Double {Terminé}

Chapitre 72

La petite fille aux boucles blondes saute dans les bras de l'homme qui entre dans le grand salon en compagnie de son père. Depuis le temps qu'elle ne l'a pas vu. Il l'embrasse et la repose à terre. Elle l'admirait tellement à cet âge là. Il était le sage, le médiateur, l'adulte à qui elle pouvait se confier.

Il ne lui ramène jamais de cadeaux, il est juste affectueux, sans plus.

Ils dinent tous ensemble, sa mère est là aussi. Comme d'habitude elle a un sourire crispé, et obéit au doigt et à l'œil à son mari. La petite fille ne le remarque pas vraiment d'habitude, mais là, elle le voit très clairement. Elle aimerait se lever de table pour accompagner sa mère dans la cuisine et pour essayer de comprendre pourquoi elle parait si triste.

Elle repousse sa chaise, mais son père l'arrête immédiatement dans son élan, et elle est obligée de rester assise jusqu'à la fin du repas, les joues brûlantes.

Après le repas, la jeune mère monte immédiatement dans sa chambre, qu'elle partage évidement avec son mari, à son plus grand regret. Celui-ci part de son côté se faire couler un bain bien chaud et parfumé. Ne reste plus dans le salon que la petite et l'invité. Il est avachi au fond d'un fauteuil et lit le journal avec un sourire satisfait collé sur les lèvres. A la place du titre, est écrit en caractère gras et bien visible : Arrestation d'un groupe de rebelles, exécution prévue dans quelques semaines. 

Mais la petite ne comprend pas, elle ne sait pas bien lire, même si ses parents se tuent à la tâche pour l'élever du mieux que possible pour en faire une érudite. Le regard de l'adulte se pose sur elle. Il sourit et elle grimpe sur ses grands genoux. Il l'installe confortablement et lui fait lire des lignes importantes du journal :

-         Tu vois Axelle, ici, il est dit que la police a arrêté les méchants. La police de papa. Tu dois être très fière de lui n'est ce pas ? lui dit-il d'un ton ferme et détaché.

Elle hoche docilement la tête.

-         Tu aimerais être comme ton papa plus tard ? Etre le chef, et être là pour protéger la population et tuer les méchants ?

-         Pourquoi il faut les tuer les méchants ? répond-t-elle simplement.

L'homme soupire et son gros ventre se gonfle puis se dégonfle dans le dos de la petite.

-         Tu veux que les méchants continuent d'être méchants ?

Elle secoue la tête en signe de négation.

-         Alors il ne suffit pas de leur demander d'être plus gentil, il faut les faire disparaître. Tu comprends ?

Elle hoche la tête avec conviction. Il faut tuer les méchants, ne pas les laisser faire du mal encore. Tous les tuer.

-         Alors si tu as compris cela, tu feras un très bon travail en prenant la relève de ton père. 

C'est alors qu'elle fronce les sourcils.

-         Tu n'es pas convaincue ?

Il parait en colère. Il se crispe et resserre la pression qu'il exerce autour de la taille de la petite.

-         Papa, il rend maman triste.

L'adulte semble se détendre.

-         Tu sais, ce n'est pas grave ça. Pourquoi rend-t-il ta maman triste, dis moi.

-         Ils se sont disputés hier. Il y avait beaucoup de cris dans la cuisine. Maman était triste, et elle est triste tout le temps.

-         Ecoute ma chérie, il arrive que les parents ne soient pas d'accord de temps en temps. Mais ils ne se font pas de mal. Mais je suis sûr que c'est papa qui avait raison. Il a toujours raison, sache que toutes ses décisions sont justes.  Lorsque tu seras à la tête de cet état, tu auras peut être un mari toi aussi. Il faudra que tu le soumettes. C'est toi l'héritière, lui il n'est rien. Ta maman n'est rien, elle tient juste compagnie à ton papa pour ne pas qu'il se sente seul, mais ta maman n'est pas triste, je ne vois pas pourquoi elle serait triste. Toutes les mamans aimeraient être à sa place. Tu comprends ?

La petite comprend, et elle retient tout. Sa maman n'est rien, mais pour elle, elle est tout. La petite fille écoute l'homme, et elle fait ce qu'il dit, pense ce qu'il pense. C'est lui le sage.

-         Oui oncle Gab !