L'été était bien avancé et les chaleurs torrides incitaient les cervidés de la Coalition des Changelins non prédateurs à passer plus de temps sous leur forme animale.
Nahila n'en était toujours pas capable, et a vrai dire, le silence dans sa tête lui était désormais familier. Assise sur un rocher au bord de la rivière, elle trempait tranquillement ses pieds dans l'eau en regardant les jeunes cerfs s'ébattre joyeusement.
Ça faisait des mois qu'elle n'avait pas entendu parler de Tarik, et à vrai dire, elle évitait soigneusement le sujet et ne cherchait aucune information. C'était plus simple ainsi, et pourtant, elle continuait de penser à sa panthère noire. Il lui manquait. Au début, elle avait pensé qu'elle finirait par vite l'oublier, comme un mirage ou une partie de sa vie trop fugace pour s'en souvenir. Son frère en avait été persuadé, même. Il avait toujours été d'avis que l'amour qu'elle lui portait était dû à une variante tordue du syndrome de Stockholm. Elle l'avait pensé aussi. Mais ça aurait dû s'atténuer avec le temps, non ?
Son cœur lui faisait toujours mal quand elle pensait à lui, elle aurait voulu savoir si lui aussi pensait à elle. Où s'il avait trouvé quelqu'un d'autre pour le réconforter.
Nahila n'était pas en manque de prétendant, de son côté. La plupart des cerfs de son clan et même des villages alentour, venaient régulièrement lui faire la cour, encouragée par son frère. Elle n'irait pas dire que c'était désagréable, mais toute leur manière sérieuse et courtoise manquait de... sauvagerie, à son goût. Elle savait bien qu'elle ne pourrait attendre Tarik éternellement, mais à chaque fois qu'elle se sentait prête à tourner la page, à vivre une relation avec l'un de ses prétendants qui lui plaisaient plus qu'un autre, elle se souvenait de la bouche du mal contre la sienne et de la fureur qui émanait de son corps. Et les cerfs lui paraissaient soudain plats et insipides.
Elle se demandait si elle avait fait cet effet-là aussi à Tarik.
Comme à chaque fois qu'elle pensait à lui, Nahila se sentait d'humeur mélancolique, alors plutôt que de gâcher l'air estival des résidents de son village, elle quitta le bord de la rivière pour se promener vers une prairie. Elle se souvenait qu'à l'époque – lui paraissait si lointain désormais – où elle pouvait encore se transformer, c'était un de ses endroits préférés, elle broutait tranquillement et parfois s'endormait au soleil.
Soupira, elle leva le visage vers les cieux.
Une calme constatation lui fit bondir le cœur et elle n'eut pas besoin d'ouvrir les yeux pour en connaître la raison. Elle le fit tout de même, au bout d'une minute.
Tarik se tenait là, devant elle.
Son palpitant accéléra brusquement et elle prit une inspiration. Il est magnifique. Il portait une chemise et un pantalon, et était propre et fraîchement rasé, ses cheveux avaient été raccourcis par une main experte et elle osa espérer que tout ça était pour elle.
— Tu es revenu, chuchota-t-elle finalement.
Il sourit.
— Ça m'aura pris du temps, mais oui.
Ils se dévorèrent du regard, sans se toucher, sans s'approcher. Mais ce n'était pas l'envie qui en manquait.
— Je suis passé voir tes parents, dit-il au bout d'un moment.
Nahila redressa la tête, curieuse.
— Vraiment ?
— Ton frère m'a ordonné de ne pas m'approcher de toi, ton père à menacer de me tuer et ta mère ma souri doucement. Elle est absolument terrifiante, au passage.
Nahila ne put s'empêcher de rire. Elle n'était pas étonnée que les menaces soient passées sur Tarik sans l'effrayer, mais que le comportement de sa mère l'ait inquiété. Dalia Daero n'était pas le genre de femme que l'ont prenait à la légère.
— Mais tu es quand même là.
— Je suis là, confirma-t-il. Je suis venu te demander quelque chose.
Nahila eut l'impression d'avoir un oiseau dans la poitrine, mais elle se força à rester calme. Ce n'était peut-être pas ce qu'elle espérait, et la déception serait terrible. Il s'approcha, doucement, comme s'il craignait de l'effrayer, mais pour rien au monde Nahila ne se serait éloignée.
— Princesse Nahila Daero, commença-t-il et elle ne put s'empêcher de sourire face à son titre. Accepterez-vous de vous unir à un pauvre prédateur tel que moi ?
Tarik la connaissait bien, et heureusement, car ses jambes la lâchèrent et il la rattrapa de justesse. S'accrochant à son cou, elle laissa échapper un soupir de soulagement.
— J'ai cru que tu ne me le demanderais jamais, marmonna-t-elle en sentant les larmes lui monter aux yeux.
— Ça veut dire oui ?
Prenant une profonde inspiration, la biche colla son front contre celui de la panthère.
— Et tu en paix avec toi-même ?
— Ça a été dur, je te raconterais, si tu y tiens, mais oui, j'ai fini par y arriver.
***
Quand Tarik avait vu Nahila, le visage lever vers le soleil, il avait su qu'il prenait la bonne décision.
Ça n'avait pas été facile, les derniers mois avaient été éprouvants, pour ne pas dire horrible. Il était allé voir un psychologue, conscient qu'il aurait besoin d'aide, et oui, il avait dû pleurer comme un bébé pour réussir accepté qu'on lui avait fait du mal, beaucoup de mal. Ça avait été un processus long et laborieux, mais il avait réussi, car pas une seconde le but de l'opération lui avait échappé. Il voulait devenir un homme meilleur, un homme digne de serrer cette femelle à la peau caramel dans ses bras.
Nahila était sublime. Elle s'était remplumée, et sa robe d'été épousait ses courbes gracieuses et tentantes. Il avait sincèrement eu peur qu'elle tombe amoureuse d'un autre, qui valait mieux que lui. Mais la réaction de sa famille l'avait convaincu que ce n'était pas le cas. Si elle avait été en couple, avec un homme de valeur, il ne serait jamais venu la retrouver. Nahila méritait d'être heureuse et bien qu'il préférât que ce soit avec lui, il n'était pas assez cruel pour lui briser le cœur en revenant dans sa vie si elle l'avait reconstruit.
Mais ce n'était pas le cas et il la tenait dans ses bras, désormais, son entêtant parfum de biche et de proie lui donnait envie de lécher et de mordre. Il venait de la demander en union, et elle n'avait pas encore répondu.
Elle glissa une main sur sa joue avec douceur et affection et croisa son regard. Le sien brillait d'amour et il se demanda ce qu'elle voyait quand elle regardait ses yeux de panthère.
— Tu es prêt à m'offrir un avenir ?
— Oui.
Pas d'hésitation, c'était ce qu'il voulait depuis qu'il avait réalisé qu'il était amoureux d'elle.
— Je ne te promets pas de ne plus me comporter comme un imbécile, mais tu as l'autorisation de me tirer les oreilles si ça arrive.
Nahila gloussa.
— Alors c'est d'accord.
Elle l'embrassa.
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On en parle dix seconde du fait que j'ai fini de publier Fusion Charnelle en même temps que La Biche et la Panthère ?
Du coup il reste l'épilogue, comme il est important pour la fin de l'histoire, j'hésite entre attendre dimanche pour vous faire profiter encore un peu de l'histoire ou bazarder ça lundi ou mardi ? XD
Sachant que suite à l'épilogue je publierais les remerciement et le vote pour le prochain tome.
Bon je sais pas trop, je pense que comme d'hab je vais y aller au feeling !
J'espère que ce chapitre vous à plus et je vous dit à très vite pour l'épilogue !
Kiss
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Proie&Prédateur - La Biche et la Panthère
ChickLitNahila n'aurait jamais dû se retrouver dans la prison pour changelin de Lord Arthus, et pourtant, elle y est. Et pas dans n'importe quelle cellule, apparemment peu soucieux de son bien-être, ses geôliers l'ont balancé dans la cage d'une très dangere...