La première, Suwane écrivit finalement qu'elle acceptait que la Terre soit ronde. Les explications fournies par Erwan la convainquirent parce qu'elle avait l'habitude de voir le monde depuis le dos d'un goéland et qu'elle avait souvent remarqué cette courbure à l'horizon. Mais le coup du soleil, elle-même ne s'en remettait pas vraiment.
Erwan les observait, mais fit comme si de rien n'était. D'un geste de la main, il fit signe de ne plus y penser et revint au sujet principal de sa discussion : le sextant. Il demanda à tout le monde de noter des définitions qu'il allait donner et Tranit ne s'étonna pas de découvrir dans sa musette un solide carnet et des crayons préparés par Adacie.
Suwane s'en amusa, comprenant qui avait tout organisé depuis le début. Elle écrivit rapidement sur son cahier qu'elle avait bien entendu Adacie en parler avec Erwan et donner des instructions en conséquence.
Apparemment, leur camarade avait peur de ne pas être à la hauteur en leur expliquant elle-même. Tranit grommela, mais écrivit tout de même ce qu'Erwan leur dicta.
Il commença par une liste détaillée des opérations à effectuer pour faire le point, attira leur attention pour qu'ils l'observent manipuler l'instrument et répéta plusieurs fois définitions et manipulations.
Mais quand il parla de longitude et d'angle horaire, de latitude et de déclinaison puis de positions géographiques, de droite de hauteur, de hauteur calculée et de hauteur vraie, Tranit se reprocha de ne pas avoir bu plus de bière avec sa collation de la mi-journée.
Après plus d'une heure de prise de note, ce fut un soulagement de poser crayon et carnet. Pourtant, Erwan n'en avait pas fini avec eux.
— Faire le point demande beaucoup d'entraînement et d'habitude, mais ce n'est pas un exercice inutile. La plupart d'entre vous ne feront guère de cartographie, mais plutôt de la navigation et c'est là que se trouve l'avantage extraordinaire de nos techniques.
Il adressa un beau sourire aux trois visages épuisés et quelque peu perdus et se frotta les mains.
— Il nous reste assez de temps. Ces nuages ne vont pas rester trop longtemps. Enseignes, mettez-vous en trois groupes et établissez les plans qu'il y a dans ces caisses.
Les gamins se mirent immédiatement au travail alors qu'Erwan s'approchait de Tranit, Suwane et Benwan.
— À voir vos têtes, je comprends pourquoi Adacie n'a pas osé le faire toute seule. Pourtant, vous allez voir dans moins de dix minutes que c'est essentiel. Benwan et toi avez lu les chroniques du maréchal Quinius ?
Le jeune chevalier d'Arthèz et Tranit opinèrent du chef, c'était un ouvrage très célèbre et fort apprécié par tous les jeunes gens voulant percer dans la carrière des armes. Même Suwane fit signe qu'elle connaissait et écrivit qu'un de ses frères avait ce livre.
Satisfait, Erwan poursuivit.
— Vous avez bien vu que certaines de ses victoires sont dues à sa meilleure connaissance du terrain et des positions des troupes. C'est ce que nous allons vérifier avec les quelques exercices suivants.
Mais devant l'air quelque peu renfrogné de Tranit et celui un peu déboussolé de Benwan, Erwan n'insista pas. Il avait l'habitude de telles réactions et n'était pas trop surpris. Depuis leur engagement, il leur avait demandé beaucoup, bien plus qu'eux-mêmes pouvaient le reconnaître.
Que Benwan fut passionné par les chariots de guerre et leur utilisation était une bénédiction pour lui, l'ancien cavalier du REC puis du RCIM, les deux prestigieuses unités dans lesquelles il avait appris la guerre, appris à commander, appris à aimer la vie plus que tout.
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Les Larmes de Tranit - 6
FantasyDernier couplet (?) de cette aventure, Tranit part finalement en guerre. Un voyage peut-il se dérouler sans aucun incident lorsque des milliers d'hommes en armes errent dans les montagnes sans vraiment savoir où ils vont ? Avec un commandement errat...