Chapitre 18

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(Je vous conseille d'écouter la musique à partir de là où je vous le dirais dans le texte :) )


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La journée qui suivit, Gaïa le passa dans le noir complet et dans un froid glacial, presque étouffant. Incapable de faire autre chose que pleurer, elle s'était enfermée dans cette chambre d'hôtel, les rideaux tirés, le coeur en morceaux. A même le sol, elle laissait aller ses larmes qui s'écrasaient sur ses joues, puis sur la moquette épaisse mauve de la pièce. Les quatre murs contenaient son chagrin abyssal, la protégeant de l'extérieur comme un cocon mortuaire et lui permettant d'exprimer pleinement la douleur qui lui broyait les boyaux. Le calvaire était tel qu'il lui avait coupé le souffle à plusieurs reprises.

Plus tard, bien plus tard, le visage asséché par les larmes, les yeux rougis d'avoir trop pleuré, et les lèvres striées de petites coupures à force de les avoir mordues, Gaïa sortit enfin de cette chambre.

Luttant depuis des années contre la maladie et un coeur fragilisé, son père s'était finalement éteint à travers une crise cardiaque. Personne ne s'y était préparé, mais tout le monde l'attendait. A la pensée de savoir sa famille seule autour de lui, et de se savoir elle trop loin, la Française n'avait pu retarder son départ: il fallait qu'elle rentre. Elle avait réservé le premier avion pour Paris et avait téléphoné à Noémie Dumont entre deux sanglots. Sa voix peinée et compatissante au téléphone lui conseilla de rentrer et de prendre « le temps qu'il lui fallait pour se reconstruire ».

Gaïa s'engouffra dans la nuit noire d'Ottawa le coeur aux bords des lèvres, la silhouette courbée par la souffrance aigüe d'avoir soudain perdu son paternel, son modèle, le tout premier homme de sa vie. Celui qui avait toujours cru en elle, qui l'avait porté, chéri, et protégé. Celui qui avait donné sa vie pour la sienne. Son monde s'effritait, une partie se désintégrait. Le taxi qui la menait à l'aéroport l'attendait en bas.

Ses yeux gonflés ne virent pas la haute silhouette sortir derrière elle dans la nuit et se faufiler dans son dos pour l'encercler de ses bras et l'amener contre elle. Ne pouvant plus retenir les larmes qu'elle tentait de garder au fond de ses yeux, Gaïa se laissa soudain aller, relâchant son corps raide et la hanse de sa valise qui trouva le sol. Les grands bras sombres la serrèrent un peu plus, ramenant son dos sanglotant contre un large torse tiède couvert d'un manteau entre-ouvert dont l'ombre rabattit les pans autour d'elle. Puis, elle posa un menton sur le haut du crâne de Gaïa.

« Shhh », murmura-t-elle tout doucement en étreignant la jeune femme.

Les genoux de Gaïa s'affaissèrent sous elle, tremblants de douleur, mais la chimère la retint fermement contre elle. Autour d'eux, la nuit était si épaisse qu'on ne devinait ni étoile ni lune. Le souffle contre ses cheveux réussit l'exploit de la calmer légèrement. L'apaisant. La silhouette l'enveloppait de ses grandes ailes, l'aidait à se tenir debout, lui transmettait la chaleur de son organisme.

L'Etat et toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant