Sans Elle - T.1 : Alexis

Chapitre un

"Le succès est donné aux forts, et l'insuccès aux faibles."

- Oscar Wilde

La nuit enveloppe la ville de son manteau noir, les rues sont encore désertes et une douce brise fait voleter les feuilles survivantes à l'arrivée de l'automne.

Cinq heures pile. Le réveil d'Alexis - premières paroles de It's Raining Men - résonne dans sa chambre. Matinale, la jeune femme tend le bras, l'éteint et se redresse en s'étirant.

Elle quitte son nid douillet pour rejoindre la cuisine attenante. Tout en se brossant les dents, Alexis lance sa vieille cafetière. Elle crache le dentifrice dans l'évier, le fait disparaître avec un peu d'eau et passe ses mains sous le jet pour s'asperger le visage.

Pendant que sa boisson coule, elle troque son pyjama pour un legging et une brassière de sport. Alexis sautille en enfilant une première basket, tentant en même temps d'aller chercher son portable dans sa chambre.

Cette mission accomplie, la voilà maintenant en quête de sa seconde chaussure et de sa paire d'écouteurs.

- Où vous êtes passés encore ? souffle-t-elle en se penchant pour regarder sous le canapé.

La cafetière émet un drôle de bruit et Alexis se cogne la tête en se redressant. Bougonnant nombre d'insultes envers la machine, elle avale rapidement son café encore chaud.

Ses écouteurs enfin vissés dans les oreilles, elle enfile un sweat-shirt bleu ciel, enroule son écharpe autour de son cou et attrape portable et clés.

Chaque matin depuis qu'elle est adolescente, Alexis sort courir une heure. Peu de gens la comprennent, et ses soeurs n'en font pas partie, elle se rappelle très bien des remarques agacées de sa jumelle qui pestait après elle parce qu'elle se réveillait toujours au moindre bruit et l'entendait partir, aux alentours de six heures.

Avec le temps, Alexis a dû avancer son départ d'une heure pour avoir le temps de courir, son travail dans la librairie Fournier&Lambert débutant tôt.

Le bruit de ses semelles frappant le bitume à chacune de ses foulées la détend - et en ce moment, elle en a bien besoin -, elle aime sentir son coeur accélérer sous les montées d'adrénaline et sa respiration s'emballer sous l'effort.

Depuis aussi longtemps qu'elle s'en souvienne, le sport a toujours fait partie de sa vie. Elle a commencé avec de l'athlétisme quand elle était gamine, puis du foot au collège et enfin, sa grande révélation au lycée : la boxe.

Elle n'imagine même pas sa vie sans ce sport qui lui est cher. Elle s'entraîne dur comme fer pour s'améliorer, elle grimpe les échelons, gagne des combats, en perd, tombe, se relève, elle est grisée par le risque, les coups qu'il faut parer, ceux qu'il faut donner.

La sensation que l'on appuie sur ses muscles pour la faire plier la pousse à accélérer dans la dernière montée. Essoufflée, elle se penche en avant et glisse ses mains sur ses cuisses, son coeur bat jusque dans ses tempes. Ravie de cette sensation, la jeune femme entre dans le petit bar en face de son immeuble et salue l'employée derrière le comptoir.

- Un café, je suppose ? sourit-elle en secouant joyeusement la tête de gauche à droite.

- Tu supposes bien, confirme Alexis en s'installant à une table.

Elle adore ce bar, encore plus quand il est vide comme maintenant.

Il est exactement six heures cinquante lorsqu'Alexis franchit de nouveau le palier de son appartement. Avec les dix minutes qu'il lui reste, elle prend une douche et enfile de nouveaux vêtements de sport.