Chapitre 43

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Gaïa se retrouva seule et malheureuse. Les mensonges de Sophie, la colère dans la voix de Justin et son départ... la culpabilité qu'elle ne pouvait s'empêcher de ressentir malgré elle. La jeune femme s'affala sur son canapé et alluma une cigarette. Elle sentait qu'elle l'avait blessé. Qu'elle l'avait déçu, encore une fois. Pourquoi s'empêchait-elle d'être heureuse? Pourquoi refusait-elle de se battre pour leur relation? Parce qu'au final, c'était ce qu'elle faisait, chaque fois.

Peut-être parce qu'elle avait connu ça. Le divorce de ses parents, son frère ne l'avait jamais digéré. Leur père était parti avec une autre femme, et son frère n'avait jamais pu lui pardonner et n'entretenait aucune relation avec leur belle-mère. Pourquoi cette fois-ci, se serait différent? N'était-ce pas exactement le même scénario? Un homme qui délaisse sa femme pour une autre? Gaïa avait la sensation d'être une imposteure. Une fraude. Elle repensa à Hadrien, Ella-Grâce, et Xavier. Comment le prendrait-il? Que leur père quitte leur mère?

La jeune femme secoua la tête. Elle avait le cafard.

Cette nuit-là, elle attendit un message du Premier ministre qui ne vint jamais et eut du mal à trouver le sommeil. Elle fit des cauchemars qui la menèrent au petit matin et elle arriva au travail de mauvais poil. La sensation d'être sur le point de perdre quelque chose de précieux à tout moment. D'être sur le fil du rasoir. Mais d'être impuissante en même temps. Bénédicte remarqua sur humeur de chien et lui proposa de dîner avec elle à la pause. Elle l'entraîna dans un petit restaurant avec terrasse intérieure. Elles commandèrent des club sandwichs et une bouteille de vin.

« On dira rien », chuchota Bénédicte, complice.

Elle leur servit un grand verre, puis, croisa les bras sur sa poitrine. Ses longs cheveux noirs, assemblés sur son épaule droite, brillaient sous le soleil encore timide du mois d'avril. Ses yeux noirs aussi et sa peau tânée étaient un hymne à ses origines Inuit. Elle était inuk.

« Bon, ma petite baguette, tu vas tu m'dire ce qu'il se passe tabarnak! »

Gaïa remua sur sa chaise, mal à l'aise. Elle ne savait même pas par où commencer, aussi, elle but une longue gorgée de vin frais qui lui donna du courage.

« Pour commencer, est-ce que ça a comme un lien avec l'humeur de marde du PM de ce matin? », reprit-elle en arquant le sourcil.

« C'est possible... »

« Va falloir faire attention ma baguette, tu pourrais mener le pays à sa perte si tu continues de te chicaner avec le PM »

Gaïa émit un petit rire contrit.

« Je t'ai dit qu'on était parti en week-end avec Justin »

« Oui »

« Eh bien... il m'a avoué qu'il pensait... qu'il pensait divorcer »

La réaction de Bénédicte ne manqua pas, et ses yeux s'arrondirent sous l'effet de la surprise.

« Il a changé d'avis? »

« Apparemment, il en a marre de faire semblant, de mentir et de ne pas être libre... »

« Il a pas tord »

« Et tu sais que Sophie m'avait dit que c'était ok avec le fait que Justin ait quelqu'un d'autre dans sa vie »

« Oui »

« Eh bien.. il lui a parlé en revenant du Japon, et... elle lui a dit qu'elle refusait de divorcer parce qu'elle voulait sauver leur mariage ».

« What the fuck? », lâcha Bénédicte un peu trop fort. Elle plaqua sa main sur la bouche et dévisagea Gaïa le front plissé.

« Mais qu'est-ce qu'il lui a pris? Elle est skyzo? »

L'Etat et toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant