INTERLUDE

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La jeune fille sursauta lorsque Monsieur Weasley claqua des doigts juste à côté de son oreille droite, la réveillant brusquement. Il était si tard que, dans la salle d'attente du bureau de Kingsley, il n'y avait plus personne. En réalité, les couloirs du ministère de la magie étaient déserts depuis un bon moment. Après s'être assuré que personne ne pouvait les entendre, il dit :

— Skår, qu'est-ce que tu fais encore ici ? Je croyais que tu rentrais de mission ce soir ?

Sonnée, elle récita la phrase qu'elle se passait en boucle dans sa tête depuis des heures :

— J'ai de nouvelles infos concernant une possible planque pour ce clan de vampire que nous recherchons, je peux aller vérifier si elle est sûre dès ce soir mais il me faut des autorisations officielles pour y mettre les pieds.

Arthur la dévisagea avec perplexité.

— Enfin Skår, ça fait cinq jours que tu erres entre les bâtiments délabrés et le ministère. Ces vampires peuvent bien attendre un peu. Allons, soit résonnable. Il faut que tu rentres à la maison, maintenant.

Elle déglutit péniblement à la pensée d'affronter les occupants du Terrier.

— Fred n'a pas envie de me voir.

Skår prit une grande inspiration et ajouta :

— Ni personne d'autre d'ailleurs.

— Je t'assure que nous comprenons tous les raisons qui t'ont motivée, tu sais. Tu as fait confiance à Rogue et Dumbledore, tu as fait ce qu'il fallait. Ça n'est pas ta faute.

Il lui tendit le bras, catégorique :

— Allez, tu rentres avec moi.

C'était une des rares nuits qu'elle passait au Terrier. Couchée sur le dos, les mains sur son estomac, elle fixait le plafond d'un air absent. Les ronflements de Georges de l'autre côté de la pièce se joignaient au chant des grillons s'engoufrant par la fenêtre ouverte.

— À quoi tu penses ?

Fred, qu'elle pensait endormi, se retourna dans leur lit, à côté d'elle, pour pouvoir la regarder. Skår ne quitta pas le plafond des yeux, concentrée.

— Je pense à Jean, et en simultané je pense à nous, aussi.

D'un geste doux, il caressa la joue de sa petite amie en écartant une mèche de ses cheveux qu'elle gardait blonds, ces derniers jours.

— Dans la forêt interdite, le soir de la mort de Dumbledore, j'ai eu du mal à le reconnaître. Se retrouver face à ceux qu'il croyait m'avoir poussée à la mort l'avait transformé. Il était bouillonnant de rage, prêt à se battre. Un enfant si doux et si timide... J'ai peur que ce ne soit moi qui ne le rende mauvais.

Elle tourne la tête vers Fred, le bout de son nez effleurant le sien tellement leurs visages étaient près l'un de l'autre. Skår mourrait d'envie de combler cet espace entre eux, mais la culpabilité était encore trop forte. Et s'il ne voulait plus, et s'il ne voulait plus d'une telle proximité avec celle qui n'avait rien dit alors qu'elle savait que Dumbledore allait se laisser mourir ?

— Moi, je crois que c'est la mort qui nous rend aussi mauvais, parfois. À sa place, si tu étais morte, je crois que je serais devenu fou aussi. Tu ne rends pas les autres méchants, bien au contraire. Je me sens meilleur depuis que tu es là.

Elle contempla ses prunelles brunes, espérant de tout son cœur qu'il pensait ce qu'il venait de dire.

— Tu m'en veux, pour Dumbledore ?

— Pas le moins du monde. Personne ici ne t'en veux. Nous suivions tous les ordres de Dumbledore, et tu l'as fait aussi. Ce n'est pas plutôt toi, qui t'en veux ?

Il marqua une pause et ajouta soigneusement :

— Tu évites de rentrer à la maison ces derniers temps. Tu t'en veux, et tu as l'impression que de ce fait le monde entier t'en veux aussi, mais c'est faut.

Fred avait dit cela plutôt sur un ton doux que sur un ton de reproche. Il la regarda chasser une larme d'un battement de cil et posa ses lèvres contre les siennes pour la première fois depuis des jours. Ça leur avait manqué à tout les deux.

— C'est toi qui me rend meilleure, tu sais.

Face à face, Skår caresse les cheveux flamboyants du jeune homme et celui-ci sourit.

— Tu veux savoir quelque chose de drôle ?

Elle avait l'habitude des blagues avec Fred. Mais elle n'avait pas l'habitude qu'il ne lui demande la permission avant de lancer une plaisanterie.

— Je t'écoute.

— Tu te rappelles de cet élève de Dumstrang qui t'avait offert à boire, le soir du bal ?

Skår rit doucement afin de ne pas réveiller Georges.

— Je ne m'en souvenais pas, mais maintenant que tu le dis... Oui, nous n'avions pas discuté longtemps mais cet imbécile m'avait touché les fesses en pensant que ça me motiverait à accepter ses avances.

Un vague souvenir de cette ancienne version d'elle qui n'aurait jamais osé se défendre dans une telle situation l'amusait un peu. Elle était fière d'être devenue plus forte.

— Et tu te souviens de cette retenue dont j'ai écopé le lendemain ?

— Hum.

— Ben, j'avais frappé ce type, marmonna-t-il.

— C'était pour ça qu'il avait un œil au beurre noir le lendemain ? Et que Madame Pomfresh avait dû te faire repousser une dent ? Bon sang Fred, tu as beau être grand, ce type devait bien faire deux fois ta taille.

— Je sais. Mais aujourd'hui je ne recommencerais pas, je n'en aurais pas besoin. Tu te débrouilles très bien de ce côté-là !

Les doigts de la sorcière coururent le long du bras nu de Fred.

— Et si tu me laissais te remercier comme il se doit ?

— Pourquoi pas.

Elle réfléchit un instant et se souvient de ce truc qu'il réclame toujours, mais qu'elle refuse catégoriquement.

— Bon, alors dépêches-toi d'aller chercher ton balai dans le garage, ce sera la première et la dernière fois que tu m'emmènes en balade sur ce truc.

Il lui lance un sourire satisfait et se lève d'un bond pour mettre ses chaussures, puis il dévale les escaliers pour aller chercher son balai. Depuis le temps qu'il la harcèle pour lui faire faire un tour dans les airs... Skår avait le vertige, et connaissant Fred, il n'hésiterait pas à lui faire de petites frayeurs pendant la balade, du style, faire comme s'il ne contrôlait plus le balai. Mais au fond, lorsqu'elle redescendrai du ciel, elle ne le regretterait pas.

𝐏𝐑𝐈𝐃𝐄 ⚊ ❪f. weasley❫Où les histoires vivent. Découvrez maintenant