33. Alan

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Si je devais définir mon état, là, maintenant, tout de suite, je dirais que je gis sur le sol.

Le sang envahit ma gorge et commence à m'étouffer. Ma vision se trouble. Je hais les humains et leurs corps faibles. Cela doit faire déjà un moment que Tania et Emi m'ont abandonnés ici. 

Je prends appui sur mes paumes de mains et mes orteils et tente de me relever pour une fois de plus. Mes jambes tremblent et le haut de mon corps ne tient pas droit. Il penche du côté où mes épaules décident de tomber. Du sang coule le long de mes veines et trace le contour de mes blessures. 

J'ai mal. Atrocement.

Ironiquement, je me mets à rigoler. C'est ce que je faisais endurer à des milliers d'humains par jour. Et je les trouvais faibles, de râler pour si peu. Un sourire s'affiche sur mes lèvres, celui de la folie. Je croise encore une fois le regard de Nergal.

Il me toise du haut de ses plusieurs mètres. Les soleils de l'enfer sont cachés par ses imposantes cornes qui ornent sa tête et je me demande encore pourquoi il ne m'a pas empalé depuis le début. J'avance vers lui, traînant ma jambe gauche. Mon bras, faiblard, tente encore de lui effleurer le torse. Et comme depuis déjà un moment, il me dégage d'un simple coup de patte.

Je vole de nouveau et roule sur le sol. Le sang explose dans ma poitrine et ressort encore de ma bouche. Si je laissais mon corps choisir, je serais mort. Mais je ne peux pas. Mon heure n'est pas encore venue. Pourtant, je ne peux plus me relever. Combien de mes côtes ne sont plus que des débris ? Je ne sais pas.

Je tourne pour être sur le ventre. Difficile pour respirer, mais le sang aura un peu plus de mal à se loger dans mes poumons. Je veux me relever. Je peux le battre. Mais impossible de prendre appui sur mes poignets, mes coudes ou n'importe quelle partie de mon corps. Le sol tremble et je relève la tête. Il s'approche de moi puis s'accroupit. 

- Alastor. Toi qui n'aimes que la mort, tu iras bientôt la rejoindre.

Mon visage n'est plus éclairé. Sa main pleine de griffe me fait de l'ombre et s'apprête à m'accorder le coup de grâce. Je ne le quitte pas des yeux pour autant. Mes yeux restent ouverts. Si la mort doit me venir, je veux la voir.

- Hop hop hop pas si vite !

Je reconnais cette voix. Et cela n'annonce rien de bon. Nergal recule et je suis aveuglé l'espace d'un instant par la lumière. Quelqu'un d'autre vient cacher celle-ci et se penche vers moi en riant. Ses cheveux bougent, comme s'ils étaient vivants. Peut-être parce qu'ils le sont au final.

- Qu'avons-nous là ? Alastor, c'est toi ?

Je ne peux répondre, le sang bloquant mes cordes vocales. Il rigole.

- Si un jour, on m'avait dit que le grand bourreau craint dans tout le royaume aurait cette gueule-là ! Remarque, cela ne devait pas être facile vu que tu n'as plus de pouvoir hein ? Pauvre chou.

Il se redresse et claque des doigts.

- Nergal, emmène-le

- Bien votre majesté.

Le colosse m'attrape et me met sur son épaule comme un vulgaire sac. Voyons le bon côté des choses : ma tête étant vers le bas, le sang sort facilement, laissant une traînée de liquide au sol. L'homme aux cheveux en mouvement tape dans mon dos et j'ai l'impression de sentir chacune de mes vertèbres se faire la malle. Il en rigole.

*****

J'ai lutté pour ne pas tomber dans les pommes. Bien que j'ai fais semblant. Je voulais savoir où est-ce qu'il m'emmenait. 

J'y croyaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant