Une semaine plus tard Gaïa avait reprit sa routine à l'édifice Langevin sur la colline du Parlement. Le week-end avait filé comme une comète, lumineux, magnifique, figé dans le temps. Mais éphémère.
Pendant trois jours ils avaient réussi à échapper à l'enfer médiatique autour du divorce du Premier ministre. Trois jours de calme plat avant la tempête. Et, pour ne rien arranger, le parti Libéral de Justin envisageait de déclencher les élections deux ans plus tôt que la date prévue. Selon eux, la majorité au parlement restait trop fragile et ils se devaient de renouveler la confiance de la chambre pour continuer de plus belle leurs réformes.
Dès leur retour, Justin fut pris dans un tourbillon de nouvelles obligations. Le travail l'engloutit sans crier gare, et ses rencontres se multipliaient. Il était en campagne. Gaïa ne vit même pas l'ombre de sa grande silhouette de la semaine, et dû passer le week-end seule. Elle rendit visite à Bénédicte et son copain pour s'occuper, fit le tour des musées.
Sa prochaine occasion fut à l'occasion d'une annonce à Montréal. Le gouvernement fédéral débloquait six milliards de dollars pour des places de garderie pour enfant au Québec. Gaïa était en charge d'écrire le discours, mais tellement le PM était chargé qu'elle ne put lui communiquer que dans l'avion le matin-même. En montant dans l'engin il la vit et son visage, tiré par la fatigué, s'illumina. Très vite il lui demanda de le rejoindre et ils firent les vérifications du discours à deux mains. Alors qu'il lisait le feuillet, la main de Justin se posa secrètement sur la cuisse de Gaïa.
Le coeur de la jeune femme fit un looping dans sa poitrine lorsqu'elle se rendit compte qu'il ne portait plus son alliance. Voir sa main ainsi nue lui parut si étrange... mais la fit sourire malgré elle. C'était la preuve concrète de sa nouvelle vie. Gaïa espérait que ce divorce ne pèserait pas dans sa volonté de réélection. Après tout, les Canadiens n'étaient plus aussi croyants que les décennies passées, un divorce ne serait pas un problème.
A l'arrivée une flotte de voiture blindées les accueilli et elle les amena dans un parc du quartier Hochelaga Maisonneuve. Des dizaines d'enfants de classes différentes avaient été convié à participer à la rencontre. Le Premier ministre du Québec François Legault les attendait et ils rejoignirent le point presse en discutant entre équipes.
Justin remonta sa chemise sur ses avant-bras et se positionna derrière le pupitre installé à son effet. Il y arrangea les feuillets et posa les mains de chaque côté avant de commencer à parler. Gaïa se planta entre les journalistes et leur caméra, les bras croisés. Pile en face de lui. Elle l'écouta déclamer son discours en se mordant les lèvres. A quelques mètres devant elle, le Premier ministre revêtait son rôle parfaitement. Un regard pour chacun, des sourires, un ton dynamique, une accentuation parfaite. Ses yeux azurs revenaient inlassablement vers elle, étudiaient ses lèvres, et repartaient dans l'autre sens pour finir par revenir. Il buta sur un mot, plongea dans ses feuilles et le coin de ses lèvres s'étira. Il s'empêcha de la regarder par la suite.
Ils annoncèrent les décisions, et se félicitèrent du bon déroulement des discussions. Puis, vint les questions de la presse.
« Monsieur Trudeau, pourquoi avancer les élections fédérales à cet fin d'été? Est-ce une bonne idée alors que nous sommes encore dans le débat sur les armes à feu? »
« Monsieur le Premier ministre, redoutez vous de perdre le Parlement? »
Justin se prenait au jeu, chaleureux, disponible et patient.
« Monsieur Trudeau, pensez-vous perdre des voix suite à votre divorce avec Sophie Grégoire? »
Gaïa se figea. Le visage cordial de Justin se fana et son front devint plus dur.

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L'Etat et toi
FanfictionGaia Laforêt quitte la France, son travail et son copain de longue date pour commencer une nouvelle vie au Canada. C'est sa réponse à l'appel de l'aventure, et, malgré ses doutes, elle risque bien d'en mener une qui changera profondément sa vie. "...