Chapitre 19

76 9 5
                                    

PDV Saori, trois ans plus tard

"Laura... tu serres trop !", m'exclamai-je d'une voix étouffée, alors qu'elle venait une fois de plus de serrer le corset de ma robe.

Ma meilleure amie d'enfance soupira d'un air désolée avant de lacer ledit corset.

Trois ans avaient passé et, actuellement, je faisais un énième essayage de ma robe de mariée, le mariage ayant lieu dans deux semaines. Un an après être rentrée en Belgique, j'avais retrouvé Laura. Cette dernière travaillait dans la maison de couture qui était en charge des tenues royales, car sa mère était malade. La jeune fille s'était endettée comme pas possible pour payer les soins, mais ça ne suffisait pas. Sebastian mettait la main à la pâte, étant le père de Laura, mais ça ne suffisait toujours pas. Comme pour me mettre une épée de Damoclès supplémentaire au-dessus de la tête, mes parents avaient dit que si elle s'occupait de ma robe pour le mariage et que cette dernière était à leur goût, ils effaceraient sa dette.

Voilà comme je m'étais retrouvée à être dans ma chambre, deux semaines avant le mariage et avec Laura qui m'étouffait à cause du corset.

"Je sais que tu arrives à peine à respirer, mais tes parents ont été clairs...", dit doucement Laura.

Je ne répondis pas et reportai mon regard sur ma table de nuit. Dans un cadre bleu ciel, il y avait une photo de Nagisa et moi en train de jouer ensemble. C'était Karma qui avait pris cette photo peu après notre mise en couple et elle en m'avait plus quitté depuis. Il y avait également une photo de mon frère avec Rio juste à côté, dans un cadre rouge. Hormis ces deux photos, il n'y avait aucune couleur vive dans ma chambre, au château de Belgique. Tout était vieillot, ancien, terne. 

Je laissai mon regard s'attarder sur la vitrine qu'il y avait en face de mon lit. Mes parents avaient déployé tous les moyens possibles pour que je ne refasse plus jamais de judo et de tir à l'arc, mais j'avais au moins réussi à négocier de mettre en vitrine mon arc et mes deux carquois, comme souvenir. Heureusement qu'ils n'avaient toujours pas remarqué que j'avais un deuxième arc mais miniaturisable. Je ne l'utilisais plus, n'ayant aucune flèche, mais ça me faisait du bien des fois de détacher le pendentif et de tenir mon deuxième arc entre les mains. Cela me rendait nostalgique. 

Pour ainsi dire, je n'avais plus que les livres et mon violon, quand j'étais seule, pour m'évader de ma prison dorée. Il n'était pas rare que je m'enferme dans ma chambre pour jouer durant des heures à ma manière ou tout simplement des morceaux que Nagisa et/ou moi avions composé. Quand je jouais, j'avais l'impression de pouvoir toucher ce p'tit schtroumpf du bout des doigts, de pouvoir sentir son odeur d'agrumes légèrement boisée.

Au tout début, j'avais pleuré des jours durant, enfermée dans ma chambre et avec pour seul réconfort l'énorme peluche que Nagisa m'avait offert et que mes parents avaient accepté que je garde. Peut-être s'étaient-ils dit qu'ils ne pouvaient juste pas faire comme si ces quelques mois à Tokyo n'avait pas eu lieu...

J'étais vraiment malheureuse, mais je ne cherchais plus à me rebeller comme avant mon départ à Tokyo. J'étais malheureuse, mais je me forçais à garder le sourire, parce que je savais que Rio et Karma faisaient tout pour que Nagisa le garde. Je gardais le sourire car ces quelques semaines de bonheur pur que j'avais partagé avec Nagisa valaient pour moi une éternité de malheur. J'étais malheureuse, mais je savais que bien d'autres avaient un sort pire que le mien, alors je continuais à sourire. Je ne savais pas comment j'avais fait, mais j'avais réussi à amalgamer le comportement que je devais avoir et ma véritable personnalité.

"Saori, tu as essayé de discuter avec la famille royale ? Je te l'ai déjà dit, mais tu n'as pas à te rendre malheureuse pour les autres.

Your Arrow's MelodyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant