Du 13 au 16 août 2020 se déroule au Japon l'un festival des plus importants. Existant depuis plus de 500 ans, O-Bon ou « la fête des fantômes » permet aux vivants d'honorer les esprits des ancêtres.
Dans l'Histoire...
Les racines de cette fête proviennent de Chine. Durant la dynastie des Han (de 206 av. J.-C. à 220 apr. J.-C.), le milieu du septième mois était marqué par une simple cérémonie, symbolisant une étape de l'année agricole, qui était une offrande de récoltes aux ancêtres.
Cette fête bouddhiste évoluant au fil des siècles, se fait appeler plus tard « fête des fantômes » (鬼節). S'ensuit son importation au Japon, où elle perdure depuis 500 ans bien qu'elle ait connu des changements de traditions et d'origine
En effet, après avoir été reprise par le Japon, cette fête prit l'appellation d'O-Bon et acquiert une nouvelle légende. O-Bon vient du mot « Urabonne/Urabanna » (于蘭盆会/盂蘭盆会) lui-même dérivé du nom d'un sûtra, Ullambana. Ce dernier mot signifiant « pendu à l'envers en enfer ».
De ce nom, donné par les japonais, découle bien sûr la légende : Mokuden, disciple de Bouddha, eu une vision de sa défunte mère. Cette dernière payait grandement son égoïsme au Royaume des esprits affamés. Alors Mokuden consulta Bouddha sur comment sauver sa mère, ce à quoi il lui répondit : « Au quinzième jour de juillet, fais donner une grande fête en l'honneur des sept dernières générations des morts. ». Il fit donc cette fête, ce qui sauva sa mère.
O-Bon est donc la période où l'on se remémore, où l'on remercie et où l'on honore les ancêtres et leurs sacrifices. Cela permet d'amoindrir la peine des défunts. Cette fête a donc lieu durant le mois des fantômes, car c'est le seul moment où les morts peuvent revenir sur Terre.
Durant O-Bon, l'on accueille alors les ancêtres mais aussi Sai no kami, le dieu des chemins...
Sai no Kami
Les Dōsojin (道祖神) sont des Kamis (神) du shintoïsme, divinités et esprits vénérés. Leur action principale est de protéger les voyageurs et les villages des épidémies et mauvais esprits. C'est pour cette raison qu'ils sont nommés « Kami de la route », le dieu des chemins.
Leur représentation varie mais généralement, ces divinités sont apparentées à un couple humain par la représentation des organes génitaux, sculptés dans de grosses pierres, des statues ou des poteaux le long des routes.
Les dōsojin ont, au fil du temps, été raccroché à une certaine divinité aux caractéristiques similaires, Sae no Kami, ou Sai no Kami (障の神・塞の神).
D'après la mythologie, le kami Izanagi, co-créateur du monde et du Japon, cherchait à revenir du royaume des morts (Yomi 黄泉) pour revoir son épouse, Izanami. Il fut poursuivi par la démone Yomotsushikome, qui, pour l'arrêter, jeta un bâton duquel naquît Sae no kami.
C'est pour cela que Sae no Kami empêche la traversée des âmes des morts dans le monde vivant et qu'il est donc un dieu protecteur des frontières, un dieu des chemins. Sa représentation est elle aussi très similaire aux dōsojin, étant de gros rochers sur les bords des villages.
Lors de O-Bon, Sai no Kami vient donc pour protéger le monde des vivants des esprits des morts.
Les rituels du festival
Le rituel primordial est l'offrande de nourriture, symbolique du partage.
S'ensuit ensuite un des rituels le plus important, permettant de guider les âmes des morts pendant la journée. Il s'agit des lanternes, qui sont allumées devant chaque maison. Dans certaines préfectures, comme Hiroshima, les lanternes sont allumées sur les tombes des ancêtres et sont de couleurs. En revanche, les lanternes blanches sont pour les êtres partis entre la fin de l'O-bon précédent et le début de l'actuel. Durant la nuit du 6 août, des lanternes sont aussi allumées pour apaiser les esprits des victimes du bombardement atomique d'Hiroshima et Nagasaki.
Le design de la lanterne, lui, peut être très raffiné comme très simple. Cela n'a pas de signification, c'est un geste pour marquer l'occasion.
Un rituel plus particulier est le Hatsu bon, nom attribué au O-Bon arrivant après la mort d'un proche. Cet O-Bon particulier aura alors plusieurs rituels supplémentaires, pour le défunt décédés il y a moins d'un an.
De ces lanternes découle un autre rituel, Törö nagashi (灯籠流し). Töro désigne « lanterne » et nagashi « croisière, flux ». Cette cérémonie traditionnelle a lieu habituellement lors de la dernière soirée du festival. De petites lanternes de papier carrées, éclairées d'une bougie à l'intérieur, sont déposées sur l'eau durant l'après-midi. Elles permettent de guider les esprits des disparus en direction de l'autre monde.
Enfin, le dernier rituel tout aussi important est Bon odori (盆踊り), signifiant « danse du bon ». Effectivement, ce rituel est une danse traditionnelle de l'époque Muromachi (1336 – 1573). Lors d'O-Bon, cette danse permet de se remémorer la reconnaissance envers les ancêtres. Elle se pratique en cercle, mais les pas varient d'une région à l'autre. Les lieux de danse les plus communs sont les lieux publics, à savoir les places, les temples, proche d'une rivière ou de la mer. De plus, le plus grand festival de danse du Japon a lieu durant O-Bon.
Aujourd'hui
Cette fête populaire et très importante est toujours autant célébrée, bien que de moins en moins de personnes retournent, comme la tradition le veut, dans leur ville natale, rejoindre leur famille, rendre visite et s'occuper des tombes familiales. Mais elle est devenue et continue d'être une fête de famille et ces quelques jours restent pour les gens une période de vacances à prendre.
Cette fête religieuse, au dur sujet prend alors une tout autre forme, devenant joyeuse, de par la retrouvaille entre proches, les festivités et les rituels consacrés aux ancêtres.
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