Chapitre 13

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La ville de Vancouver se détachait, majestueuse et impressionnante sur les montagnes enneigées au loin, le tout plongé dans un ciel rose aux notes orangées. Les minces rayons nacrés du soleil couchant coulaient dans les eaux de la péninsule Burrard. La province de la Colombie-Britannique offrait aux yeux de Gaïa, un spectacle ravissant, et une des plus belle salutation.

Les sept heures de vol avaient amenées l'équipe du Premier ministre à fouler le sol du grand Ouest en fin d'après-midi, les menant directement à l'hôtel où ils passeraient la nuit. Le rendez-vous était prévue pour le lendemain matin.

Pour une question d'anonymat et de tranquillité, Noémie Dumont avait réservé un maison privative à Eagle Harbour, au Nord de Vancouver, à une demi heure de la ville. La demeure perdue entre les conifères, était située en hauteur et surplombait le petit port pittoresque et secondaire des lieux.

Lorsqu'il se garèrent, le ciel s'est assombri. Un bleu paisible flottait au dessus de la baie, elle aussi aux couleurs marines et sereines. Des traînées rosées disparaissaient derrière l'horizon sur lequel se détachaient quelques arbres noirs.

Les gardes du corps de Justin Trudeau investissement les lieux en premier, vérifiant que l'endroit était sécurisé, avant de faire signe aux reste de l'équipe qu'elle pouvait sortir. Une odeur de résine mêlée à celle de la baie, fraîche et revigorante, les guida jusqu'à la maison.

Une fois que tout le monde fut installé et que le personnel réduit engagé pour la soirée préparait à manger dans la cuisine, Gaïa descendit dans le salon où un grand piano trônait dans un coin. Elle se cala sur le canapé en face de la grande baie vitrée donnant sur les eaux de l'océan Pacifique, et ouvrit le livre qu'elle avait glissé dans sa valise. Les flammes rougeâtre de la cheminée derrière elle lui léchaient le dos, l'enveloppant dans une agréable sensation.

« Les mémoires d'Hadrien de Marguerite Yourcenar. Très bon choix », dit une voix masculine près d'elle. Sursautant, Gaïa laissa tomber le livre de ses mains qui rencontra le parquet lustré.

De longs doigts se penchèrent pour le ramasser et lui tendre.

« Les dieux n'étant plus et le Christ n'étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc Aurèle, un moment unique où l'homme seul a été ».

Les yeux marins de Justin Trudeau lui sourirent lorsqu'elle accepta le livre, médusée. Il venait de citer la phrase d'une correspondance de Gustave Flaubert qui était à l'origine du désir de Marguerite Yourcenar d'écrire ce roman historique. Une longue lettre de l'empereur romain vieillissant  Hadrien à son petit-fils adoptif de 17 ans et éventuel successeur, Marc Aurèle, où se mêlait politique et philosophie. 

« Je suis impressionnée »

« Nous sommes deux, répondit le brun, dont la haute silhouette se ploya pour s'asseoir près d'elle, un énième dossier à la main. Ça vous plait? »

« Beaucoup. J'aime à connaître la vision de cet homme sur la mort, la dualité déroutante du corps et de l'esprit, le sacré, l'amour, l'art et le temps. Et la façon dont l'autrice taille, façonne, affine avec volupté chacun des ses traits intérieurs en lui faisant dire: "Je compte sur cet examen des faits pour me définir, me juger peut-être ou tout au moins pour me mieux connaître avant de mourir. »... », lu-t-elle.

Le Premier ministre contemplait la nuit noire par la fenêtre, un léger sourire aux lèvres, l'air pensif.

« Moi aussi, il m'inspire ».

« Je ne savais pas que vous étiez un lecteur de roman d'auteur français », souligna Gaïa.

« Comment le sauriez-vous? »

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