Twenty-Fifth Letter

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Lily savait qu'elle ne pourrait pas l'éviter éternellement. Ou tout du moins, une part d'elle, qu'elle ignorait consciencieusement depuis la pleine lune, le savait. Ça ne l'empêchait pas pour autant de tout mettre en œuvre pour ne pas le croiser. Cela se révéla bien plus complexe que prévu et elle fut frappée par ce nouvel état de fait. Quelques mois plus tôt, s'assurer de ne pas se retrouver sur le chemin de Potter aurait été un véritable jeu d'enfant. Aujourd'hui, c'était tout le contraire tant leurs vies respectives étaient enchevêtrées. Un dortoir commun qui impliquait la même salle commune et la même salle de bain. Des réunions de préfets deux fois par semaine. Les cours avancées qu'il suivait aussi. Elle n'avait même pas remarqué sa présence dans la classe jusque-là. À cela venait s'ajouter les entraînements de quidditch et les soirées avec leurs amis en commun. À moins de ne plus faire ce qu'elle aimait et de ne plus fréquenter les gens qu'elle aimait, il faudrait qu'elle lui fasse face. La solution pour laquelle elle avait opté était celle de ne jamais se retrouver seule avec lui. Elle avait abandonné son dortoir pour retourner dans la tour des Gryffondors. Ça avait plus aisé que prévu puisque Hestia – dont elle avait craint l'hostilité – semblait plus que coopérative, sans pour autant aller jusqu'à lui restituer son armoire. Alice avait accepté de lui rendre son tiroir et Lily aurait juré qu'elle était aussi soulagée que leur camarade de la voir s'éloigner de Potter. Seule Dorcas semblait contrariée, bien qu'elle n'exprimât pas son mécontentement de façon explicite, ce qui lui ressemblait d'ailleurs très peu. Lors des entrainements, elle s'arrangeait pour arriver en même temps que les autres et de ne jamais repartir seule. Il en allait de même pour les réunions des préfets et les soirées aux Trois Balais. Ainsi plutôt que de l'éviter complètement – ce qui était impossible – elle s'arrangeait seulement pour ne pas se retrouver seule avec lui. Il ne pouvait pas aborder le sujet "animagus" devant les autres. Il ne pouvait que la fixer silencieusement de ses pupilles d'or chaud. Silencieux. Ça n'avait pas duré longtemps. Il avait fini par abandonner l'idée de lui parler. Avait-il compris qu'elle ne comptait pas divulguer son secret à qui que ce soit ? S'était-il simplement lassé ? Était-ce une ruse pour qu'elle baisse sa garde ? Elle ne le saurait jamais. Elle était simplement soulagée.

Un mois s'était écoulé sans qu'ils ne s'adressent une seule fois la parole. Incapable de trouver le sommeil cette nuit-là, assise sur le rebord de la fenêtre à fixer la forêt comme si elle s'était attendue à voir apparaitre à l'orée de celle-ci, un loup et un cerf. Elle doutait qu'à cette distance et avec la pleine lune pour seule source de lumière, elle aurait pu apercevoir quoi que ce soit. Mille et une inquiétudes se bousculèrent en elle. La forêt interdite l'était pour une raison. Les bois étaient connus pour abriter toutes sortes de créatures. Elle imagina Potter – ou plutôt le cerf – s'aventurer sur le territoire de chasse des centaures. Que pouvait-il faire contre les araignées géantes ? Un vampire ? Une fée ? Un chasseur de loup-garou ? Est-ce qu'il ne pouvait pas rester avec Remus dans la cabane hurlante ? Tu le saurais si tu lui avais parlé, lui répondit sa petite voix intérieure.

Elle était certaine que le garçon à qui elle écrivait lui aurait dit la même chose. Le problème était qu'elle n'avait pas trouvé le temps de lui écrire une seule fois depuis des semaines puisqu'elle n'était jamais seule. Il ne l'avait pas non plus contacté. Leurs échanges lui manquaient. Elle ne s'était pas autorisé à se reposer autant sur Alice, Dorcas ou encore Marlène et Emmeline. Elle avait conservé une certaine distance de sécurité. Plus aussi confiante qu'autrefois quant à la pérennité d'une amitié. Elle n'avait pas fait preuve de la même prudence avec l'inconnu puisqu'elle avait cru pendant un moment qu'il était elle et jusqu'à preuve du contraire elle pouvait se faire confiance. Lorsqu'elle avait découvert la vérité, elle avait poursuivi sans modifier quoi que ce soit entre eux. Elle attrapa de quoi écrire et descendit dans la salle commune des Gryffondors. C'était la première fois en presque six ans de scolarité, qu'elle voyait celle-ci aussi vide et calme. Lily n'était pas certaine d'aimer ça. C'était comme s'il manquait quelque chose. Le château était une relique du passé. Une partie de la terreur suscitée par les ruines féodales écossaises émanait de l'absence de vie entre les murs qui servaient de rempart aux seigneurs, à leurs vassaux et à leurs serviteurs. Poudlard était différent puisque chaque année, il accueillait en son sein les élèves. Ces derniers apportaient dans leur bagage leur époque. Ils lui rendaient la vie. La salle commune déserte semblait soudain terrifiante. Les personnages des tapisseries qui dépeignaient des récits épiques de chevaliers semblaient vous fixer de leurs yeux hagards, le blanc de leur pupille jauni par le temps. Les vitraux rouge et or semblaient retenir jalousement la lumière de la lune, empêchant quiconque d'être assuré qu'un canapé en était bien un, offrant une couronne et un royaume à la pénombre qui enveloppait la pièce circulaire. Elle fut tentée de raviver le feu de la cheminée mais elle craignait les plaintes des tableaux profondément endormis. Elle se contenta donc d'une bougie, s'installant à la table basse, en tailleur sur le tapis, son dos appuyé contre le canapés. Elle n'aurait su dire combien de temps elle était resté, sa plume en suspens, ne trouvant rien à dire puisqu'elle ne pouvait aborder le sujet qui l'obnubilait sans trahir le secret de Potter. Les premiers rayons de soleil se faufilèrent sournoisement jusqu'à elle, accompagnés quelques seconde plus tard par des chuchotements. Elle souffla la bougie et s'allongea sur le tapis juste à temps pour que les nouveaux arrivants ne l'aperçoivent pas. S'ils étaient arrivés par les escaliers des dortoirs, elle aurait été débusqué immédiatement. Ce n'était pas le cas. Potter, Sirius et Peter venaient d'entrer dans la salle commune. Elle n'était pas étonnée de voir Potter arriver de l'extérieur. Pour ce qui était de ses deux comparses, c'était une autre histoire.

Deer LilyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant