Pirates and Magic

Chapitre 9

Lola, sa tasse de thé brûlante calée entre ses deux mains, suivait Mirko dans les couloirs noirs inondés de la lumière exétieure. Elle avait espéré retourner au sous-sol pour observer à nouveau les tapisseries qu'elle avait pu apercevoir, mais l'enseignant l'emmena plutôt au premier étage, à son plus grand regret. Ces murs étaient neutres, si on ne comptait pas les chandeliers muraux et leurs magnifiques abat-jours fleuris. Elle songea que la décoration en était un peu trop lacunaire à son goût.

Soufflant sur une longue mèche de cheveux noirs lui barrant le front en regrettant de ne pas pouvoir tresser sa chevelure, elle balada ses yeux gris acier jusqu'au plafond pour essayer de graver chaque détail dans sa mémoire. Elle se demandait si les mêmes pensées avaient traversé l'esprit de Raven, lorsque cette dernière était arrivée à l'Académie. Kwal, lui, avait peut-être été accoutumé à l'environnement avant d'y faire son entrée. Au fond, comment ça se passe pour les personnes venant de ce monde ?

-Pourquoi n'y a-t-il pas de tapisseries, ici ? demanda-t-elle alors. Celles qui sont dans le couloir du sous-sol sont pourtant magnifiques.

-Elles ne sont pas à la convenance de chacun, répondit Mirko sans ralentir l'allure.

-Pourquoi ? Le style ne plaît pas à tout le monde ? s'étonna-t-elle. C'est une étrange raison de ne pas les exposer.

-Le style importe peu, en vérité, assura-t-il. En revanche, ce qu'elles racontent ne convient pas aux convictions de chacun.

-Parce qu'elles racontent des choses horribles ? tenta-t-elle.

L'enseignant secoua la tête de manière presque imperceptible, l'air à la fois désolé et consterné. Il soupira d'un air las, et Lola fut étonnée de constater à quel point il paraissait soudainement plus âgé que sa trentaine d'années. Un poids semblait s'être abattu sur ses épaules, comme si un souvenir trop douloureux à porter remontait à la surface de son esprit.

-Elles narrent de très belles choses, en réalité, répondit-il. Mais les mythes ne mettent pas tout le monde d'accord, mademoiselle Jordan. Si certains peuvent faire abstraction de leurs convictions et croyances afin d'apprécier l'art, tout le monde n'en est malheureusement pas capable.

-Donc, certains y croient et d'autres non, résuma-t-elle après un instant de réflexion, et dans ceux qui pensent que ce n'est pas vrai, il y en a qui ne sont pas capables d'admettre que ces scènes sont belles.

Acquiesçant d'un signe de tête, Mirko ouvrit la porte située tout au fond du couloir et adressa un signe à Lola pour l'inviter à entrer dans la pièce. Cette dernière espérait trouver autre chose que le carrelage noir vernis qui était présent dans tout le bâtiment, mais elle l'identifia rapidement. Cependant, il alternait avec des dalles de couleur bleue, une nuance qui rappelait à la jeune fille la mer d'un bleu limpide qu'elle avait déjà observée sur des photos de lieux paradisiaques.

Divers objets disposés en un cercle parfait occupaient le centre de la salle. Curieuse, Lola s'approcha et les détailla avec attention : une magnifique horloge à pendule au bois vernis présidait l'assemblée. Son seul défaut résidait en l'absence du mouvement de balancier caractéristique et du bruit régulier provenant du mécanisme. Une jarre ornée de délicates silhouettes contenait de l'eau. Un chandelier couleur or gravé de minuscules flammes soutenait une haute et mince bougie. Un récipient sphérique, translucide et décoré de formes floues représentant des nuages, enfermait de l'air. Un pot en argile peint de petites fleurs de différentes couleurs. Une fine monture de bois soutenait deux billes de cuivre suspendues et couvertes de zébrures. Enfin, un large bocal en verre et remplis d'objets aléatoires complétait cet étrange regroupement.

-Et elles sont réelles ? demanda-t-elle en se tournant brusquement vers le professeur. Ces histoires.

-Est-ce vraiment important ? répondit-il en penchant légèrement la tête, comme pour jauger sa réaction.