Chaque centimètre carré de mon corps hurle de douleur, sauf ma jambe gauche. Chaque parcelle de ma peau le réclame, demande impérativement son toucher. Mes joues me brûlent à l'attente que ses mains ne se pose à nouveau sur elles. Je serre les dents et secoue la tête, chassant une nouvelle vague de larmes qui me donne la sensation d'étouffer. Couchée à même le sol entre les linceuls respectifs de Tonks et de Remus, je me concentre à la fois sur cette répression de la douleur physique et sur un projet d'avenir. Bizarrement, malgré que cette bataille ne soit pas encore achevée ni même suffisamment entamée pour se prononcer sur les vainqueurs, je me cherche un futur échappatoire.
Jean n'aura plus besoin de moi, c'est une évidence. Assez grand pour se débrouiller tout seul, en lieu sûr à l'heure qu'il est, mon existence ne lui est plus indispensable. Ma seule raison d'être peut se passer de moi. Dans ce cas, si je vais à mourir dans les heures qui suivent, personne n'en souffrirait plus que ça. Mes amis meurent. Il...
Je recommence à compter les carreaux de pierre au plafond de la Grande Salle, tentant de m'occuper l'esprit. Un. Je devrais être aux côtés de Fred. Deux. Non, je ne peux pas. Je dois laisser sa famille auprès de lui. Trois. Moi aussi, pourtant, je suis sa famille. Quatre. Tonks et Remus aussi ont besoin de moi. Cinq. Les sanglots silencieux rendent l'atmosphère si lourde qu'elle pèse sur ma poitrine. Six. Parfois, un gémissement d'une douleur semblable à la mienne déchire ce silence respectueux lorsqu'un nouveau corps est rappartié ici. Sept. Ca pouvait être n'importe qui, mais ce fut eux. Huit. Ca aurait pu être n'importe qui. Neuf. N'importe qui aurait pu mourir. Dix. Après tout, mourir, ça arrive à tout le monde.
— Es-tu donc complètement fou ?
Aux murmurs s'élevant autour de moi, je devine que toutes les têtes se sont tournées vers cette voix féminine et étouffée de larmes, de peur probablement, et de son interlocuteur. D'une voix si basse que je ne peux la distinguer, celui-ci lui répond doucement. Pourtant, la femme hurle de plus belle :
— Tu penses vraiment aider en restant ici ? Tu ne sais plus obéir, tu ne veux plus entendre que tu ne peux pas, tu es trop jeune !
— Maman !
Un frisson me parcourt.
— Ginny aussi est restée, et je ne pouvais pas abandonner maintenant ! Je veux, je dois me battre aux côtés des miens...
Une poussée d'adrénaline, un instinct incontrôlable qui m'a si souvent traversée autrefois, presque maternel, m'ordonne de me lever. Me hissant sur les béquilles que Madame Pomfresh m'a dégottées tant bien que mal, je me dirige du plus rapidement que je puisse vers lui. Sur mon chemin, les sorciers et sorcières s'écartent et je laisse tomber mes béquilles de fortune pour m'appuyer sur Jean en l'attrapant par le col de son t-shirt, le secouant, hystérique :
— T'es suicidaire, c'est ça ? Tu tiens vraiment à te faire tuer ? Je ne t'avais pas dit de foutre le camp d'ici ?
— Stupéfix !
Humiliée, voilà ce que je suis. Alors que Bill Weasley, le visage dur, écarte mes doigts immobilisés d'un Jean abasourdi, je n'ai pas besoin de me demander quelle image je peux renvoyer à mes alliés. Celle d'une jeune femme, ou plutôt d'une enfant, en deuil. Brisée par toutes les épreuves plus sordides et improbables les unes que les autres. Une martyr. Pauvre Skår, dira-t-on, après tant de souffrance, c'est normal de perdre les pédales. Un goût métallique me coule dans la gorge, mais ce n'est pas du sang. C'est le goût amer de tout ce qu'il me reste : le vide, la honte, et la douleur. La présence de Jean changeait du tout au tout. S'il le faut, je l'escorterais moi-même à Pré-Au-Lard et l'y stupéfixerait. Une fois cela fait, je pourrais continuer de me battre sans me soucier de sa sécurité. De toute façon, si nous perdons ce soir, alors nous sommes tous perdus, Jean y compris. Nous n'avons pas le droit à l'erreur. Je n'ai pas le droit à l'erreur.
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𝐏𝐑𝐈𝐃𝐄 ⚊ ❪f. weasley❫
Fanfiction"𝙋𝙧𝙞𝙙𝙚 𝙞𝙨 𝙜𝙤𝙞𝙣𝙜 𝙩𝙤 𝙗𝙚 𝙩𝙝𝙚 𝙙𝙚𝙖𝙩𝙝 𝙤𝙛 𝙮𝙤𝙪 𝙖𝙣𝙙 𝙢𝙚" Lorsque Skår Abel se regarde dans un miroir, elle se voit un visage fendu en deux, dont une des deux moitiés n'est pas le sien. Le jour où sa mère a rejoint les troupe...