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Le ciel était bleu et le soleil rayonnait. Tout le monde en profitait pour sortir, alors on se serrait sur les trottoirs. Les couples se tenaient la main, les enfants courraient dans tous les sens. Je levai la tête : sentir la chaleur sur mon visage me fit sourire. Je venais de quitter la patinoire il y a quelques heures et voilà que j'avais déjà envie d'y retourner. La patinoire agissait comme un aimant sur moi, elle m'attirait et ne me laissait plus partir. La glace était toute ma vie, je ne passais pas une heure sans y penser.
Je poussai la porte de la patinoire. L'air frais me frappa au visage, comme d'habitude.
Samuel s'occupait de l'accueil. Il me vit et me fit un clin d'oeil. Je lui souris et m'assis vers le banc le plus proche. La patinoire était pratiquement vide. Tout le monde voulait profiter du soleil, si rare en cette saison.
Je retirai mes chaussures, les mis dans mon sac de sport et enfilai mes patins. Je confiai mes affaires à Samuel et me dirigeai vers la piste.
Je venais de plus en plus souvent à la patinoire en milieu de journée. À croire que cette piste était réellement vitale pour moi. Je m'approchai du portillon et observai la glace. La lumière du jour traversait les fenêtres et venait s'étaler sur la glace.

- Et bien, qu'est-ce que tu attends ?

Je levai la tête d'un mouvement brusque : Emma. Mon sourire s'effaça d'un coup.

- Tu ne veux pas ta revanche ? Rappelle-toi l'humiliation que tu as subi au parc. Ne veux-tu pas me montrer ce que tu es capable de faire sur la glace ?

Soudain, une rage s'empara de moi. Je la suivis sur la piste. Je ne me laisserais pas faire, je ne perdrais pas une seconde fois face à elle.
Nous nous tenions l'une en face de l'autre et nous nous regardions droit dans les yeux. Elle se mit à me tourner autour, à m'examiner tel un moustique cherchant où piquer. Puis, elle sourit comme si elle avait déjà gagné ce duel. Mais, cette fois, ça ne serait pas pareil. Nous étions dans la patinoire, pas au parc. La glace était mon univers. Je ne subirais pas une nouvelle défaite, et surtout pas ici.

- Tu es prête à perdre Iris ? demanda-t-elle. Enfin, maintenant tu en as l'habitude !

Je restai immobile.

- Je vais te montrer comment on patine, continua-t-elle.

- Assez parlé ! m'écriai-je. Il est temps d'en finir une bonne fois pour toute, tu ne crois pas ?

Ce sourire satisfait qui se plaquait sans arrêt sur son visage m'agaçait au plus haut point.
Elle exécuta toutes sortes de figures avec souplesse et précision. Mais je n'étais pas impressionnée, cette fois, j'allais me battre.
Je fis également différents mouvements de danse sur glace. Elle ouvrit puis ferma la bouche, visiblement excédée que je relève son défi avec une telle aisance. Cependant, je ne devais pas me réjouir trop vite, notre duel venait juste de commencer.
Nous continuâmes ainsi de longues minutes. Ses yeux étincelaient d'une rage que je n'avais encore jamais vue.

- Je n'ai jamais perdu de défi de toute ma vie, lâcha-t-elle. Et ce n'est pas maintenant que ça va arriver !

Je ne répondis pas, plus concentrée sur mes gestes techniques que par ses provocations.

- Ne t'en fais pas Iris, dit-elle de va voix goguenarde. Ta mère était tout aussi minable et pitoyable que toi. Mais ça, tu le sais déjà, n'est-ce-pas ? La médiocrité doit être génétique.

Je relevai la tête, furieuse. De quel droit parlait-elle de ma mère ? Je comprenais pourquoi Louca n'avait pas voulu d'elle comme partenaire, elle était insupportable.

- Comment connais-tu ma mère ?

- Oh ! C'est une petite ville, ici. Tout se sait, ricana-t-elle.

Je ne pouvais plus supporter son rire, son air supérieur, tout m'énervait chez elle.
Nous étions toujours l'une en face de l'autre. Les quelques personnes qui étaient venues passer un agréable moment à la patinoire, avaient cessé de glisser et nous regardaient mi-effrayées, mi-extasiées.
Les poings serrés, je ne réfléchis pas et me lançai à toute allure en direction d'Emma. J'avais envie de voir la peur dans ses yeux. Je ne ralentissais toujours pas l'allure alors que je me trouvais à moins de trois mètres d'elle. Je l'avais sous-estimée, elle ne cillait pas. D'un mouvement rapide, elle tendit le pied et je trébuchai sur son patin. Heureusement, je parvins à me rattraper de justesse. Je n'aurais pas voulu m'étaler de tout mon long sur la glace devant Emma. Ça lui aurait fait trop plaisir.

Un vent glacialOù les histoires vivent. Découvrez maintenant