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Je montai les marches en soupirant. J'essayai de me frayer un chemin parmi cette horde d'élèves. Je pensais de nouveau à la dispute de ce matin avec Candice. Je me sentais si seule sans elle. Pourtant elle avait raison, je préférais continuer à patiner plutôt que de me réconcilier avec ma meilleure amie. C'était peut-être égoïste de ma part, mais c'était ce que je ressentais. Au milieu du couloir, je m'arrêtai. Quelqu'un me bouscula, en jurant. Je ne lui prêtai même pas attention. Candice regardait son portable, seule, devant la porte de notre classe. Où étaient les autres ? Elle fit un brusque demi-tour et tomba nez-à-nez sur moi.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? lui demandai-je.

Elle me jeta un regard noir et continua son chemin sans un mot. Bien sûr. À quoi pensais-je ? Elle avait dit qu'elle ne m'adresserait plus la parole. Je l'ai regardé partir, puis ai consulté l'emploi du temps sur mon smartphone. C'est bien ce que je pensais, deux de mes professeurs étaient absents cet après-midi. Je poussai un soupir. Déjà que la pause de midi m'avait paru longue, maintenant j'allais devoir attendre pendant quatre heures le cours de maths qui était, lui, toujours maintenu. Je n'avais aucune envie d'aller en permanence et encore moins de rentrer chez moi.
Je suis sortie du lycée et me suis baladée dans la ville, sans trop savoir où j'allais.
Je me suis retrouvée au coeur de la forêt, sur le chemin de randonnée. Puis, il se mit à pleuvoir. Je soupirai de nouveau. C'était vrai alors, le temps jouait sur notre humeur.
Les arbres s'agitaient, les feuilles mortes formèrent un tourbillon et la terre se transformait petit à petit en boue. Je faillis glisser sur le sol mais je me rattrapai de justesse à un tronc d'arbre. La pluie doubla d'intensité. Les quelques promeneurs encore présents se dépêchaient de rentrer chez eux. Alors que moi, je restai immobile. Je ne savais pas quoi faire, ni où aller. J'aurais bien aimé aller à la patinoire, seulement à cette heure-ci, la piste devait être bondé de monde et Samuel très occupé.
Mes cheveux dégoulinaient sur mon manteau, mes Converse étaient pleines de boue et mon jean était trempé. Mes sacs pesaient une tonne et je n'en pouvais plus. Au moment où je m'apprêtais finalement à faire demi-tour pour me mettre à l'abri, je glissai. Je m'étalai de tout mon long sur le sol. J'avais maintenant de la boue dans les cheveux, sur tous mes vêtements et même dans la bouche. Je me relevai lentement, j'avais encore le souffle coupé par ma chute. La terre que j'avais sur les dents me donna la nausée. J'essayai temps bien que mal de frotter mon jean avec la paume de ma main, en vain. Je jetai un oeil autour de moi à la recherche de mon sac de sport. Il fallait absolument que je me nettoie la bouche avec la gourde qui se trouvait à l'intérieur. Malheureusement, celui-ci avait roulé tout en bas de la pente boueuse et glissante. Je dus me tenir aux branches qui dépassaient sur le chemin pour ne pas de nouveau tomber. Arrivée en bas, je récupérai mes affaires et cherchai ma bouteille à travers mes habits de sport. Je m'étais agenouillée pour fouiller mon sac.
Tout le monde était parti à présent, il n'y avait plus un chat à l'horizon. Je me trouvais seule dans une forêt, couverte de boue et trempée jusqu'aux os. La pluie ne cessait toujours pas et je ne parvenais pas à mettre la main sur ma gourde. Epuisée par tous les malheurs qui m'était arrivée depuis le début de la journée, je fermai les yeux. Ma respiration se calma peu à peu. Puis, je regardai le ciel gris et les gouttes vinrent s'écraser sur mon visage. Je pensai que la pluie dans ma gorge enlèverai le goût horrible de la terre, apparemment je m'étais trompée. Mais en fait, le contact de l'eau sur mon front, mes joues et mon nez m'apaisa. Je pris une profonde inspiration et me remis à chercher ma gourde. Alors que je poussai mon legging sur le côté de mon sac, je tombai sur mes chaussons de danse. La dernière fois que je les avais utilisés - le matin même - Christelle me criait, une fois de plus, de faire attention à ma technique si nous voulions rester sur le podium au prochain tournoi. D'ailleurs, le trophée des lacs approchait à grands pas, et je n'étais pas prête. Je ne m'étais pas améliorée depuis la dernière compétition et je voyais bien que ça agaçait Christelle. Si je n'évoluais pas dans le bon sens très rapidement, elle ne voudra plus que je sois la partenaire de Louca. C'était tout bonnement inimaginable. Je m'était habituée à cet univers, aux entraînements, mais surtout à Louca. Il m'avait donné l'espoir de me battre. Avant, je ne dansais que pour moi et Samuel. Aujourd'hui, je danse pour lui, pour nous. Tout en pensant, je gardai les yeux fixés sur mes chaussons. Si je devais réellement m'entraîner, c'était maintenant ou jamais. Après tout, pourquoi la pluie empêcherait-elle de danser ? Je souris, puis me relevai. Je n'avais pas trouvé ma bouteille mais je refermai mon sac. Je saisis mon portable et appela mon partenaire. Il ne décrocha qu'à la quatrième sonnerie :

Un vent glacialOù les histoires vivent. Découvrez maintenant