Chapitre 51

278 10 7
                                    

La fin de semaine fila. Le dimanche, alors que Gaïa avait encore lézardé la journée au lit, elle se regarda enfin dans le miroir et daigna se brosser les cheveux. Le lendemain matin elle reprendrait le chemin de l'édifice Langevin. Il fallait qu'elle se bouge. Justin était encore au Mexique et ne revenait que le mardi soir.

La nuit s'imposa et c'est dans le brouillard qu'elle s'habilla et gagna son bureau. Bénédicte était avec le Premier ministre en déplacement, elle avait été chargée d'écrire ses discours pour l'occasion. Ses collègues l'accueillirent chaleureusement et elle découvrit qu'il lui avait offert un gigantesque bouquet de fleurs qui prenait presque tout son bureau. Tous scrutèrent sans s'en cacher la blessure au front.

Gaïa se sentait déphasée. Comme si elle avait trop dormi, ou bien qu'elle était encore fatiguée. Elle eut du mal à se concentrer sur ses tâches de la journée. Elle vivait chaque geste comme un effort, et un mal de tête la gagna au moment de quitter pour la soirée.

« Ca va? », lui demanda André un collègue qui avait passé la tête dans l'entrebâillement de la porte. Ses sourcils légèrement froncés signifiaient qu'elle s'inquiétait.

« Oui tout va bien! Je suis un peu fatiguée »

« Tu ne t'ai pas reposée ces derniers quatre jours? »

« Il faut croire que j'ai du retard à rattraper », plaisanta Gaïa, sans réelle vitalité dans le ton.

« Rentres vite. Prends ta journée demain au besoin! ». Sa tête disparut derrière le mur.

La jeune femme rentra chez elle en trainant des pieds. Les gens passaient autour d'elle, sans que son regard ne s'accroche sur un visage en particulier. C'était comme si elle n'arrivait pas à faire la mise au point. Les marches jusqu'à son palier lui parurent interminables. Lorsqu'elle arriva chez elle, les lumières étaient allumées alors qu'il faisait noir dehors.

« Il y a quelqu'un? », demanda-t-elle tout haut.

Mais il n'y avait personne. Elle envoya un texto à Bénédicte pour savoir comment se passait le séjour.

« Ok le président du Mexique est ben hot, il est fucking nice en plus! Le PM a ben géré les affaires, Joshua dit qu'il a gagné des points à l'international et que tu peux être fière de lui ».

Gaïa laissa tomber son téléphone sur la table de chevet et s'étendit sur sa couette. Qu'est-ce qui clochait chez elle? Qu'est-ce qui ne tournait pas rond? Elle eut l'impression de s'endormir, mais pourtant ses yeux scrutaient le plafond. Elle lâcha un soupir et se força à aller se laver le visage. La jeune femme mit pied à terre et soudain, la chambre tourna et elle s'écroula à même le sol. Hébétée, elle observa le mur, des étoiles dansant dans ses yeux. Son bras parvint à se lever et à attraper son téléphone après cinq tentatives infructueuses. Son coeur s'était mis à battre la chamade, et l'angoisse montait. Que lui arrivait-il?

Elle n'arriva qu'à composer le premier numéro. La voix chuchotante de Bénédicte décrocha au bout de trois sonneries.

« Ma petite baguette, je te manque à ce point? »

Le souffle saccadé, Gaïa se força à se concentrer.

« Je... quelque chose ne va pas », souffla-t-elle.

« Hein? Mais non qu'est-ce que tu racontes? Tout va bien, pourquoi tu dis ça? Tu fais ton introspection c'est ça? Tu capote? Te pogne dont pas le crâne »

Un silence passa et s'éternisa.

« Je... suis tombée »

« Hein? Tombée? Comment... mais ça va? ». Sa voix ne chuchotait plus.

L'Etat et toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant