Harry n’avait jamais rêvé devenir père. Lorsqu’on lui posait la question il répondait toujours « Plus tard », comme si ce projet n’avait pas eu le temps de murir dans sa tête alors que depuis trois ans qu’il était avec Norah, il n’avait pensé qu’à ça. Leur avenir. Elle, vêtue d’une robe immaculée, un voile cachant ses yeux. Lui, nerveux, au côté de son meilleur ami devant l’autel, répétant mentalement ses vœux. Et il pensait à l’après, surtout. Le terrain qu’il avait payé et dont il rêvait de construire une maison dessus, le ventre arrondi de celle qui serait devenue sa femme, les projets qui se concrétiseraient.
Seulement, lorsque Norah lui apprit qu’elle était enceinte, Harry resta coït. Il ne pensa pas à son avenir, juste à ce présent qui le terrifiait. Il allait devenir papa. Il devait renoncer à sa carrière, aux concerts improvisés en pleine rue pour trouver un vrai travail et répondre aux besoins de sa petite famille. Norah et lui n’étaient même pas mariés. Il aimait dire en plaisantant qu’ils vivaient dans le pêché mais cela l’emmerdait vraiment. Pas tellement à cause de la religion, mais plutôt parce que sa vie lui échappait déjà alors qu’elle ne faisait que commencer.
Et puis, Ronan était né. Trois kilos deux-cents. Quarante-huit centimètres. Et alors que la sage-femme annotait différents dossiers, le regard de Harry restait figé sur les pieds de son fils. Ses pieds si petits, ses mains si étroites qui s’agitaient, tout comme le reste de son corps. Norah embrassa le front du nouveau-né avant de poser son regard sur Harry, en larmes, qui réalisait enfin combien ce petit être allait le combler de bonheur. Harry n’avait toujours pas de vrai job et vivait avec Norah dans un studio à côté de la maison de sa mère mais en voyant son fils pousser son premier cri, il avait su que ça irait pour eux.
- Tu veux le prendre ? Demanda Norah, le visage perlé de sueur.
Norah avait toujours été une belle femme mais aujourd’hui, Harry avait l’impression de le redécouvrir. Comme s’il retombait amoureux d’elle une deuxième fois, alors qu’elle lui offrait un enfant. Hésitant, Harry s’installa sur une chaise à proximité et attendit que l’auxiliaire vienne lui tendre son fils recouvert d’une couverture. Verte. La même couverture que Harry avait quand il était enfant. Un cadeau de sa mère. Harry prit Ronan dans ses bras. Dans un premier temps, maladroitement, ne tenant pas assez fermement sa tête alors que son corps s’agitait. Par la suite, avec précaution. Comme un trésor qu’il venait de découvrir et qu’il avait peur qu’on lui vole. Pourtant, Harry savait. Il savait que Ronan était fragile. Il savait que la grande faucheuse n’était pas loin mais à cet instant, il oublia tout. L’amniosynthèse qui révéla une anomalie. Un taux de globules blancs trop élevé et tous ces termes médicaux qu’il n’avait pas retenu. Au final, il n’y avait que la mort. Une mort auquel Harry s’était préparé sans vraiment saisir ce que cela impliquait. Surtout parce qu’aujourd’hui, il tenait son fils dans ses bras, plus vivant que jamais. Et qu’est-ce qu’il l’aimait, Ronan…
- Hey… Souffla le brun en regardant le visage du bambin esquisser une moue.
Cette même moue que Harry faisait étant enfant, lorsqu’on lui avait confié un secret qui était trop lourd à porter pour ses épaules frêles.
- Je t’aimerais toute ma vie, continua Harry, toujours dans un murmure. Je ne te laisserais jamais. On s’en fou de ce que les médecins disent, t’es un champion, toi. Tu vas vivre éternellement.
*
Lorsque Harry retrouva sa maison, il fût frappé par le silence qui l’entourait. Pas une once de bruit, pas un cri d’enfant ni même un éclat de rire. Rien. Juste le vide. Le vide dans la maison, dans le cœur de Harry, dans ses yeux à force d’avoir trop pleuré. Et dans sa tête, les derniers mots qu’il n’a cessé de souffler à Ronan. Il aurait pu lui dire qu’il l’aimait, lui exprimer combien il était fier de lui, de ce petit garçon de quatre ans qui était plus courageux que son propre père. Mais Harry, il ne pouvait pas lui dire cela. Il n’était pas prêt à perdre son fils. Pas de cette manière. Pas après qu’il eut cru avoir éradiqué le cancer alors que le crabe revenait, toujours plus agressif et invasif. « Le foie et les reins, Monsieur Styles » avait appuyé le médecin alors que Harry continuait de parler du taux de survie qui avait été réduit à néant.
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One shot.
Fanfiction"To me, fearless is not the absense of fear. It's not being completely unafraid. To me, fearless is having fears. Fearless is having doubts. Lots of them. To me, fearless is living in spite of those things that scare you to death."