La conversation continua pendant des heures. Parfois, on m'incluait dans les discussions et d'autres, je ne faisais qu'écouter. Antoine me lançait des regards de temps en temps, accompagnés de ses fidèles sourires, dévoilant ses dents blanches parfaitement bien alignées. Des éclats de voix vinrent troubler la quiétude. Je me retournai vers l'origine du bruit, comme toutes les personnes présentes dans la pièce. Je me levai discrètement pour aller vérifier de moi-même si tout allait bien. Les disputes étaient très fréquentes, ici, surtout entre les blessés et le médecin. Mais, aujourd'hui, il y avait des voix de femmes qui devaient se crêper le chignon. Je me dirigeai vers les deux femmes qui se hurlaient dessus et au moment de les séparer, je reconnus Claude Villenoy. Cette harpie qui avait dénoncé Erich. En me voyant, elles arrêtèrent. Claude avait toujours cette mine renfermée sur son visage, elle n'avait vraiment pas une jolie tête. Tandis que l'autre, avait un regard plus doux. Je ne la connaissais pas vraiment, mais elle s'occupait comme moi des blessés. On avait quelques fois parlé mais sans plus.
— Écoutez, je ne veux pas interférer dans votre discussion, mais vous parlez trop fort. Tout le monde vous entend. Un des médecins est dans les parages. Si j'étais vous, je reprendrai plus tard ou alors j'irai dehors.
— Arrêtez donc de vous inviter là où vous n'êtes pas conviée. Allez plutôt vous occupez d'hommes qui vous intéresse, me lançait Claude d'un ton hargneux.
Cette peste faisait référence à Erich. Elle ne perdait vraiment rien pour attendre.
— Je pars de ce pas, souriais-je innocemment, ah et Michelle, vous devriez expliquer la relation qu'entretient Claude avec votre mari, c'est très intéressant, sur ce, je vous laisse.
Je les quittai donc après avoir lancé cette bombe. D'un côté, je m'en voulais de m'être rabaissée au niveau de Claude, mais d'un autre, elle m'énervait tellement que c'était tout bonnement impossible que je la laisse sans lui avoir lancé une pique. Je me sentais un peu mal pour Michelle, mais, tout le village ou presque était au courant de l'aventure de son mari. Elles continuèrent donc à se hurler dessus comme deux mégères. Tôt ou tard, un médecin arriverait pour les séparer et les remettre à leur place. Je revins donc au chevet d'Antoine qui parlait toujours avec sa mère sur la culture de pomme de terre qui en cette saison était loin d'être bonne. La conversation était tellement inintéressante que je regrettais presque d'avoir quitté les deux femmes. Je tentai même quelques pas en arrière, quand tout-à-coup, Marie se tourna vers moi.
— Mes enfants, je vais vous laisser. Il faut que je rentre. Le dernier train va bientôt partir. Je ne voudrais pas le rater. Lucile, voudriez-vous bien me raccompagner à la sortie ? L'hôpital est tellement grand que j'aurai peur de me perdre.
— Oui bien sûr, répondis-je poliment même si j'avais compris que c'était juste une ruse pour me parler.
— Merci, bon mon petit titi, je t'embrasse fort et j'attends tes nouvelles avec impatience. Tu peux m'écrire quand tu veux, je tâcherai de te répondre le plus rapidement possible, dit-elle en serrant Antoine si fort dans ses bras que celui-ci dû lui faire remarquer pour qu'elle le laisse respirer.
— Au revoir maman.
On s'éloigna donc toutes les deux, se dirigeant vers la sortie. Une fois hors du champ de vision d'Antoine, Marie s'arrêta et nous entraîna vers une endroit plus tranquille. Elle me prit la main et me la serra fortement.
— Je tenais à vous dire un grand merci pour ce que vous faites pour mon fils. J'ai vu comment il vous regardait, les regards ne trompent pas. Mon mari me lançait ces mêmes coups d'œil, ceci dit, avant qu'il ne perde la vue bien évidemment et même avant lorsqu'il a eu un strabisme. Saviez-vous a quel point c'était compliqué d'être attiré par un homme qui louche. Fort heureusement, j'étais tombée amoureuse avant, raconta-t-elle joyeusement.
Je la regardai en souriant poliment sans vraiment comprendre pourquoi elle me disait ce genre d'information sur son mari, mais je n'osais pas la reprendre.
— Enfin, je voulais dire qu'Antoine est vraiment tombé sous votre charme et je dois avouer que vous m'avez fait forte impression. Je suis très heureuse de vous avoir rencontrée.
— Ce plaisir est partagé Madame.
— Oh chère enfant, appelez-moi Marie, nous allons être de la même famille bientôt, me sourit-elle.
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SUITE ALLEMANDE
Fiksi PenggemarEn pleine Seconde Guerre Mondiale, la vie des français est bousculée. Ils doivent pour la plupart, cohabiter avec l'ennemi. Dans le petit village de Bussy, la cohabitation est difficile. Les allemands règnent et instaurent un climat hostile. Alors...