La voiture s'arrête rue Ernest Gabard. Rémy se gare sur l'un des parking de l'immeuble, déjà presque bondé. Il fait déjà sombre, la nuit commence à tomber. Anna est toujours en grande conversation avec Maxime. Ils sortent tous deux de la voiture en rigolant. Julien n'a pas suivi, il ne sait pas quelle est la blague. Il sort également, Rémy et Maxime se sont déjà quelque peu éloignés. Seule Anna reste, elle semble l'attendre. Il s'approche d'elle avant de considérer la barre d'immeuble devant lui. Ce sont de vieux immeubles dont la façade semble avoir été restaurée quelques décennie plus tôt, afin de les remettre au goût du jour : quelques fenêtres disposent de balcons, parfois minuscules, dont la rambarde de verre indique la restauration. La façade est peinte en blanc et tous les cinq étages, de plus grands balcons prennent la moitié de celle-ci. Quelques arbres bordent le tout, créant un semblant d'espace vert sur les pelouses en bordure de trottoir.
— On prend une photo ?
Julien n'a pas le temps de réagir, Anna s'est déjà placée à côté de lui, tout sourire, le téléphone braqué sur eux. Le flash l'aveugle quelques secondes. Il ne sait pas s'il a eu le temps de sourire. Pour donner le change, il fait mine d'être inquiet :
— Elle est bien ?
— Ouais, ça va, répond Anna distraitement.
Elle est déjà en train de pianoter sur l'écran. Sans doute envoie-t-elle la photo à l'ami qui les accueille ce soir, pour dire qu'ils étaient bien arrivés, ou bien la poste-t-elle sur Rézo. Julien ne voit plus ni Rémy, ni Maxime. Ils n'ont pas dû les attendre.
— Bon, tu viens ? lance Anna soudain, comme si c'était lui qui se faisait attendre.
Julien lui emboîte le pas et la suit dans le hall d'entrée. La cage d'ascenseur ressort du mur, à côté des escaliers. Anna appelle l'ascenseur. Sixième étage lance-t-elle lorsque celui-ci ouvre les portes. Julien s'engouffre à la suite. Cette fois, Anna ne reste pas silencieuse. Julien l'écoute parler sans rien dire :
— Maintenant que j'ai fini les études, on pourrait habiter ensemble, non ? Oh, bien sûr, pas dans l'appartement que tu occupes, il est trop petit. On pourrait peut-être prendre un autre, dans le centre-ville. Peut-être même une maison !
— On a pas assez de quota pour ça, fait remarquer Julien.
Anna soupire.
— T'es rabat-joie. On a le droit de rêver un peu, non ? Et puis, je te signale qu'on aurait pu en avoir un peu plus, si tu n'avais pas fait une infraction !
Les portes s'ouvrent, Anna sort précipitamment, furieuse. Julien reste bête, interdit. Il avait toujours pensé que cette infraction ne posait pas de problème à Anna : après tout, ce n'était que la première infraction, ne faisant baisser le revenu que de 15 % et il s'était tenu à carreau depuis. Il sortit de la cage d'ascenseur avant que les portes de celui-ci ne se referment automatiquement. Chaque citoyen se voyait attribuer un salaire égal, dès lors qu'il commençait à travailler. Mais ce salaire pouvait baisser ou augmenter, et c'était ce qu'il s'était passé avec Julien, lorsqu'il avait commis cette infraction. Au bout de trois infractions, on venait vous chercher pour vous envoyer au centre de non-conformité. Julien se secoue et chasse les mauvaises pensées qui lui passent par la tête : il était là pour passer une bonne soirée et fêter la réussite des camarades de promo d'Anna et d'elle-même.
La jeune femme est d'ailleurs déjà rendue au bout du couloir et sonne à la porte. Julien se dépêche de la rejoindre à grandes enjambées. Il parvient juste à hauteur du seuil lorsque la porte s'ouvre. Ils s'engouffrent tous deux dans la pièce déjà surchauffée de monde. Anna se jette dans les bras d'une fille brune aux longs cheveux lissés.
— Félicitatioooon, crient-elles toutes les deux en même temps.
Puis, Anna semble reprendre le comportement sérieux qu'elle affiche à l'ordinaire.
— Je te présente Julien, Celui-qui-m'est-Promis, fait-elle en désignant Julien du doigt.
Julien serre la main de la jeune femme et échange quelques paroles d'usage. Quelques secondes plus tard, Anna a déjà disparu, happée par la foule, sans doute à la recherche d'autres camarades. Julien aperçoit Rémy et Maxime, absorbés par une conversation avec trois autres personnes. Les pensées vagabondes de Julien sont coupées par la voix de la jeune femme brune qui demande s'il veut quelque chose à boire.
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Capsule
Science FictionAprès le Grand Soulèvement, des lois ont été créée pour satisfaire la population qui réclamait plus de sécurité, qu'elle soit financière ou politique. Ceux qui ont pris le pouvoir ont réussi à instaurer l'ordre et à rendre le monde parfait : il n'y...