Proie&Prédateur - La Biche et la Panthère

Chapitre 27.

Traquer une proie faisait monter en lui un frisson indescriptible. Tarik songea une seconde à Nahila. Il l'avait laissée aux camps, endormis, douce et chaude après lui avoir fait lentement l'amour. Il avait senti une tension entre eux, et savait que sa petite biche avait deviné que quelque chose n'allait pas. Mais elle ne lui avait rien demandé, respectant son silence.

Tarik ignorait comment expliquer à Nahila qu'il s'apprêtait à tuer un homme, escorté des deux femmes les plus dangereuses que cette terre n'ait jamais portées. Alors plutôt que d'y pensée, il chassa sa biche de son esprit et se concentra corps et âme sur ce qu'il faisait bien : traquer et tuer.

Sa proie ne fut pas bien difficile à trouver. Il sortait en titubant d'une maison close, une profonde odeur de sexe, d'alcool, de sueur et de douleur collée à la peau.

C'était presque trop facile. Kyara le contourna en usant de sa technique de transparence, qui la rendait presque invisible dans les ombres de la nuit. Il avait entendu dire que sa sœur avait magnifié ce talent au point que même dans une pièce éclairée il était impossible de l'apercevoir tant qu'elle ne s'était pas manifestée. Ce talent ce jour la lui serait bien utile pour rabattre leur proie, qui sembla soudain réalisé que Tarik le suivait.

Panique, songea-t-il avec sadisme.

Il voulait qu'il ait peur, qu'il sache qu'il allait mourir avant de lui porter le coup final... oui, la prison de Lord Arthus l'avait définitivement rendu mauvais. Sa proie accéléra le pas et soudain, Kyara apparut face à lui. Dans sa panique, il ne réalisa même pas que c'était une femelle, chose qui aurait pu le faire hésiter et il tourna dans l'impasse que le trio avait soigneusement choisie.

Côte à côte, Kana, Tarik et Kyara l'y bloquèrent.

— Robert Guardia, déclama Tarik. Je te condamne pour viol répété, violence sur les femmes, trafique de changelin, et meurtre, à la peine changeline capitale.

Robert, les yeux écarquillés les dévisagèrent tour à tour.

— Vous n'avez pas le droit... j'ai le droit à un procès équitable devant le conseil changelin !

Tarik marqua une pause, sa panthère se délectait de la peur de Robert.

— Pas de justice pour toi, Robert, seulement la mort, afin que ton âme damnée pourrisse dans les feux et la colère d'Athos.

Robert blêmit. Athos, le dieu soleil, le vengeur, le mangeur de péché. Personne ne disait jamais son nom de peur qu'il décide de nous emporter sur le champ. Mais Tarik avait cessé de craindre les dieux depuis bien longtemps.

Il s'avança. Il n'y eut même pas de combat. Face à une femme, Robert savait dominer et violenter, mais face à un tueur sanguinaire, il n'avait aucune chance. Ce fut presque trop rapide, et en quelques coups violent et bien placé, et agenouilla Robert en se plaçant dans son dos.

— Je t'ai promis dix hommes, Kana. Voici le premier.

Kana s'avança, son regard luisant d'une colère terrible, proche de la folie. Kyara observa une dernière fois l'homme qu'elle avait aidé à capturer. Puis lentement, elle tourna les talons et sorties de la ruelle pour s'assurer que personne ne les dérange.

Tarik s'en voulait un peu de lui avoir demandé ça, mais elle était la seule en qui il avait confiance. Il n'aurait pas pu demander à l'un des mâles de sa meute, car ils auraient tous voulu venir, et Lilith était toujours plâtrée.

Kana s'agenouilla face à sa victime et sortie un couteau de sa ceinture. La manière dont la vipère tuerait cet homme ne le regardait pas. C'était un cadeau qu'il lui faisait.

— La mort que je vais t'offrir est trop douce pour l'ordure que tu es. Une dernière parole ?

Comme s'il retrouvait ses couilles dans ses derniers instants de vie, Robert cracha.

— Il n'y a pas de bon, ou de mauvais en ce monde, seulement ceux qui mangent et ceux qui se font manger ! Moi je mange, que ça vous plaise ou non ! Tuez-moi si vous le voulez ! La nature hait le vide, un autre me remplacera !

Elle lui enfonça son couteau dans le ventre au moment où Tarik lui appuya une main sur la bouche pour le faire taire et l'empêcher de crier. Et ce fut pire quand Kana, sadique, le tourna lentement dans ses entrailles avant de remonter jusqu'à sa poitrine, l'éventrant. Il était mort, ou évanouie, avant qu'elle n'arrive à son but.

Kana se redressa avant de croiser son regard.

— J'ai pris plaisir à le tuer, avoua-t-elle avec une pointe de culpabilité. Est-ce que ça fait de moi un monstre ?

— C'était une justice changelins, déclara-t-il simplement.

Kana était un monstre, mais lui aussi. Il se réjouissait de la mort de cette ordure, mais il ne pouvait pas mentir à son amie, lui dire que tout était normal chez elle. Même si elle le détestait, il continuerait à être aussi honnête que possible.

— Bien... allons faire passer notre message, déclara-t-il en traînant le corps jusque dans la rue principale.

— C'était le premier, déclara Kana lorsqu'il déposa le cadavre.

— Mais pas le dernier, et ils comprendront le message, crois-moi.

Et en lettre de sang, ils marquèrent de chaque côté de corps éventré, les deux crimes les plus importants : Assassin pour toutes les vies qu'il avait envoyé dans le Zoo de Lord Arthus et Violeur pour toutes les femmes qui n'en étaient jamais ressorties.

Puis, ni vu ni connu, ils rentrèrent au campement, et Tarik laissa Kyara rejoindre le mâle de valeur qu'elle s'était choisie. Il n'arrivait pas à croire que sa petite sœur têtue se soit trouvé un mâle prêt à la supporter et pourtant...

Rentrant dans le campement endormi, Tarik se glissa dans sa tente. Nahila était là, lovée entre les couvertures de fourrure, prêtée par Ilgog. Dans le filet de lumière lunaire qui passait par l'entrée, il l'admira. Si pur et si douce, ses cheveux noirs étalés sur des vêtements rouler en boule en guise d'oreiller. Il s'avança pour mieux la voir. Ses lèvres roses légèrement entrouvertes elle ronflait doucement et un de ses seins était visible là où la couverture avait glissé.

Soudain, son ombre se porta sur ce corps si joli et Tarik se figea... et fit un pas en arrière.

Il avait tué un homme ce soir, et qu'importe qu'il ne soit pas celui qui ait porté le coup fatal, il en était l'instigateur. Nahila dormait là, paisible, à sa portée, alors qu'il avait du sang sur les mains... énormément de sang, même s'il se les était lavées avant de venir la rejoindre.

Il était un assassin, un monstre... de quel droit posait-il ses mains sur la peau innocente de Nahila ?

Il fallait qu'il s'éloigne avant qu'il ne soit trop tard... avant qu'il la tache de sang, elle aussi, avant qu'il ne déverse sur elle toute sa malfaisance... ou qu'il la tue par inadvertance.