Fantôme.

4.5K 173 109
                                    

L'horrible sonnerie de mon réveil se déclenche, m'extirpant petit à petit de mon sommeil. Je m'étire avant de me traîner jusqu'à la salle de bain, prendre une bonne douche froide pour sortir de mon état second. Une nouvelle journée commence, sûrement tout aussi ennuyante que les autres. Parfois, je me dis que je me plains beaucoup trop sur ma vie, mais après tout, j'ai le droit non ? Et personne ne m'entend penser, alors tout va bien. Je déjeune silencieusement, pendant que les enfants se réveillent à leur rythme. Je me demande comment est la vie d'un enfant qui possède ses parents. Se fait-il réveiller avec un petit déjeuné déjà prêt ? Un bisou sur la joue avant de partir à l'école ?Toutes ces questions auxquelles je n'aurais jamais de réponse, puisque je ne le vivrais jamais. Voyant l'heure tourner je me dépêche d'aller chercher mes affaires et de partir en direction du lycée.
Comme chaque matin, tout le monde retrouve sa bande de copains, se raconte leur soirée ou les nouveaux potins fraîchement dégoisés. Pour ma part, le terme d'amitié m'a toujours échappé. Je n'ai jamais su comment m'en faire et je n'essaye pas vraiment non plus. Je me dirige comme à mon habitude à un arbre et m'assois en m'adossant dessus. Je regarde les nuages, qui se promène inlassablement dans le ciel. Ça doit être sympa d'être un nuage.. Je me relève à l'entente de la sonnerie pour me diriger vers mon premier cours qui n'est autre que littérature. Je ne sais pas vraiment ce que je veux faire plus tard de ma vie, je n'y ai jamais pensé, l'idée d'aider ou protéger des personnes me plaît bien, mais cela s'arrête là.
Je m'assois à ma fidèle place, voisine à Rémi dans ce cours. Je soupçonne que ce soit son préféré d'ailleurs. Il peut faire tous ses coups en douce sans que le prof ne s'en aperçoive. Cependant, je vois bien que depuis quelque temps, il semble plus..gentil ? Enfin je n'irais quand même pas jusque-là, mais disons qu'il se fait plus tendre dans sa façon de m'embêter. Il fut une époque où il m'a coupé une partie de mes cheveux, ou même planté son compas dans la main, j'en ai d'ailleurs encore la cicatrice. Ce type est vraiment dérangé, mais on dirait que j'ai bien fait de le laisser faire puisqu'aujourd'hui, il semble s'apaiser de jour en jour.

« T'as quoi à me regarder le fantôme. »

La voix de Rémi me fait sortir de mes rêveries éveillées. Je secoue la tête et regarde par dehors quand je sens qu'on tire ma queue-de-cheval.

« Ça, c'est pour m'avoir regardé. »

Je ne rajoute aucun commentaire et continu la contemplation, écoutant d'une oreille lointaine mon prof parler d'utopie. Quel serait mon monde utopique à mes yeux ? Un monde sans conflit ? C'est impossible. À trop vouloir la paix, on s'ennuie et on décide de se battre. Un monde avec tout le monde d'égaux ? Impossible. Un monde sans peine ? Impossible. Le bonheur vient de nos peines.
Je devrais arrêter d'aller en philosophie..
La journée s'est passée comme à son habitude. A la cantine j'ai reçu une pomme dans la tête, j'ai aussi reçu un avion dans la tête en cours d'anglais, comme toujours.
La sonnerie annonce la fin de la journée, sous plusieurs soupires de soulagement. Pendant que je range mes affaires, Rémi me tape la tête et part en me disant :

« Vivement, que tu deviennes un vrai fantôme. »

Plusieurs ricanements se font entendre, de camarades de classe dont je ne connais pas le nom. Peu m'importe.
Aujourd'hui, j'ai décidé de rentrer à pied, il fait bon autant en profiter. Comme très souvent, je marche en regardant le ciel. Cette fois-ci, j'aurai dû éviter cette manie. J'aurais dû voir que le feu piéton était rouge. J'aurais dû voir la voiture qui arrivait à toute vitesse.
Seul un bruit sourd et le noir complet.
Rémi, ton vœu à était exaucé.

Une deuxième vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant