J'étais extrêmement égoïste. Le temps était passé depuis que j'avais lu les lettres de Marc. Je n'en avais parlé à personne et j'avais refusé toutes confidences auprès de mes proches. Je vous ignorais à la colocation comme j'ignorais mes collègues au travail. Marion ne m'en tenait pas rigueur. Elle n'aimait pas spécialement se mêler de la vie des autres alors elle s'abstenait de poser ces questions personnelles. Ce qui était l'opposé de Solian.
Ma réaction l'avait vexé et depuis, il ne me parlait plus et m'évitait autant qu'il le pouvait. Je m'en étais rendu compte il y a de cela quelques jours. Je n'avais pas compris comment il était possible de ne pas le voir venir travailler alors que j'étais au Caf'Sea toute la journée. Je prenais mes pauses le midi dans les vestiaires ou dehors mais je ne l'avais jamais aperçu. Marion n'en parlait pas et les propriétaires du café ne semblaient pas vouloir s'étaler sur le sujet malgré mes questions.
Même si je ne voulais pas le voir, je m'inquiétais pour lui. J'étais anxieux parce qu'il aurait pu avoir un autre problème qui l'empêcherait de travailler pendant des semaines. Ce qui ne semblait pas le cas. Mon silence face aux appels qu'il m'avait donnés le soir où j'avais lu les lettres ou encore que je l'évite le lundi et les jours suivants, n'avaient rien arrangé et cela avait blessé Solian.
—Marc, youhou, tu m'entends ? Hé !
Je revins à moi quand Marion me pinça la peau. Je me retournai vivement vers elle et lâchai la tasse que j'essuyais. Elle tomba à terre dans un bruit fracassant et de nombreuses têtes me jugèrent. Je m'excusai à mi-voix et me baissai derrière le comptoir pour ramasser les morceaux. Marion secoua la tête et m'apporta son aide.
— Ne te coupe pas ... Qu'est-ce que je viens de dire ? s'écria-t-elle exaspérée en levant les yeux au ciel.
— Aïe.
Elle me poussa et jeta les morceaux à la poubelle. Elle me guida vers la sortie arrière et m'imposa une pause pour me vider la tête.
— Ce n'est pas faute de t'avoir demandé d'en prendre une ce matin ! gronda-t-elle. Je ne sais pas ce qui te rend si stressé mais s'il-te-plaît, au travail, pourrais-tu être plus professionnel ?
Avais-je déjà dit qu'elle était franche et parfois un peu trop sèche ? Elle me jeta un dernier regard et me mit en garde : je devais me vider la tête maintenant et ici avant qu'elle intervienne à sa façon.
— Et je suis sûre d'une chose, c'est que tu n'aimeras pas ça, rajouta-t-elle avec un demi-sourire.
Puis elle claqua la porte. J'étais à nouveau seul avec moi-même. Mes yeux se perdirent sur la blessure ridicule que j'avais au creux de la paume. Le sang coulait mais ça ne semblait pas grave. J'allais m'asseoir quand la porte s'ouvrit à nouveau et qu'un objet vola dans ma direction. Je le rattrapai de justesse et Marion cria :
— Le mode silencieux existe, Marc ! Cesse de rêvasser sinon je te fais virer !
Je regardai mon téléphone les yeux écarquillés. A l'avenir, je mettrais un cadenas sur mon casier. L'écran tactile s'alluma et je vis le nom de Solian s'afficher. Mon coeur fit un bond dans ma poitrine. Je m'assis par précaution sur les marches et mis quelques secondes avant de décrocher.
D'abord un silence avec une respiration agacée à l'autre bout du fil. A l'expiration peu habituelle que j'entendis, je devinais qu'il fumait. Puis, il prit la parole en premier :
— Enfin. Tu décroches.
Je détectai des reproches dans sa voix. Elle était amère et impatiente. Je déglutis en silence.
— Mmh.
— Où es-tu ? enchaîna-t-il ignorant superbement ma réaction. Je veux que nous nous voyions.
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Bleu Silence ~ [BxB]
Teen Fiction" Puis je me suis souvenu de ce que tu m'avais dit, un jour. Que les routes que tu croisais se séparaient au prochain carrefour et que nos directions étaient toutes différentes. Tu t'attachais aux gens mais avec le temps, tu parvenais à nous laisse...