Je n'avais presque jamais utilisé ce terme avec elle. Maman...je le trouvais froid et vide de sens, d'amour. C'était un mot que l'on lançait comme tant d'autres. Moi, je ne voulais pas de ça, je voulais que ma mère se sente mère, qu'elle sache que je l'aime, quoi que je puisse lui dire. Je lui donnais mes surnoms, ceux que je lui inventais et elle s'en satisfaisait, ses yeux pétillaient de tendresse. En vérité, j'avais l'impression qu'elle ne l'aimait pas plus que moi ce mot, parce que ça la vieillissait, parce que ça lui faisait oublier ce qu'elle avait été pour cette autre femme, Maman.
Non, je n'aimais vraiment pas l'appeler ainsi mais ce soir là, lorsque j'entrai chez moi, alors qu'elle m'attendait seule parce que mon père rentrait tard, je ne pus la nommer autrement.- T'en as mis du temps.
Sa voix était âpre, douloureuse. Elle n'avait pas oublié ce qu'il s'était passé quelques jours plus tôt, elle n'avait pas oublié toutes les heures qu'ils avaient perdus à attendre mon retour. Nous n'en avions pas reparlé, pas jusqu'à maintenant mais je sus que la soirée serait lourde, son regard ne trompait personne.
- Y a eu un accident au cinéma.
Je n'avais aucune raison de lui mentir, il valait mieux être honnête, au contraire. Aussi, elle soupira et m'invita à m'asseoir sur le canapé du salon. Pour la première fois depuis un certain temps, j'obéis sans protester, j'attendis en silence. Elle s'assit dans un fauteuil, contempla le feu vacillant de la cheminée et ses mains se crispèrent sur ses genoux.
- Que s'est-il passé ? Demanda-t-elle finalement.
Je pris un certain pour répondre, ouvrant et refermant brutalement la bouche. Était-ce si compliqué de s'exprimer lorsque l'on avait peur de croiser le regard d'un autre ?
- Le stagiaire de Fridg à fait une crise d'angoisse.
- Le stagiaire ? Tu étais avec lui ?
Sa voix trahissait sa réelle surprise qu'elle ne tentait pas vraiment de cacher.
- Non, J'suis aller au cinoche avec Eijiro et il était là aussi, c'est tout.
Elle hocha la tête.
- Il va bien ?
- Je sais pas, je suis pas aller à l'hôpital avec lui. Enfin, je crois qu'il s'est claqué le dos parce qu'il est tombé d'une rangée.
- De toute façon, tu le verras la semaine prochaine. Non ?
- Sans aucun doute, à moins qu'il ne soit pas remis d'ici là.
Une nouvelle fois, elle acquiesça, plus pour elle-même que pour moi. Un nouveau silence tomba dans le salon, un silence pesant et oppressant. Je restai assis, contemplant mes doigts qui trituraient nerveusement le tissu de mon pantalon. Je ne la regardai pas, non, je ne voulais pas croiser son regard.
- Maman ?
L'appel avait été soudain dans ma bouche, j'en fus moi-même surpris mais je ne regrettai pas une seule seconde mon geste. Nous allions parler, une mère et son fils.
- Oui ?
Sa voix était forte, ne trahissait pas ses émotions que j'aurai aimé connaître.
- Comment tu te serais senti si tu avais été là-bas à ma place ?
Elle ne répondit pas tout de suite et je n'eus pas le courage de lever les yeux pour la regarder en face. Était-ce peut être ce qu'elle attendait ?
- Je ne sais pas, je serai sans aucun doute été soulagée qu'il ne se soit rien passé de grave.
Ce fut à mon tour de hocher la tête, sans toutefois la détourner de mes mains. Je pouvais sentir son regard braquer sur moi, il était neutre.
- Pourquoi cette question ?
Je haussai les épaules.
- Je ne sais pas..
Je n'ajoutai rien, elle ne tenta pas de m'encourager comme elle le faisait de temps de temps.
- Dit moi Katsuki, que t'arrive-t-il en ce moment ?
Je sursautai, levai brusquement la tête vers elle et plongeais mes yeux dans les siens. Elle avait cessé de bouger, me regardait bien en face, attendant que je réponde.
- Je suis comme d'hab.
- Non, et tu ne tromperas personne, que ce soit moi ou bien ton père. Ces derniers temps, tu sembles perdu, c'est à peine si tu veux nous regarder dans les yeux. Que se passe-t-il ?
Je soupirai, un soupir las.
- J'ai parlé, des gens m'ont fait réfléchir à des choses auxquelles je n'avais jamais pensé avant. Je ne sais plus quoi faire..
- Faire de quoi ?
- De ma vie. Comment suis-je censé en profiter alors que je sais que je vais crever d'ici quelques années, voir quelques mois ? Comment suis-je censé garder espoir ? Vous ne pensez pas que vos efforts sont inutiles ? En fait, je ne comprends pas pourquoi les gens s'accrochent autour de moi, alors que ce ne sont pas eux qui vont mourir. Et moi dans tout ça, je me fiche de savoir que je vais mourir...c'est un peu comme si je l'avais toujours su.
Elle me dévisagea en silence, aucun mouvements n'aurait pu trahir une quelconque surprise de sa part.
- Tu sais Katsuki, même si tu ne t'en rends pas compte, il y a autour de toi des gens qui t'aiment et qui veulent simplement ton bonheur. Ça fait longtemps qu'on a compris que tu ne voulais de l'aide de personne, mais on ne peut pas se résoudre à te laisser mourir ainsi, ce n'est pas une vie.
Elle marqua une pause, reprenant longuement son souffle.
- Tu dis que tu as toujours su que tu allais mourir, c'est normal. On est tous destinés à mourir, d'autres plus tôt malheureusement. Il est possible que tu fasses partie de cela, mais comme chacun d'entre nous, tu as encore le pouvoir de rester plus longtemps.
Elle prit une grande inspiration.
- Simplement, pourquoi tiens-tu tant à partir aujourd'hui ?
La question était évidente, j'aurai du la prévoir mais mon coeur rata tout de même un battement à cet instant ci. Je levai les yeux vers ma mère, les doigts serrés sur le tissu de mon pantalon. Je pouvais sentir la peau en dessous réclamer une pause mais je l'ignorai.
- Je ne peux pas te donner ma réponse maman, pas maintenant en tout cas.
- Pourquoi ?
- Si je ne suis pas encore prêt à me l'annoncer à moi-même, tu le seras encore moins.
Elle ne répondit pas, arquant ses sourcils. Finalement, elle poussa un long soupir et l'ambiance, jusque là pesante, sembla s'alléger.
- Très bien, je te laisse le temps de répondre.
Elle ferma un instant les yeux, je restai assis en silence.
- Maintenant, viens manger fils ingrat !
Elle avait repris sa voix de tous les jours, je faillis sursauter lorsqu'elle haussa le ton. Pourtant, un sourire se forma au coin de mes lèvres.
- J'arrive, pas besoin de crier Vieille Peau !
Aucune réponse, je sus qu'elle souriait, elle aussi. Je me levai doucement et la rejoignai alors vers la cuisine.
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Hey !
J'avoue avoir eu un peu de mal à écrire ce chapitre, c'est la panne d'inspiration en ce moment 😅
Sinon, merci pour les 300 vues, c'est incroyable à mon niveau d'écriture et je vous en suis vraiment reconnaissante ! 😁🎉
J'espère que le chapitre vous aura plu, je vous dis à une prochaine fois !
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"Ton Étoile..." [Bakudeku]
Fanfiction"Ma vie est un échec, de ma naissance jusqu'à maintenant..." Katsuki à 23 ans et peu d'espoirs dans la vie. Sa seule consolation est de se dire qu'il mourra bientôt. Pourtant, un médecin qu'il pensait détester va changer sa vue sur le monde, sa vue...