Son trésor le plus précieux

Chapitre 21 - Folie

- Lucrèce, ma perle, je crois qu'il est temps d'aller nous coucher.

Lucrèce était du même avis. Si elle se risquait à rester un moment de plus la tête reposée contre son torse, les yeux clos, elle était sûre de s'endormir. Or la grande salle de l'auberge n'était pas l'endroit le plus approprié pour cela. 

- Tu as raison. Rentres-tu sur le Princesse Andromède ou veux-tu que je demande une chambre pour toi à mon père ?

Radburn laissa échapper un grondement. Ce n'était pas exactement ce qu'il avait en tête. Non. Lui pensait plutôt la serrer bien fort dans ses bras la nuit durant. Il était convaincu que cela ne déplairait pas à la jeune femme. Cependant, elle ne raisonnait pas avec la même insouciance que lui...

- Ni l'un ni l'autre, ma perle...

La jeune femme le regarda, perdue. Ses grands yeux bleus cherchaient une réponse dans les siens, ce qui le fit sourire sournoisement.

- Comment cela ?

- Je n'ai ni l'intention de louer une chambre ni celle de regagner ma cabine, tout simplement parce que je t'ai fait une promesse, ma perle. Celle de ne plus jamais te lâcher. Alors, cette nuit et toutes les prochaines, je vais la passer avec toi, ma perle. 

Radburn était fier de son petit discours qui produisit un effet merveilleux sur sa belle. En effet, la future maman hoqueta, les yeux écarquillés de surprise.

- Mais... Mais enfin, Radburn... Nous ne pouvons pas...

Le petit air choqué qu'elle revêtait le ravissait, et pas seulement intérieurement. Un rictus rempli de satisfaction étira ses lèvres sur le côté.  

- Bien sûr que nous pouvons. Je t'aime. Tu m'aimes. Mon enfant grandit en toi. Qu'est-ce qui nous en empêcherait ?

Lucrèce était complètement sonnée. Radburn se rendait-il compte de ce qu'il disait ?

- Radburn ! Nous ne sommes pas mariés, je te rappelle. Il serait tout à fait inconvenant que nous nous retrouvions à partager le même lit, s'écria-t-elle.

Comme si cela était possible, le sourire de Radburn s'agrandit un peu plus. L'homme leva la main pour attraper une mèche rebelle appartenant à sa bien-aimée qu'il enroula autour de son index.

- Mon amour ! Je crois que nous accordions bien peu d'importance au fait d'être mariés quand nous avons conçu cette petite merveille.

Radburn profita de l'hébétude de l'élue de son cœur pour caresser distraitement son ventre. Il avait beau avoir le plus grand mal à réaliser qu'il allait être père, le fait était là. Dans quelques semaines, il tiendrait un petit être fait de sa chair et de son sang dans ses bras. En attendant, Radburn se délecta des rougeurs délicieuses qui trônaient fièrement sur les joues rebondies de la jeune femme. Ses paroles l'avaient touchée en plein cœur. 

Lucrèce devait bien avouer que les dires de l'homme n'étaient pas totalement faux ni délirants. Seulement, jamais son père n'autoriserait l'homme à partager son lit alors qu'ils n'étaient pas unis aux yeux de Dieu. Et même si elle était déjà enceinte, il ne permettrait pas à Radburn de ruiner davantage sa réputation, en lui donnant accès à la couche de sa fille. 

- Mon père...

- Ton père n'aura pas son mot à dire, ma perle, la coupa-t-il.

Radburn était persuadé que la conversation qu'il avait eue avec le père de son aimée rappellerait à l'homme les sentiments qu'il avait pour sa fille. Pierre - il avait depuis appris par Lucrèce qu'il se nommait ainsi - savait désormais quel genre d'homme il était. Il avait conscience qu'il n'abandonnerait plus son enfant.