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Mon portable vibra. Le vibreur sous l'oreiller, je crois que c'était l'une des pires idées que j'avais eu. Je me dépêchai de l'éteindre, enfouis mon visage dans le coussin, gémis un bon coup et me levai enfin. Je m'habillai, ouvris mon tiroir, en sortis un verre de jus d'orange, un kiwi et une barre de céréales. Il était cinq heures du matin, il faisait toujours nuit noire dehors, j'entendais mes parents se lever à côté. Mais eux, ne savaient pas que j'étais réveillée et ils ne devaient pas le savoir. Mon jus d'orange était tiède, il avait passé toute la nuit dans mon tiroir. Tant pis, il était tout de même bon et plein de vitamines. Après avoir pris mon petit-déjeuner, je me peignis, me lissai les cheveux et me brossai les dents en vitesse. Je me débarbouillai le visage, cachai mes boutons et surtout mes cernes avec du fond de teint. Puis, je m'attelai à mes étirements. En effet, Christelle avait fortement insisté sur cela, elle tenait à ce que je fasse mon grand écart tous les matins avant d'aller à l'entraînement. Je commençai donc par m'asseoir, jambes tendues, attrapai mes orteils et je restai ainsi une trentaine de secondes. Ensuite, j'étirai mes adducteurs et finis par la position du lion. Vers cinq heures trente, j'entendis la voiture de mes parents quitter la maison: je pouvais désormais faire autant de bruit que je le voulais, sans crainte d'être entendue. Je répétai donc tous les mouvements d'échauffement plusieurs fois, pendant près d'une demi-heure. Enfin, vers six heures moins le quart, je pus faire mon grand écart latéral et facial sans problèmes. Je ne perdis pas une seconde. J'ouvris mes volets, enfilai mon manteau, pris mon sac de sport et mon sac de cours, claquai la porte, fermai le portail derrière moi et me retrouvai dans la rue. Le brouillard s'était installé. Tout était calme, seul le bruit de mes Converse sur le trottoir humide venait troubler ce silence de mort. Le froid mordant sur ma peau m'enveloppait comme un long manteau de neige. Je respirai l'aire pure et un sentiment de liberté m'envahit. Je ne m'étais jamais sentie aussi à l'aise dans ce leggings, avec ce tee-shirt noué au-dessus de mon nombril. Alors que je m'approchais du centre-ville, j'eus la soudaine envie de perturber cette ville endormie. Je m'arrêtai net et contemplai les rues désertes. La brume épaisse commençait peu à peu à se dissiper, je pouvais désormais voir à plusieurs mètres devant moi. J'entendais au loin le roucoulement d'un pigeon. Un sourire s'allongea sur mon pâle visage : il n'y avait ni Candice, ni mes parents, ni personne d'autre pour m'empêcher de faire ce dont j'avais envie. Je détachai ma queue de cheval et mes cheveux blonds me caressèrent la nuque sous la brise légère. J'enfonçai les écouteurs dans mes oreilles, puis activai la musique. Je me mis soudainement à courir. Seule dans ces rues, je dansai, criai, sautillai. J'étais pleine de vie. Mes Converse foulèrent bientôt les gravillons humides du parc. Mes oreilles bourdonnaient, le son était trop fort. Je m'arrêtai devant la porte de la patinoire, essoufflée, me tenant les côtes. Après avoir repris mes esprits, j'entrai. Je fis la bise à Louca et Samuel et saluai Christelle.

- Je suis à l'heure aujourd'hui ? demandai-je malicieusement.

- Tout à fait, bravo. Et tu as bien respecté ma demande sur le fait de venir directement en tenue de sport. Est-ce que tu as fait ton échauffement, tu sais le travail sur ta souplesse que je t'avais demandé de faire ?

- Oui, acquiesçai-je. Vous m'avez demandé de m'échauffer jusqu'à ce que je sois capable de réaliser un grand écart facial et latéral, et bien c'est ce que j'ai fait ce matin.

- Très bien, approche Louca. Je vais vous dire ce que nous allons travailler aujourd'hui. J'aimerais que nous revoyons quelques petites choses sur le programme libre, comme le deuxième porté ou la première série de twizzles. Allez, en piste !

Nous enfilâmes nos patins et partîmes sur la glace. Je fis un tour de la patinoire à toute vitesse, avant d'effectuer une magnifique révérence : c'était mon petit rituel le matin. Celui de Louca était légèrement différent, il commençait comme le mien mais lui, exécutait un salto avant sur la glace. Il me fit un clin d'oeil et je levai les yeux au ciel.

Un vent glacialOù les histoires vivent. Découvrez maintenant