J'éternuai pour la centième fois. Le client en face de moi, légèrement éméché alors qu'il n'était même pas encore midi, releva la tête et haussa un sourcil, le visage lumineux. Il se moqua de mon état et railla de sa voix granuleuse :
— Qu'est-ce que ce petiot a bien pu faire pour s'enrhumer ?
Le sous-entendu était si grossier que je savais parfaitement à quoi il faisait allusion. Quelques clients avaient écouté ce que l'homme avait dit et avaient secoué la tête, certainement habitués à ce genre de mauvaises blagues. Pour ma part, ce n'était pas la première fois que je le voyais. Il parlait plus souvent à Marion et essayait de la draguer, malgré les mises en garde du patron.
Aujourd'hui, Marion n'était pas là. Et j'étais seul au comptoir. Il n'y avait que moi à qui parler et cet homme devait penser que j'avais les mêmes pensées perverses que lui. Depuis l'ouverture, il me parlait de ses aventures d'un soir dans sa jeunesse et tout ce qu'il avait pu faire pour prendre du plaisir. J'avais le droit à tous les détails possibles et croustillants inimaginables. Il me parlait de sa femme et comment il la traitait bien. J'avais le droit à tout.
Il ne se doutait pas que je n'étais pas intéressé. Je faisais tout pour ne pas l'écouter mais je répondais par onomatopée pour la forme. Et par politesse. Et j'étais trop concentré à ne rien casser pour faire attention à ce qu'il disait. J'avais mal à la tête et mes membres engourdis ainsi que mes oreilles sifflantes me faisaient souffrir. Mes yeux étaient rouges de fatigue. Et je devais surtout me moucher toutes les minutes pour éviter un malheureux accident envers un client.
— Tu les aimes comment, toi, petiot ? Insista l'homme en m'offrant un sourire troué.
J'avalai ma salive de travers et l'ignorai. Je n'avais pas envie de m'engager sur ce genre de débats. C'était grossier et surtout, je ne pense pas que l'homme aurait aimé savoir ce que j'aimais vraiment. Il ne m'en tint pas rigueur parce qu'il répondit à sa propre question en me faisant une longue liste que je n'entendais pas. Un couple me sauva une heure et demie plus tard quand ils vinrent s'installer. Je fondis sur eux pour prendre leur commande. Du coin de l'œil, je vis François sortir des cuisines. Il aperçut l'homme ivre et son visage mécontent annonçait déjà la suite des événements.
Ni une ni deux, l'homme était mis à la porte et il brailla qu'il porterait plainte. Il nous jura de nous faire de la mauvaise pub. François ne s'en inquiétait pas. Et cet homme venait à chaque fois qu'il le pouvait. Ses paroles n'étaient que des paroles en l'air. Il disparut et je pus souffler.
À midi, mon état empira. Je me sentais fiévreux. Je voyais parfois flou et j'avais mal partout. Je voulais dormir. Je luttais pour finir ma journée parce que je ne voulais pas que François me renvoie chez moi. J'avais une promesse à tenir et j'étais déterminé à ne pas me défiler.
À ma pause, je tentai une boisson énergisante. Cela n'arrangera rien et je sentais la fatigue grandir. J'étais tellement malade que je ne sentais même plus les effluves d'alcool qui me passaient sous le nez. À vingt heures, je retrouvai péniblement mon casier et m'écroulai contre. Je n'avais même pas la force de me changer. Je transpirais à grosses gouttes et mon crâne était sur le point d'exploser.
Par un ultime effort, je me changeai et sortis par derrière en m'appuyant sur les murs. Ce n'était même plus un rhume que j'avais... J'étais totalement dans les vapes, sur un nuage silencieux et je ne voyais pas très bien. Je ne pouvais plus lutter et m'assis sur les marches, la tête dans les bras. Une main fraîche releva mes cheveux et jugea la température de mon front. Je relevait les yeux et découvris Solian devant moi, une cigarette aux coins des lèvres, une expression inquiète sur le visage.
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Bleu Silence ~ [BxB]
Ficção Adolescente" Puis je me suis souvenu de ce que tu m'avais dit, un jour. Que les routes que tu croisais se séparaient au prochain carrefour et que nos directions étaient toutes différentes. Tu t'attachais aux gens mais avec le temps, tu parvenais à nous laisse...