Chapitre 18 - Confrontation

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- C'est vous Radburn ? gronda Pierre, hargneux.

Le pirate se contenta d'acquiescer, campé sur sa position. 

Les deux hommes se regardaient fixement, aucun des deux ne voulant baisser les yeux. Ce petit duel ridicule ne mènerait nulle part, Radburn le savait, mais il tenait à montrer au père de sa bien-aimée que l'on ne l'intimidait pas si aisément. Cette conversation, ils allaient l'avoir, il s'en était fait la promesse. Il voulait prouver à cet homme qu'il était digne de sa fille, qu'il était le seul et l'unique capable de l'aimer éperdument tout en la protégeant contre vents et marées. Se reconcentrant sur le combat de coq qui se déroulait entre lui et l'aubergiste, il ne put empêcher un petit sourire amusé de se dessiner sur ses lèvres quand il remarqua l'expression butée, presque boudeuse, de l'homme qui deviendrait sous peu son beau-père. Son rictus ne passa visiblement pas inaperçu auprès de l'homme puisque son expression se durcit un peu plus en même temps qu'un grognement digne d'un chien menaçant s'échappait de sa gorge. Cela n'eut d'autre effet sur Radburn que d'accentuer son sourire à tel point que ses dents se dévoilèrent dans une expression carnassière. Enfin, au bout de ce qui lui parut une éternité, le père de Lucrèce hocha la tête pour se soustraire à son regard, l'air satisfait.

- Bien ! Très bien ! s'exclama-t-il en se frottant les mains.

Après un moment d'hébétude, Radburn comprit à quel jeu jouait l'homme. Il le mettait à l'épreuve. Eh bien, soit ! S'il devait se soumettre à pareille situation pour être auprès de Lucrèce il était prêt à le faire. 

- Pourquoi êtes-vous ici ?

Le temps n'était plus à l'intimidation alors Radburn décida de répondre sincèrement. S'il voulait convaincre un père d'être l'homme idéal pour sa fille, il devait lui montrer à quel point il l'aimait. 

- Pour Lucrèce. 

Pierre, qui marchait de long en large jusqu'à maintenant, s'arrêta net pour faire face à l'homme qui avait fait souffrir son enfant.

- N'ayez pas l'effronterie de me dire que vous êtes revenu pour elle alors même que vous l'avez laissée après avoir obtenu d'elle ce que vous vouliez ! cria Pierre, excédé.

Radburn comprenait les accusations de l'homme mais il ne comptait pas se laisser faire. D'ici la fin de la journée, le père de Lucrèce aurait compris !

- J'ai abandonné votre fille, je ne peux pas le nier. Je suis un pirate, elle a dû vous le dire d'après le jugement que je lis dans vos yeux et être marié et père de famille n'a jamais été dans mes plans. Alors, quand j'ai fait la rencontre de Lucrèce, je n'ai pas voulu analyser les sentiments qu'elle faisait naître en moi. Je n'avais pas la moindre envie de remettre toute mon existence et mes certitudes en question pour une femme rencontrée par hasard. 

- Espèce de...

Radburn esquiva le coup que voulut lui porter l'aubergiste d'un geste précis. Et avant que son adversaire ait pu faire le moindre mouvement il l'avait saisi par le col.

- Écoutez-moi, bon sang ! Et arrêtez de me couper la parole en essayant de me frapper ! Je ne suis pas là pour me battre ! Je n'ai pas envie de perdre mon temps pour des querelles pareilles alors que la femme que j'aime et que je n'ai pas vue depuis des mois m'attend derrière cette porte ! 

Radburn avait comme explosé. La patience n'était pas une de ses vertus et, à en voir son expression agacée, Pierre l'avait compris. Il ne supportait plus ses insinuations et ses excès de violence. Il devait entendre raison et l'écouter. Il devait comprendre ! Maintenant ! Cela faisait plus d'une demi-heure qu'ils se faisaient face en chien de faïence et à peine avait-il commencé à parler. Radburn ne voulait pas perdre une seconde de plus à tenir un dialogue de sourds. Sa petite perle l'attendait quelques mètres plus loin et, après le long voyage qu'il venait de faire, il n'avait qu'une hâte, aller se reposer en la serrant dans ses bras. D'un geste sec, le pirate lâcha l'aubergiste qui se redressa après lui avoir jeté un regard noir et avoir remis de l'ordre dans ses vêtements, les traits tirés par la colère.

Son trésor le plus précieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant