Chapitre 40

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La petite cabane dans les bois qu'elle avait cru apercevoir à travers les branches feuillues des grandes arbres du domaine s'avéra être un somptueux chalet en rondin de bois. Une grande terrasse sur pilotis surplombait le lac où un petit quais en bois lui aussi accueillait un foyer pour un feu et deux chaises sur lesquelles reposaient des plaids. Une petite barque flottait, attachée au quais. Gaïa monta les escaliers qui menaient à la porte d'entrée massive et fut ébahie devant tant de beauté à l'intérieur. Une vaste pièce de séjour en cathédrale s'offrit à elle. Cuisine américaine, pierres, poutres, bois, une immense cheminée, des canapés moelleux, de larges baies vitrées donnant elles aussi sur le lac.

« C'est magnifique », murmura-t-elle, sous le charme.

« Je savais que ça te plairais », répondit Justin avant de poser son sac de voyage sur l'îlot central de la cuisine.

La jeune femme continua sa visite à l'étage avec les trois chambres que le chalet comportait et choisit la suite parentale. Une immense chambre au lit tout aussi gigantesque, avec vue sur lac et baignoire à vasque posée près de la baie vitrée qui donnait sur une autre petite terrasse, plus privée.

Elle redescendit au nez de chaussée en se sentant particulièrement privilégiée. Justin l'accueillit avec un verre de vin et il l'entraîna sur la terrasse. L'air était frais mais pas trop froid, la nuit étoilée illuminait faiblement les arbres autour d'eux, se miraient vaguement dans les eaux du lac. Ils trinquèrent et le Canadien l'amena doucement contre lui pour savourer l'instant.

« J'aimerais avoir le pouvoir d'arrêter le temps »

Gaïa se retourna et contempla le port altier de Justin. Sa chevelure de jais se confondait avec le ciel d'encre et ses yeux... brillaient dans l'obscurité, tels des glaciers. Il lui revint en mémoire la fois où elle l'avait aperçut dans les jardins de l'Elysée, et la même sensation lui prit aux tripes. Un sentiment puissant, viscéral. Elle ne pouvait s'empêcher de l'admirer, là, dans la nuit. Ce grand loup noir. Elle aurait aimé garder cette image pour toujours. Ce Justin serein, apaisé, mystérieux à la fois.

« Moi aussi », dit-elle du bout des lèvres.

Il lui sourit avant de boire une longue gorgée de vin. Il fit deux pas vers la rambarde et y déposa sa large paume avant de se gratter la gorge.

« Te voir avec mes enfants aujourd'hui... m'a fait réaliser une chose », commença-t-il d'une voix particulièrement éraillée.

Gaïa resta silencieuse et observa ce grand dos curieusement, le coeur battant. Justin tourna légèrement la tête vers l'autre côté du lac et laissa écouler quelques secondes. Puis, il se retourna à moitié, la tête baissée.

« Tu es celle avec qui je veux vivre le reste de ma vie ».

Sa voix, si rude tout à coup, émut la jeune femme qui accepta la vague de chaleur qui l'embrassa soudainement. Ses yeux bleus glissèrent alors vers elle, presque timidement.

« Je t'aime et si tu veux bien de moi, je vais divorcer »

Gaïa réprima un frisson glaçant. Comment? Il pensait maintenant au divorce avant la fin de son mandat? Décontenancée, elle le dévisagea, muette. Son regard, franc et attentif attendait une réponse.

« Tu... tu as changé d'avis? », bredouilla-t-elle, flattée mais profondément surprise par ce revirement de situation.

Justin se retourna totalement vers elle et passa une main sur son avant-bras.

« Que veux-tu! Je ne m'attendais pas à tomber sur une femme comme toi »

Gaïa le rejoignit contre la rambarde, fébrile.

L'Etat et toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant