CHAPITRE CENT VINGT-SEPT .7

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                        Tranit loua la prévoyance d'Adacie, qui avait investi autant dans l'aménagement de son chariot d'habitation. De si bonne heure et à cette altitude, elle avait l'impression que l'automne s'était installé. Elle avait froid !

Elle en frissonnait depuis son réveil. Autant pour cette merveilleuse douche et son eau chaude. Sa propre aiguière n'aurait pas été suffisante. Tranit retrouva une pelisse de fourrure qui allait lui être bien pratique pendant ce trajet.

Peu avant six heures, alors qu'elle avalait un rapide déjeuner composé de brouet tiède et de chicorée chaude, elle recevait un rapport sur les évènements de la nuit : 910 pour tous les postes de garde et toutes les unités se signalaient en 10-04.

Bien entendu, les bruits entendus, les sifflements captés par les gardes n'étaient pas signalés. La région était sauvage, inhabitée et de nuit, les prédateurs ne pouvaient résister à s'approcher de ces centaines d'animaux dont l'odeur devait leur paraître un fumet divin. Mais les lumières, les feux avaient eu raison de la témérité de ces prédateurs nocturnes.

Dès six heures, les patrouilles avaient pu alors s'élancer de nouveau dans l'ouverture des voies, puis les convois s'étaient formés. Dès l'entrée dans la gorge, la fraîcheur avait saisi tout le monde et personne n'avait ignoré le petit vent glacé qui sifflotait autour d'eux.

Mais dès qu'il avait fait assez jour, tous ceux originaires de Maubourguet ou bien des régions en bordure des baïssa avaient été stupéfaits de découvrir autant d'arbres qui s'étendaient en de longues files à mi-pente, tout le long de la vallée.

Les montagnards du Barcus s'amusèrent de l'étonnement de leurs camarades et leur apprirent que c'était assez fréquent. Ces gorges orientées nord-ouest sud-est étaient souvent à l'abri des Jaunâtres ou des Brûleurs, comme ils nommaient l'Escamoua, le terrible vent porteur des gemmes destructeurs des arbres.

Les arbres pouvaient donc y survivre bien plus facilement. Sauf qu'il ne s'agissait pas de chênes ni d'autres espèces propices aux hommes. Il s'agissait de résineux. Assez pratiques pour les menuisiers et les bâtisseurs, mais des arbres dont les fruits n'étaient pas comestibles, malheureusement.

C'était néanmoins un spectacle impressionnant. Et toute la journée, les hommes dévisagèrent la végétation. Une fouine fut abattue un peu avant midi, un blaireau effrayé un peu plus tard et il y eut quelques tirs contre des rapaces qui s'imaginaient bien faire bombance en apercevant un aussi grand nombre de dorkis réunis.

Mais ce n'étaient que des animaux sauvages. Les patrouilles se montraient vigilantes et vérifiaient bien qu'il n'y avait aucune troupe en vadrouille ni de campement de chasseurs.

Tranit savait que de l'autre côté des lignes de crêtes existaient quelques bourgs, quelques châteaux. L'ordre était d'éviter tout contact avec les locaux. Tant que leur progression serait inconnue, leurs chances de succès seraient bonnes.

La moindre alerte pouvait tout ruiner. C'était la raison pour laquelle la route la moins susceptible d'être fréquentée avait été choisie. Les huit premières lieues, qui demandaient de grimper de plus de deux cents ménèz, mille six cents toises, ne furent franchies qu'après une longue et pénible journée de voyage.

Malgré leurs chariots, leur ravitaillement, l'excellence de leur condition physique, ils ne pouvaient aller plus vite sans risquer l'éclatement des formations et de compromettre leur sécurité.

Pour la seconde nuit en pleine nature, la garde fut renforcée et les feux interdits. Il y avait assez de brûleurs en quartz pour fournir du bouillon chaud à tous. La cuisine TTA était bien meilleure que ce que certains avaient l'habitude d'avaler dans les gargotes de leurs bourgs.

Tranit ne fut rejointe à la nuit tombée que par Adacie. Erwan avait décidé de reporter d'une nouvelle journée le déploiement des kañvs, pour limiter leur utilisation et conserver le plus de réserves d'énergie possible.

De plus, il avait eu besoin de déployer plus de patrouilles vers l'ouest et le nord. Les kañvs seuls pouvaient lui apporter la rapidité dont il avait besoin. Adacie lui apprit aussi que les troupes à pied commençaient à arriver en face des Sentinelles.

Le légat de Maubourguet avait tenu parole en ayant seulement un jour de retard. Les cavaliers égarés qu'Erwan avait incités, pour rester poli, à rejoindre Fousseret le plus vite possible se rendaient utiles en faisant les liaisons avec les différents corps de troupe en mouvement.

Mais les ailes de cavalerie comme le corps central traînaillaient encore un peu trop loin derrière au goût du jeune prophète montagnard.

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Vixii

Les Larmes de Tranit - 6Où les histoires vivent. Découvrez maintenant