À L'arrêt Du Champ || Taekook

Chapitre 21 : tu me fais tout oublier

Merde.

Merde merde merde merde.

Je ne suis pas souvent si vulgaire, même en pensées, même en étant le plus énervé possible, je le suis rarement, mais...Je suis tellement énervé envers mes amis et j'ai une telle inquiétude qui grandit au sujet de Taehyung.

Ca fait une heure.

Une heure que je tente de l'appeler, sans succès.

La perle est encore dans le creux de ma main, et je décide de la mettre dans ma poche pour m'assurer de ne pas la perdre, car même si je ne sais toujours pas d'où elle vient, je ne veux pas qu'elle s'égare n'importe où.

Un peu comme Taehyung.

Mais où est-il, bon sang ?

Je lui envoie un message, que je pris encore de la peine à écrire tant je tentai de me précipiter.

[Je meurs d'inquiétude, je viens d'apprendre, tout, je sais que tu pourrais détester le fait que je sois au courant, crois-moi j'aurais aimé ne jamais l'être, mais pour ce qui est de toi je suis sûr que tu n'en as parlé à personne, s'il-te-plaît ne te renferme pas, exprime toi, peu importe ta façon, je sais que tu as du mal avec les mots...]

Je restais ensuite longuement assis, sous l'abribus, attendant simplement une réponse, un signe de vie...

Mais rien n'arriva, j'ai si peur, je n'ai aucun moyen de le contacter à part ce téléphone, alors je ne fais que le fixer, sans rien faire d'autre, je ne sais pas où il habite, il n'a pas l'air d'avoir un endroit préféré, je ne sais pas où le retrouver, alors je reste là, comme un con, à fixer cet écran comme si je m'accrochai à une barque sur l'océan.

Une barque sur l'océan hein...C'était un morceau au piano de Ravel ça, Ravel, c'est un compositeur de la même période que Debussy.

Debussy...Notre lien a débuté sur du Debussy.

Je veux pouvoir revenir à cet hiver où nous liions nos musiques pour ne créer qu'une pensée, qu'une joie, c'était tout bonnement magique, mais pour l'heure il n'est pas là, et je ne peux rien faire d'autre que m'inquiéter.

Des larmes me viennent toutes seules aux yeux, j'aimerais tellement échanger mes iris contre d'autres pour qu'elles cessent de se remplir de larmes contre mon gré.

Oh mon Dieu Taehyung, donne-moi un signe de vie, vraiment, pour de vrai, tu ne peux pas me faire ça.

Le soleil me nargue dans l'horizon, il commence déjà à descendre, il continue sa vie comme si rien n'arrivait, comme si le silence de Taehyung n'était pas la pire horreur de ce monde, la plus douloureuse des tortures, je me fais un sang d'encre et pourtant je ne peux rien faire d'autre que fixer ce putain d'écran.

[Je t'en supplie réponds...Je suis dehors, j'attends de savoir où tu es pour bouger, j'ai besoin de te voir.]

Ca fait bientôt deux heures, je ne sais pas quoi faire, devrais-je parcourir toute la ville à sa recherche ? Devrais-je appeler quelqu'un ? Mais qui ?

Je ne connais pas son entourage, a-t-il des amis ? Il m'avait dit "Je n'ai pas besoin d 'un autre faux fan de Debussy", est-ce que ça voudrait dire qu'il en côtoyait d'autre ? Je suppose que maintenant que je possède rien qu'un petit bout de sa confiance, il va pouvoir m'en parler au moins un tout petit peu.

Hoseok, il connaît Hoseok.

Les doigts plus en plus précipitai et mes messages de plus en plus chaotiques, je rédigeai mon message :

[Hoseok, tu as des nouvelles de Taehyung ? Je viens d'apprendre un truc vraiment inquiétant, et j'ai peur qu'il tente de mauvaises chose à cause de cette nuit...]

Comme à son habitude, il me répondit dans l'immédiat, mais malheureusement il ne me dit pas ce qui me plut.

[Kook, je suis désolé, je n'ai aucune nouvelle de lui, mais tu dois aller travailler dans quelques minutes...Je ne veux pas te déranger ou te décourager, mais je ne peux pas assurer le service tout seul, tu dois venir...]

J'avais complètement oublié le travail.

Putain Taeyung, tu me fais tout oublier, il me suffit que je pense à toi rien qu'un instant pour tout oublier.

J'ai pensé à toi pendant un instant, puis c'est devenu des minutes, des heures, des insomnies, des journées, j'ai oublié mes "amis", j'en ai presque oublié ma vie, presque, car maintenant tu en fais partie.

[Je dois partir travailler...Donne-moi un signe de vie, je suis mort d'inquiétude, je sens que je vais faire plein de gaffes au boulot si je n'ai pas de nouvelles de toi, si tu veux me voir, tu peux toujours passer rapidement au bar, en coup de vent.]

Je soupire en envoyant ce message, comme si ça allait faire s'envoler mon inquiétude, mais il n'en fut rien, j'inspirai juste encore plus fort.

Taehyung...Je suis presque aussi inquiet que cette nuit quand je t'ai vu dans cette rivière, tout semble si lourd et insupportable quand tu n'es pas là et en danger.

Le car avance lentement vers le bar dans lequel je travaille, il n'est pas très loin de chez moi mais est un peu plus en retrait par rapport au centre ville, et ça ne m'a jamais autant plu que maintenant, la dernière chose que je voulais était voir des personnes du lycée, une sorte de haine montait doucement à mesure que le car avançait, et une petite vague de nostalgie.

Dire qu'au début, Taehyung n'était que quelqu'un d'infiniment magnifique et d'incroyablement intrigant, maintenant, il a pris cette place incommensurable, j'ai appris à le connaître, d'une certaine façon.

Je me souviens encore la première fois que je l'ai suivi, poussé par l'instinct de survie qui m'empêchait de suivre la monotonie plus longtemps, quand j'ai avancé dans ce sentier, et déjà à l'époque je me disais que Taehyung était bien trop singulier pour juste suivre ce vulgaire sentier, alors j'ai suivi le son de l'eau car c'est ce que mon instinct et mon désir me poussait à faire, quand j'y pense, on dirait que mon instinct et mon désir cherchent à ce que je m'attache toujours plus à cet être incroyable et labyrinthique qu'est Kim Taehyung.

Le paysage défilait sous mes yeux, mais le soir c'est plus le silence qui me donne un fond musical, j'aime ça tout autant que le brouhaha.

Une fois à mon arrêt, je sortis du car, bien déterminé à recevoir des nouvelles de Taehyung dans la soirée, je savais déjà que mon esprit sera tant préoccupé que je risque de casser quelques verres et de mélanger quelques mixtures.

 Mais j'y vais quand même, car je ne peux pas abandonner Hoseok, je ne peux pas laisser passer une chance de revoir Taehyung.

Je pousse un soupir comme si ça allait m'aider à me sentir mieux, puis pénètre enfin l'enceinte de mon espace de travail.

Taehyung et moi avons passé une nuit effroyable la nuit dernière, et nous ne nous sommes pas vus de la journée, comme si cette nuit il n'avait pas vraiment survécu, et c'était justement ça qui rendait la situation réellement effroyable.