qu'on ne lui prenne pas la tête, c'était tout ce qu'elle demandait. Cependant, Ally et Judie appréciaient réellement Illéa, elles avaient appris à la connaître et elles avaient aimé son sarcasme et sa gentillesse, bien cachée certes, mais une profonde gentillesse tout de même. Malgré les apparences, Illéa les appréciaient en retour.