Chapitre 12 - Docteur ou pirate ?

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La vie de Lucrèce s'était nettement améliorée depuis qu'elle avait discuté avec son père cette fameuse nuit, et plus généralement, depuis qu'elle s'était confiée sur son état à ses parents. Elle se sentait comme soulagée d'un poids, délestée d'un fardeau et c'était terriblement apaisant. Comme elle le faisait depuis des années, la jeune femme s'acquittait de ses tâches quotidiennes, bien que bien plus allégées. Ses parents et le Docteur Cartwright s'étaient montrés intransigeants. Après avoir failli perdre l'enfant, il était hors de question qu'elle prenne le moindre risque, notamment en se surpassant. Et elle était tout à fait d'accord. Cette petite vie qui grandissait en elle, même si elle n'était pas voulue, avait pris une place colossale dans son cœur. Et à en croire les attentions que lui portait son père, elle n'était pas la seule à se préoccuper et à se pâmer devant la rondeur de son ventre.

Absorbée par ses pensées, Lucrèce caressa tendrement la bosse de plus en plus apparente de son abdomen. Se voir ainsi grossir la fascinait, en réalité. Bien qu'elle n'eut jamais été très fine, sa prise de poids était flagrante, à la grande satisfaction de sa mère qui ne manquait jamais une occasion de la faire manger. Lucrèce sourit en repensant à la fois où, après avoir étendu le linge, comme elle le faisait d'habitude, elle avait trouvé sa mère, les poings sur les hanches, qui l'attendait impatiemment dans la grande salle encore vide, une multitude de plats déposés devant elle. La jeune femme avait eu beau protester qu'elle ne parviendrait jamais à avaler tout cela, sa mère n'avait pas flanché et, elle devait bien l'avouer, son appétit grandissant l'avait bien vite démentie.

Tandis qu'elle marchait distraitement sur la plage, les cheveux emportés par l'air salé légèrement humide, Lucrèce songea avec une drôle de sensation au cœur qu'un autre élément, et pas des moindres, avait changé au cours de ces dernières semaines. Depuis sa consultation d'urgence le jour où elle avait perdu du sang, le Docteur Cartwright et elle avaient développé une profonde amitié. Cela avait commencé par des visites journalières du médecin qui s'inquiétait de l'état de santé de sa patiente et qui veillait au bon déroulement de sa grossesse. Chaque jour il lui apportait un petit quelque chose qui lui remontait le moral et qui lui faisait oublier l'espace d'un instant l'abandon de Radburn. Que ce soit un livre, une fleur cueillie sur le bord du chemin ou un fruit bien frais, Lucrèce recevait toujours ses présents avec une grande joie. Et une sincère reconnaissance. Sans lui, elle craignait que son rétablissement n'aurait pas été aussi rapide...

- Lucrèce ! Lucrèce, attends-moi !

La voix de son amie, même si elle était étouffée par les bourrasques de vent, parvint aux oreilles de la jeune femme qui se retourna.

- Marianne ! Mais que fais-tu ici ? Toi qui détestes l'eau !

Sa jeune amie la rejoignit en quelques foulées, le souffle court.

- J'étais sur le port quand je t'ai vue au loin. Cela fait quelques jours que nous n'avons pas eu le loisir de discuter alors j'ai voulu te rejoindre.

- Tu as eu raison, Marianne. Comment te portes-tu ?

- C'est plutôt à moi de te poser cette question, Lucrèce ! Regarde-moi ce ventre si... rond ! s'exclama la jolie blonde, les yeux exorbités.

La future maman éclata de rire sous le regard médusé de Marianne.

- Je ne suis qu'à cinq mois de grossesse, mon amie. Tu risques de me voir gonfler encore un peu plus d'ici l'accouchement ! plaisanta-t-elle, un sourire malicieux aux lèvres.

- J'en ai conscience mais...

- Assez parlé de mon ventre, la coupa Lucrèce, l'air faussement menaçant.

Cette fois, Marianne arbora le sourire taquin propre à son amie et lança :

- Tu as raison. Surtout que j'ai tout un tas de questions à te poser sur un certain médecin tout à fait charmant !

Son trésor le plus précieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant