Chapitre 20

15 5 0
                                    

Encore une fois, Enzo allait devoir remonter dans l'hélicoptère. Les pâles soulevaient la poussière du toit et les cheveux du jeune homme. Une dernière fois, il tente de joindre Jen, sans succès. Il avait la désagréable impression que la situation, tant du côté professionnel que personnel, lui échappait totalement. Et il détestait cela. Il avait toujours eu la possibilité de contrôle, une croyance dans ce système qui lui permettait la sécurité. Et en l'espace de quelques jours seulement, tout s'était effondré. Avec un soupir, il raccroche et monte dans l'appareil. Il aurait quelques instants de répit pour réfléchir et se vider la tête, tandis que l'appareil prenait la direction de Lyon. Il avait rentré les coordonnées dans le GPS et prit deux autres hommes avec lui. Cette fois, Julien ne lui échappera pas. Il se plonge dans la contemplation du paysage qui défile et laisse également les pensées se présenter à lui.

Jen était introuvable et injoignable depuis près de deux jours déjà. Elle semblait avoir disparu. Mais l'était-elle vraiment ? De toute évidence, Julien, lui, avait réellement disparu, mais Jen ? Aucun signalement d'une capsule ayant cessé d'émettre n'avait été transmis. Celle de Jen devait donc toujours émettre. La pensée que la capsule de Jen se trouvait quelque part dans l'appartement, qu'elle l'avait enlevé elle aussi, lui traverse vaguement l'esprit, mais il rejette cette pensée. D'une part, il ignorait comment Julien s'était débrouillé, car l'emplacement de la capsule était inconnu. Enzo lui-même ignorait où se trouvait la capsule qu'on lui avait implanté. D'autre part, ce n'était pas le genre de Jen de faire cela ; enfin, espérait-il. Mais dans ce cas, la jeune femme n'avait pas complètement disparu. Personne ne pouvait disparaître depuis que les capsules avaient été inventées.

Le cœur d'Enzo s'emballe à cette réflexion. Jen était sans doute quelque part, à Paris. Elle le fuyait, bien qu'il ne comprenait pas pourquoi. Certes, ils s'étaient disputés, mais ce n'était pas la première fois que cela arrivait, et Jen n'avait jamais disparu ainsi. Le front barré par la réflexion, il se replonge dans les taches de couleur qui se succèdent au sol, se renfrogne.

Il était indéniable que l'aventure qu'il vivait resterait marquée dans l'histoire. Il avait donc intérêt à y briller, s'il voulait être reconnu. Enzo se concentre de nouveau sur l'affaire. Mentalement, il passe en revue les informations qu'il possède et tente de nouveau de trouver ce que Julien peut fabriquer. Pour Jen, il verrait après. L'information qu'une deuxième personne était apparemment avec Julien changeait beaucoup de choses et confirmait la piste d'un geste prémédité. Julien avait un complice. Mais pourquoi donc avaient-ils quitté l'autoroute pour se garer sur la bande d'arrêt d'urgence et abandonner le véhicule, au milieu de rien ? Où étaient-ils partis ? Que s'était-il passé ?

Enzo avait ordonné à l'équipe déjà sur place de quadriller le secteur et de diffuser le message à tous les Lyonnais de bien penser à fermer les voitures à clé. Les deux voitures avaient été volées dans des grandes villes : l'endroit idéel pour se fondre dans la masse et dérober des véhicules. Mais désormais, le signalement de Julien avait été diffusé. N'importe qui devait être capable de le reconnaître dans la rue. Il ne pourrait donc pas entrer dans Lyon de manière aisée. L'étau se resserrait.

Une fois là-bas, il irait voir la voiture, l'examiner. Il donnerait des ordres, organiserait une traque. Puis, il s'occuperait de Jen. Avec un grognement, il se renfonce dans le siège de l'hélicoptère et cherche une position confortable dans laquelle il pourrait se reposer : il avait très peu dormi depuis ces deux derniers jours.

*

Enzo se réveille alors qu'il sent l'hélicoptère perdre de la vitesse et commencer à manœuvrer pour se poser. Il fallait alors rester vigilant, car, bien que tout soit automatisé, il est toujours plus prudent de s'assurer soit même que tout fonctionne. Enzo retrouve momentanément la sensation de contrôle qu'il avait perdu. L'appareil se pose délicatement dans un champ et soulève un nuage de poussière. Le jeune homme jette un œil en direction de l'autoroute, qu'il aperçoit. Les voitures filent et le soleil se reflète parfois dans la carrosserie ou la vitre, l'éblouissant.

D'un geste leste, il saute à terre et les deux hommes derrière lui l'imitent. Il détaille l'environnement des yeux. À gauche, un champ de blé et à droite, un petit bosquet. Ils se trouvent à cinq kilomètres de Lyon : à cette heure, Julien devait être déjà là-bas, si l'objectif du jeune homme était de se rendre en ville. Mais personne ne semble l'avoir vu. Le jeune fugitif est donc peut-être caché quelque part, dans les environs. Enzo se tourne donc vers Bill, qui attend, les bras croisé.

— Bill, tu veux bien aller voir dans ce petit bosquet ? Nous, on va aller examiner la voiture là-haut et rencontrer les collègues de Lyon. Ok ?

Le dénommé Bill hoche la tête et se met en mouvement sans plus de cérémonie.

— Bien, lâche Enzo. À nous.

Tous deux grimpent quatre à quatre le talus qui mène à la glissière de l'autoroute. Derrière eux, le soleil commençait à se coucher et teinter le ciel d'une couleur orangé. Enzo se glisse sous la barrière. Les voitures passent à côté de lui, projetant de l'air sur le visage du jeune homme. Il aperçoit un peu plus bas les deux voitures et reconnaît immédiatement celle de Julien. Ou plutôt, celle qu'il a volé. D'un pas décidé, il se dirige vers les deux silhouettes qui se tiennent debout, à côté. 

CapsuleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant