Chapitre 6 : Les nuages là-haut, est-ce de rire que vous pleurez ?

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Ce mercredi-là, c'était la première semaine de décembre, voilà trois semaines que je t'ai suivi dans le champs, et deux semaines que je t'ai vu jouer dans le bar, la semaine dernière j'ai tenté d'ignorer qui tu étais et tu avais l'air d'en être satisfait, mais je sais que cette monotonie ne peut plus durer.

C'est donc dans la plus grande des discrétions que ce matin j'avais préparé mon sac, avec un peu de nourriture, et des chaussures sans valeur de rechange au cas où il pleuvrait.

Nous arrivons sur l'arrêt du champs, et malgré la pluie qui menace de tomber, tu descends du car, l'air encore plus enjoué que d'habitude. Ta gestuelle n'était pas particulière et je ne voyais pas l'ombre d'un sourire à travers l'écharpe qui te couvrait, mais ton aura avait ce goût d'enfantillages qui te rendait l'air joyeux.

C'est  avec un fort empressement que je te suivais paisiblement, tentant de me faire discret, je ne voudrais pas voir ton aura s'effondrer.

Aujourd'hui, tu avais porté des vêtements qui te portaient plus chaud que d'habitude, un peu plus sombres aussi, tu portais un long manteau noir à strass argentés, avec un peu de fourrure, et un jean large noir, puis des bottines aux mêmes fourrures que sur le manteau, avec ça tu as porté un béret et des boucles d'oreille blanches et oh ! Tu t'es percé l'hélix.

C'est joli.

J'ai envie de te le dire mais je connais la haine qui t'anime, alors je me contente de te suivre à travers la terre humide sans un bruit, dans l'espoir que la joie que tu dégages ne disparaisse pas.

Alors que nous marchions à travers le champs, tu t'arrêtas soudainement, te tournant vers moi, et à cet instant j'aimerais disparaître, que rien ne puisse te montrer que je suis là, mais malheureusement je ne le peux pas, et tu me vois.

"Putain, ne vas-tu jamais me laisser tranquille ?!

-Hm...Non, répondis-je embarrassé, et pourtant qu'est-ce que j'aimerais...

-Alors pourquoi tu continues de me suivre ? Tu ne m'intéresses pas, et je ne veux pas que tu t'adresses à moi, je t'ai déjà dit ce qui pourrait t'arriver si tu m'énervais, tu n'as pas peur ?

-Si, je meurs de peur, mais je...Je ne peux pas m'en empêcher, Kim Taehyung...

-Je suis sûr que tu le peux, aller, fais demi-tour, ne me regarde pas, et puis voilà, tu auras réussi !

-Je ne veux pas."

Il soupira grandement, quand il soupirait, c'était comme s'il avait inspiré un ouragan et qu'il le recrachait sous la forme d'une tempête, c'est à ce point que ses soupirs étaient puissants.

Son regard prit le miens en otage, comme pour me dissuader de continuer à le suivre, ses yeux se voilent d'une lueur vide et sombre, comme pour cacher un semblant d'autre sentiment.

Mais justement, j'ai entièrement conscience que tout ça n'est qu'une couverture, tout comme le faux Taehyung qu'il a l'habitude de montrer.

"Kook, bouge, je ne veux pas que tu me suives, et je ne veux pas que tu me forces à t'obliger de déguerpir."

Hm ? Kook ?

Il connaît mon surnom ?

"Ton collègue t'a appelé comme ça l'autre jour, tu ne m'intéresses pas, je te l'ai déjà dit. Dégage sans un mot de plus maintenant."

Je soutenais difficilement son regard, car j'en avais assez de toujours avoir peur, de toujours le fuir, s'il m'intriguait à ce point, je ne devrais pas avoir ce comportement à son égard.

Non, je ne partirai pas, car à travers sa gestuelle actuelle, qui est de caresser nerveusement la fourrure de son manteau, je devine qu'il ne me fera pas de mal si je ne lui en fais pas.

"Je...J'aime bien Debussy, et je veux savoir qui tu es pour de vrai, je veux être celui qui saura qui tu es.

-D'autres savent déjà qui je suis, je n'ai pas besoin d'un autre faux fan de Debussy."

Ah...Oui, c'est vrai, c'était évident,  il ne serait sans doute pas si bon acteur et si paisible si ça n'était pas le cas.

Mais je n'abandonnerai pas pour autant, certainement pas, j'ai déjà rassemblé trop de courage.

"Je n'ai pas dit que j'étais fan de Debussy, simplement que j'aimais bien, à vrai dire, je préfère de loin Bach, annonçais-je, remerciant intérieurement mes cours de musique, car bien que sa personnalité n'était pas des plus magnifiques, on ne peut rien reprocher à sa musicalité, et je trouve ce contraste vraiment intéressant."

Il leva un sourcil niant un intérêt que je vis pourtant naître sur son faciès, et je retenus un sourire fier qui tentait de trahir ma joie évidente.

"J'ai deux pièces favorites de Debussy, tout d'abord, "Rêverie", elle me donne cette envie d'accomplir tout ce que je veux faire, et elle me fait sourire comme un enfant dès que je l'entends, et la deuxième pièce des images inédites, elle s'appelle "Souvenir du Louvre, dans un mouvement de Sarabande", je l'adore vraiment, elle me fait me rappeler une oeuvre...je marque une pause, heureux qu'il ne m'ait pas coupé dans ma tirade, elle me rappelle à toi, finis-je d'une petite voix."

Il soupira à mes derniers mots puis me tourna le dos, continuant son chemin sans un mot.

Il ne m'a pas demandé à nouveau de partir alors qu'il savait pertinemment que je le suivrai.

C'est donc avec un sourire satisfait que je le suivis.

La pluie commence à nous tomber dessus progressivement tandis que nous restons dans ce silence que je trouve tellement apaisant que je voudrais mourir dedans.

Si Jimin était là, il danserait sur le rythme de la pluie.

Je regardais la silhouette de Taehyung distraitement, sans vraiment en redessiner les formes, simplement à l'observer sans aucune pensée, quand j'entendis un rire de bonheur résonner.

Hm ? Un rire ? Est-ce un oiseau ?

Un oiseau peut-il avoir un rire si...Grave et humain ?

Je ne pense pas, mais j'ai du mal à croire que ce rire puisse provenir de la silhouette qui se tient face à moi.

Curieux, je me mis alors à crier :

"EH OH ! LES NUAGES LA-HAUT, EST-CE DE RIRE QUE VOUS PLEUREZ ?"

Le rire discret qui occupait l'espace se fit plus intense, et il n'y avait plus aucun doute sur ce fait, aujourd'hui, le 4 décembre, j'avais entendu le rire du réel Kim Taehyung, pas celui narquois, pas celui sadique ou forcé, mais celui qu'il se donnait du mal à cacher, celui-là faisait retentir une si belle mélodie...

J'ai fait rire Kim Taehyung !

"EEEEH ! LES NUAGES, LA PLUIE, LE MONDE !!! VOUS AVEZ ENTENDU CETTE BELLE MÉLODIE !? criais-je plus de joie qu'autre chose, C'EST LE RIRE DU RÉEL KIM TAEHYUNG ! ENCORE PLUS BEAU QUE N'IMPORTE QUELLE MÉLODIE DE DEBUSSY !"

Je l'entendis pouffer à mes idioties et je ne pouvais pas m'empêcher de sourire encore plus fort, je crois que j'e n'ai jamais souri si intensément, avec autant de fierté et de sincérité.

Tu tentes de 'étouffer ce rire mon cher Kim Taehyung, mais je ne le devine que trop bien, à tes épaules qui se tendent et à ta voix qui trépasse la pluie.

Tu es l'une des choses qui suscitent le plus mon intérêt Kim Taehyung, je te verrai rire un jour.

Alors comme un écho à son rire, je ris de bonheur, un rire niaiseux et satisfait.

Mais je crois qu'inconsciemment si j'étais aussi heureux, c'est parce que je savais que ce moment serait de courte durée.

À L'arrêt Du Champ || TaekookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant