La solitude effraye une âme de vingt ans, Molière.
- Selon toi, quand est ce que tout cela a commencé ? demanda le psychiatre.
Illéa réfléchit un long moment. Tellement de choses avaient vrillées dans sa vie. Mais quand est ce que pour la première fois, elle avait réellement souffert ?
- Je ne sais pas trop, dès que j'ai commencé l'école je dirais. Je n'avais pas encore été diagnostiquée précoce. Mais le fait de commencer à côtoyer des enfants de mon âge, je me suis très rapidement rendu compte que j'étais à des années lumières d'eux.
Elle se triturait les mains, ses plaques d'eczéma la brulaient, son cœur se serrait. Pourquoi faisait-t-elle cela ? Elle savait au fond d'elle que ça ne marcherait pas. Et pourtant, elle était quand même venue, et de son plein gré cette fois ci. Mais cette scène avec Conrad la rongeait, en parlant de son passé et des souffrances qu'il contenait, elle oublierait facilement cet incident. Et c'est ce qu'il passa.
Ils parlèrent durant une trentaine de minutes, le docteur ne pouvant pas s'éterniser. A aucun moment, elle était rentrée dans les détails. Mais les attouchements de Conrad lui paraissaient désormais très lointains et dérisoires comparé à tout ce qu'elle avait déjà enduré.
En sortant du bâtiment, elle se ressaisit enfin. Elle releva la tête, le regard froid, le visage fermé. Elle avait réussi à reconstruire son masque. Même si ce n'était pas forcément une bonne idée, c'était ce qu'elle voulait, paraître le plus détaché possible. Elle rentra chez elle, légèrement apaisée, cependant, la douleur coulait encore dans ses veines.
Au même moment, Emerson, lui arriva à l'hôpital.
Ils se croisèrent sans même s'en rendre compte, chacun étant enfermé dans sa bulle.
Il ouvrit la porte de la chambre de Mike et vit ce dernier, allongé sur son lit, accroché à tout un tas de fil. Il réussit à maintenir son habituel sourire, malgré la peine qui lui déchirait le cœur.
- Putain, j'ai cru que tu ne reviendrais plus jamais me voir connard, rigola doucement et avec une respiration erratique le jeune homme.
Emerson pris une chaise et s'assit à côté de lui. Il lui prit la main et la serra, comme à son habitude.
- Désolé mec. J'était trop occupé à draguer tu me connais, répondit-t-il.
Il essayait de faire rire son meilleur ami, il savait que si Mike apercevait ne serait-ce qu'une seule once de pitié dans son regard, problème cardiaque ou pas, il lui casserait la figure. Il ne voulait pas prendre le risque. Son visage était si pâle, ses yeux perdaient petit à petit de leur éclat. Il se détériorait à vue d'œil.
- Je n'en reviens toujours pas que tu ailles au lycée, les filles sont jolies au moins ? Je suis sûr qu'avec ta gueule d'ange tu les fais toutes craquer.
Il avait dit cela avec un sourire en coin. Les deux amis n'étaient pas des spécialistes en amour, ils avaient cependant tout deux déjà eu plusieurs petites copines, venant d'autres services de l'hôpital.
- Hmm, oui, la plupart sont jolies. Et je crois que t'as raison, certaines d'entre elles m'aiment bien, il y en a même une qui m'a déposé un mot sur mon pare-brise ! s'exclama Emerson.
Mike rigola, un rire suivi d'une quinte de toux.
- Je suis persuadé que tu es intéressé par l'une des plus compliquées de tes prétendantes !
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Parallèles
Teen FictionParallèles : se dit de deux droites qui ne se rencontrent pas. C'est ce qu'ils étaient, deux droites parallèles entre elles. C'est aussi ce que Illéa avait tracé sur ses avants bras. Des droites parallèles, tracées à main levée , qui avaient failli...