Chapitre 14

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Enzo ouvre la portière, se penche pour regarder. La voiture était tout à fait normale, rien n'avait bougé. Ou presque.

— Vous dites qu'il manque un couteau suisse ?

Il a fait venir le propriétaire depuis Pau en hélicoptère, pour qu'il puisse formellement reconnaître la voiture. Cela a fait perdre un peu de temps, mais Enzo ne voit pas ce qu'il pouvait faire d'autres. Il a profité de ces quatre heures d'attente pour dormir un peu. En réalité, il sait très bien que Julien était désormais loin, et qu'il était inutile d'examiner la voiture, mais c'est ce qu'on lui avait demandé. Il n'y avait plus d'essence quand il avait essayé de la démarrer : Julien a dû l'abandonner et prendre un autre moyen de transport, mais pour l'instant, aucune voiture volée n'avait été signalée, alors il attendait.

— Oui, il était dans la boite à gants.

Il avait donc sur les bras un non-conforme qui se baladait avec un couteau (suisse, certes) dans la poche. Il n'aimait pas cela. Qui sait ce qu'il pourrait faire avec un couteau suisse. Tuer des gens, peut-être. Pour l'instant, aucune mort suspecte signalée non plus.

— Je vais faire le plein, et on va voir si elle marche toujours, annonce Enzo.

Il avait prévu un petit bidon, de quoi remplir le réservoir suffisamment pour la faire marcher et rouler quelques kilomètres avec. Une fois le réservoir rempli, Enzo s'installe côté conducteur, tandis que le propriétaire prend place côté passager. L'homme a été ému de retrouver la voiture qu'on lui avait volée et Enzo avait dû patienter quelque peu qu'il reprenne contenance pour commencer l'inventaire.

Il appuie sur le bouton pour démarrer le véhicule et le grondement du moteur se fait entendre. Tout a l'air de marcher correctement, il roule un peu, freine. Tout est ok. L'écran sur le tableau de bord est noir. Enzo le désigne du doigt :
— Il est éteint ?

L'homme tente de l'allumer, sans succès. Il jure.

— Ça marche pas ! constate-t-il.

Enzo n'a pas besoin d'être mécanicien pour comprendre que cela était tout à fait logique : le tableau de bord servait, entre autre, à allumer le GPS, en le coupant ou le désactivant, Julien avait dû réussir à éteindre le signal, ce qui expliquait que la voiture ait été introuvable jusqu'ici. Enzo se souvenait que Julien était ingénieur en maintenance des véhicules : il doit savoir exactement ce qu'il fait. Et il a dû répéter la même opération sur une autre voiture. Il est, encore une fois, invisible. Enzo frappe rageusement sur le volant, donnant un coup de klaxon. À côté de lui, l'homme commence à s'énerver :
— Il a bousillé ma bagnole !

Enzo sort de l'habitacle, il ne supporte pas l'homme.

— Calmez-vous, je suis sûr que cela se répare.

Il sort le téléphone et consulte l'emplacement du garage le plus proche, à quelques rues d'ici. Ils y seraient en moins de quelques minutes. Enzo se rassoit côté conducteur, démarre la voiture et entame un demi-tour. L'homme s'arrête de vociférer :
— Qu'est-ce que vous faites, où on va ?


— Au garage, réparer la voiture.

*

Lorsqu'il les voit se garer à l'extérieur, le garagiste relève la tête du moteur où il était penché et vient vers eux, en s'essuyant les mains sur un chiffon. Enzo lui serre la main.

— Vous avez un problème ? s'enquiert le garagiste.

— Plutôt, oui, répond Enzo.

Il fait valoir l'insigne de l'AFS. C'est la première fois qu'il l'utilise à visage découvert. Le garagiste pâlit.

— Je, je n'ai rien fait de mal. Je n'ai jamais eu d'infraction !

Enzo aurait pu prendre le temps de vérifier cette information, mais il était pressé. De plus, il sait d'expérience que le mensonge n'est pas souvent utilisé : or, le garagiste n'a aucune raison valable de mentir.

— Ce n'est pas pour cela que je suis là.

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