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Tous les élèves de ma classe étaient réunis dans le gymnase. On chahutait, on bavardait ici et là. J'avoue que cela m'intriguait. D'habitude, personne n'était aussi impatient pour un simple cours de sport. Que se passait-il aujourd'hui ?

- En file indienne s'il-vous-plaît !  s'exclama le prof de sport. Montrez-moi vos autorisations.

Des autorisations ? Une étincelle se fit dans mon cerveau : une sortie était prévue aujourd'hui. Enfin, ce n'était pas vraiment une sortie, nous allions à deux pas du lycée. Et puis, je connaissais plutôt bien l'endroit où nous allions, puisque c'était à la patinoire. En plus, j'avais réussi à faire signer mon autorisation par mon père qui "ne voyait pas d'inconvénient à aller à la patinoire pour les cours", pour reprendre ses mots. Bien entendu, nous n'en avions pas parler à ma mère pour éviter un nouveau conflit inutile sur ce sujet.

J'étais si heureuse ! Nous allions pratiquer le sport que j'aimais le plus au monde !

Après que notre prof ait regardé minutieusement les autorisations de chacun d'entre nous, nous quittâmes le lycée.

Je souriai. Rien ne pouvait me faire plus plaisir que de patiner. J'en avais même les larmes aux yeux, et moi qui croyait que cette journée allait être horrible ! Personne ne pourra gâcher ce moment à la patinoire. Et puis, je verrai Samuel !

Ma joie grandissait à chaque pas, me rapprochant un peu plus de l'endroit le plus magique que je connaissais. Beaucoup dirait que j'exagère, qu'après tout c'était un sport comme les autres. Et bien, ces gens-là n'ont pas de passion. Ce n'est pas un reproche ! Au contraire. Je souhaite à tout le monde sur cette Terre de découvrir ce qui les rend plus libre et plus joyeux que jamais.
Soudain, je m'aperçus d'une chose qui me rendit encore un peu plus heureuse. Emma était absente aujourd'hui et Mathias n'avait pas fait signer son autorisation, alors il était resté en permanence !

- T'es contente hein ? lâcha Candice d'un air dégoûté par-dessus son épaule. Encore une perte de temps. Le sport, ça sert vraiment à rien.

Elle souffla bruyamment pour bien faire comprendre à quel point tout cela l'agaçait.

- Tu dis ça parce que tu as six de moyenne en sport ? rétorquai-je.

Elle ne répondit pas et se renfrogna.

J'avoue, j'étais assez fière de moi sur ce coup-là. Je l'avais dit : personne ne pourrait me gâcher cette sortie.

Dans le soleil qui perçait les nuages, j'apercevais déjà les chênes et la grande pancarte où était écrit le nom de la patinoire : "Dreams and Ice". Je l'avais quitté le matin même et j'y retournerai ce soir, mais elle me manquait déjà, cette piste.

Nous entrâmes dans la patinoire.

- Un peu de silence s'il-vous-plaît ! s'exclama le prof. Bon, voici Samuel...

Il y eut des "bonjour Samuel" mais ni moi ni lui n'écoutions. Nous nous regardions simplement.

- Alors vous allez indiquer votre pointure puis, votre niveau à Samuel. Niveau un, si vous n'êtes jamais venu à la patinoire. Niveau deux, si vous avez déjà patiner mais que vous n'êtes pas sûr de vous. Niveau trois, si vous savez patiner. C'est parti, allez !

Nous fîmes les uns après les autres ce que le professeur nous avait indiqué. Après un petit cafouillage sur la pointure de chacun, nous nous retrouvâmes tous, enfin, patins aux pieds.

- Les niveaux un et deux avec moi, les autres avec Samuel ! lança le prof de sport.

La classe s'est séparée en deux comme il venait de l'expliquer, puis nous sommes descendus sur la glace. Je n'arrivais pas à y croire, non seulement j'étais à la patinoire pendant les cours, mais en plus mon prof était Samuel. Je crois que je ne pouvais vraiment pas rêver mieux pour une séance de sport.

- OK, alors les jeunes, vous allez me faire deux tours de piste pour voir déjà ce que chacun est capable de faire ! dit Samuel. Vous pouvez y aller !

Tout le niveau trois était parti faire le tour de la piste mais moi, je ne bougeais pas.

- C'est moi où tu viens de plus en plus me voir ces derniers temps ? chuchota Samuel.

- À croire que je ne peux plus me passer de toi, murmurai-je.

Nous avons ri.

- Je pense que tu es capable de rattraper tes petits camarades maintenant, n'est-ce pas ?

Je lui lançai un grand sourire complice et m'élançai à vive allure. Je n'eus aucun mal à rattraper les autres qui, bien qu'ils sachent tous patiner, n'avaient pas l'entraînement que j'avais eu. Je les ai doublé un par un avant de freiner juste en face de Samuel.

- Tu pourrais aller moins vite peut-être, s'amusa Samuel. Ils viennent à peine de commencer leur deuxième tour.

Lorsque tout notre groupe réussit enfin à se placer en cercle autour de Samuel, celui-ci expliqua :

- Je vous propose quelque chose...Silence je vous prie !

Les conversations cessèrent aussitôt. Il faut dire que la seule chose que ne supportait pas Samuel, c'était les bavardages.

- Je disais donc, reprit-il. Je vous propose plusieurs ateliers du plus facile au plus dur. Mais avant toute chose, il faut les mettre en place, alors venez m'aider !

Nous sortîmes de la piste puis nous prîmes les différents objets que nous indiqua Samuel, dans la réserve, et nous repartîmes installer ces derniers sur la glace.

- OK, maintenant que tout est en place, quelques consignes : tout d'abord on ne se pousse pas, on ne rigole pas des chutes des autres, et surtout on s'entraide, d'accord ? De toute façon, je serai là-bas pour vous observer. Si vous voulez des conseils, vous pouvez aussi venir me voir.

Ensuite Samuel nous expliqua rapidement en quoi consistait les différents ateliers. Le premier - le plus simple - consistait à patiner sous des arcs de cercles alignés. Au second, il fallait simplement frapper dans un ballon sans perdre l'équilibre. Le troisième était un exercice de slalom entre des plots. Et enfin, le quatrième était une barre accroché à 80 centimètres de la glace, par dessus laquelle nous devions sauter.

- Si vraiment vous trouvez ça trop facile, vous pouvez faire les ateliers en patinant en arrière mais également monter la barre d'un ou deux crans de façon à ce que ce soit plus haut. Je vous laisse en totale autonomie. Je pense que j'ai tout dit, alors vous pouvez commencer ! 

Nous partîmes donc aux différents ateliers. Bien entendu, tous ces exercices étaient simples pour moi. Même en patinant en arrière. Mais je ne voulais pas me vanter. J'avais appris tout cela grâce à Samuel. Je m'approchai de ce dernier.

- Tu risques de t'ennuyer, me dit-il en riant. Et si tu montrais à tes petits camarades ce dont tu es capable ?

- Je ne pourrais jamais ! m'exclamai-je. Pas devant ma classe. Ils vont se moquer de moi.

- Tu es sûre ?

Et il mit la musique en marche. Il me connaissait par coeur. Immédiatement, je me mis à danser sur la glace. Cette glace sur laquelle je m'étais égratignée tant de fois. Les autres avaient arrêté les ateliers, ils avaient tous les yeux rivés sur moi. Ils étaient comme hypnotisés. Le professeur était bouche bée. On aurait dit qu'il venait de comprendre que j'étais l'une de ses élèves.
Avoir une passion, c'est magique. Dès que j'étais sur la glace j'oubliais tout. La musique m'emportait toujours ailleurs.
Lorsque j'eus terminé ma petite chorégraphie improvisée, un tonnerre d'applaudissement accueillit ma prestation. Je rougis. Le prof vint même me féliciter.

- C'était vraiment...Waouh ! me dit monsieur Marin. Je n'avais jamais vu ça avant. Je ne savais pas que vous patiniez comme ça mademoiselle. C'est incroyable !

J'avoue que cela me fit plaisir. Pour une fois que l'on venait me complimenter pour autre chose qu'une simple bonne note. Je compris à ce moment-là que c'était ça ma vie. Celle que je voulais.

Un vent glacialOù les histoires vivent. Découvrez maintenant