Devant l'incompréhension de Tranit, il eut un geste signalant que ce n'était pas important, mais ne put s'empêcher de poursuivre.
— Par d'autres sources dans les différents corps d'armée, j'en ai appris de belles. En fait, il avait bien l'intention de laisser l'aile droite se faire dépouiller par les siens.
Une partie des troupes lui ayant prêté allégeance est restée sur place et du matériel aurait été réquisitionné par son parent dirigeant la cité militaire. Il y avait apparemment un différend à régler avec un voisin du sud.
Tranit fit les gros yeux en entendant cela. Comment ce prince pouvait-il escompter mener une campagne alors que ses propres vassaux étaient en conflit ?
Erwan se contenta de hausser les épaules.
— Cela confirme seulement ce que nous supposions. Mais grâce à une étonnante rencontre, je sais maintenant quoi faire. Alors, revenons à toi. Pourras-tu attaquer d'ici après-demain ?
_ Oui, affirma Tranit sans se démonter. Nous espérions atteindre le massif dès ce soir, mais nous avons vite compris que cela serait difficile. Nous récupérons donc notre souffle dans ce campement puis d'ici demain midi nous serons sur place. Une journée pour prendre nos marques, pas plus et assaut au petit matin.
— Bien ! décréta Erwan en approuvant d'un vigoureux hochement de tête. L'avant-garde de la cavalerie atteindra les Imprenables par leur face nord en milieu de journée et Awèl suit de près avec l'élite de son infanterie. Donc on suivra le plan original, sauf qu'il est décalé de deux jours.
Sur place il semble n'y avoir aucun changement. J'ai ordonné à mes dragons en observation de se faire encore plus discrets qu'un grain de poussière, mais de me rapporter tout ce qu'ils voient. Toutes les quatre heures nous recevons des nouvelles de là-bas.
Tranit se demandait bien ce qu'ils pouvaient faire de plus. De ce qu'elle avait lu de leurs rapports, les paras d'Erwan observaient les moindres mouvements dans les deux forteresses et aux alentours.
Personne ne semblait pouvoir faire le moindre geste sans qu'ils ne le consignent et ne le rapportent. La jeune femme faisait entièrement confiance aux informations qu'ils avaient rapportées.
Le seul problème était qu'ils ne pouvaient voir à l'intérieur des deux forteresses. Bien sûr, comme ils étaient surélevés par rapport à la forteresse ouest, Tranit savait qu'en plus de l'énorme haut et massif donjon il y avait à l'intérieur des murailles d'imposants bâtiments, moins hauts, dont parfois des hommes sortaient. Mais nul n'en connaissait les fonctions.
En tout cas, la forteresse était tellement vaste qu'il y avait deux vergers, un vivier et un pâturage à l'abri de ses murailles. De quoi assurer le ravitaillement de plus de deux milliers d'hommes sans aucune difficulté.
Les informations étaient un peu moins certaines pour la forteresse est, la petite, si un tel adjectif pouvait être utilisé pour qualifier la construction, mais en plus du donjon bien visible, il devait y avoir des bâtiments moins élevés.
D'après les dispositions entraperçues, Tranit envisageait sérieusement qu'il s'agisse des mêmes constructions que dans son objectif, à moindre échelle simplement.
Erwan se tourna vers Adacie.
— Peux-tu t'assurer du 13-2 ?
— Oui, seigneur !
Adacie commençait à peine à se lever qu'un jeune mousquetaire s'approchait d'elle, une ardoise à la main.
— 10-4, Mon Seigneur.
Erwan eut un petit sourire enchanté et regarda Tranit.
— J'ai pensé que nous pourrions aller voir sur place...
Tranit eut un moment d'hésitation en voyant l'air gourmand d'Erwan et le visage renfrogné de Cydrac, puis elle écarquilla les yeux.
— Tu veux aller voir ? Voir les Imprenables ?
— Oui ! souffla-t-il en souriant. Que tu aies l'occasion de les voir avant tout le monde. Adacie et mes meilleurs navigateurs ont imaginé le trajet le plus sûr et le plus rapide.
Tes patrouilles de reconnaissance sont déjà sur place. Nous serons de retour en milieu de soirée au plus tard.
Le cœur de Tranit battit la chamade et elle ne fit qu'opiner du chef. Elle voulait les voir ! C'était maintenant viscéral. Elle voulait voir ce qu'elle devait affronter.
Cydrac se contenta de froncer les sourcils encore plus férocement, mais ne dit rien d'autre en remettant son ceinturon. Il avait craint que Tranit n'accepte, mais si cette jeune femme ne cessant de porter chance à Son Seigneur, son frère en vérité, le voulait, qui était-il pour s'y opposer ?
Tranit n'eut même pas besoin de retourner à son chariot. Adacie avait tout organisé et un enseigne lui apporta son armure, ses armes ainsi que sa musette de combat. Erwan, accompagné de Cydrac et de six jeunes mousquetaires, allait l'accompagner.
Adacie piloterait avec une jeune écuyère prometteuse. Tranit et Erwan étant du voyage, ils étaient quatre à pouvoir intervenir en cas de soucis avec l'appareil.
Les chariots volants faisaient l'objet de tous les soins des artisans les entretenant et Tranit savait qu'Adacie avait passé des heures et des heures avec ses équipages à examiner le moindre recoin de ces engins.
Les soucis qu'il y avait eu lors de l'aller-retour entre la flotte et la Barcusane avaient suffi à inquiéter tout le monde. Si tous souhaitaient qu'Erwan eût résolu le problème, il avait été décidé de limiter la durée des vols et surtout de limiter l'altitude à moins de vingt ménèz.
* * *
Merci pour votre lecture.
Si vous avez aimé, m'offrir un petit vote serait fort sympa.
Vos remarques ou vos commentaires sont toujours les bienvenus.
Vixii
VOUS LISEZ
Les Larmes de Tranit - 6
FantasyDernier couplet (?) de cette aventure, Tranit part finalement en guerre. Un voyage peut-il se dérouler sans aucun incident lorsque des milliers d'hommes en armes errent dans les montagnes sans vraiment savoir où ils vont ? Avec un commandement errat...