Généralement jugé comme malsain et déviant, l'ero guro est un mouvement artistique apparu au début du siècle dernier au Japon, connu pour allier l'érotisme au macabre et à l'absurde.
Souvent considéré comme underground voire malsain et réservé à un public de marginaux, l'ero guro (エログロ) est un mouvement littéraire et artistique apparu au début du 20e siècle au Japon, qui combine avec adresse l'érotisme, le macabre et le grotesque. L'écrivain Edogawa Ranpo (1894 - 1965), qui emprunte son nom de plume au fameux Edgar Allan Poe, est souvent désigné comme étant à l'origine de cet art tortueux, avec des récits comme celui de La Bête aveugle, La Chenille, L'Île Panorama ou encore La Chaise humaine, autant d'œuvres adaptées en manga dans les années 1970 par l'un des plus fiers représentants du genre, Suehiro Maruo.
Certains remontent un peu plus loin et voient en Hokusai (1760 - 1849) l'un des précurseurs de l'ero guro, avec des shunga très inspirés comme le célèbre « Rêve de la femme du pêcheur », une estampe sur laquelle on peut observer une pieuvre géante s'exerçant au cunnilingus sur une femme nue. Et on aurait probablement tort de réfuter cette analogie, car l'acte sexuel pratiqué avec des espèces animales (souvent des insectes aux proportions démesurées) est un thème récurrent dans les œuvres qui revendiquent l'ero guro.
Si l'on cherche une origine dans les estampes traditionnelles, on peut alors aisément citer le travail de Yoshitoshi (1839 - 1892), et notamment la série des « Vingt-huit meurtres célèbres » (1866 - 1869), qui comporte quelques toiles très évocatrices faisant partie d'un sous-genre de l'ukiyo-e appelé "muzan-e". Parmi l'album, on compte la fameuse peinture représentant le meurtre commis par Inada Kyuuzou Shinsuke. Difficile de savoir qui a été Shinsuke dans l'histoire au juste, mais les quelques vers présents sur la toile semblent expliquer que celui-ci se venge d'une femme ayant porté atteinte à l'honneur de son maître.
Si le travail de Yoshitoshi n'a pas forcément été reconnu de son vivant, il faudra attendre un siècle pour que des artistes de la nouvelle vague s'y intéressent. Sa série de meurtres célèbres a ainsi inspiré les auteurs Suehiro Maruo et Kazuichi Hanawa, qui ont à leur tour revisité quelques meurtres de l'histoire contemporaine.
D'autres y voient une dimension internationale, avec des influences venues notamment de France. Certains artistes ancrés dans le mouvement expliquent s'inspirer de l'œuvre de Georges Bataille (1897 - 1962), écrivain français dont les récits mêlent régulièrement l'érotisme au mystique et au morbide, ou encore du marquis de Sade (1740 - 1814), à qui l'on attribue également ce genre de récit.
Pourtant, c'est bel et bien au Japon que l'ero guro a pris forme et certaines affaires comme celle de Sada Abe ont largement contribué à constituer un terrain propice au développement du mouvement. Ancienne geisha et prostituée, Sada Abe a littéralement remuer le Japon des années 30 en assassinant son amant, Kichizo Ishida, par asphyxie érotique. Elle a ensuite coupé son pénis ainsi que ses testicules et les a gardés fièrement dans son sac à main jusqu'au moment de se faire arrêter par les autorités. Considéré comme l'un des meurtres les plus célèbre du Japon, l'affaire n'a pas manqué d'inspirer la littérature et le cinéma dans les années 1970, notamment avec L'Empire des sens de Nagisa Oshima 1976).
Thèmes et représentation
Contrairement à ce que la majorité pourrait penser, l'ero guro n'est pas de la pornographie ; on parle bien d'"érotisme" et la nuance entre les deux est à souligner et comprendre. À la fois perturbant et fascinant, l'ero guro est avant tout l'expression d'un sens de l'esthétique pointu qui repose sur des fondements autrement plus complexes et se joue de thèmes nettement plus variés. Ainsi, les éléments que l'on peut trouver de manière récurrente dans les œuvres d'ero guro sont évidement la nudité, le sang, l'acte sexuel, les monstres du folklore nippon, les animaux (plus particulièrement les insectes), les phobies (notamment la trypophobie)... Dans certains cas, pour lesquels on peut souvent faire le parallèle avec une forme d'humour noir, ces thèmes rejoignent des allusions aux déjections que peut produire un être humain : urine, matière fécale, vomi... Néanmoins, les thèmes chers au mouvement restent plus traditionnellement la mutilation sous toutes ses formes et coutures, les pratiques sexuelles "déviantes" telles que l'inceste ainsi que la mort, qui se décline ici sous une certaine beauté.
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De TodoL'actualité coréenne mais pas que, il y a également certains articles sur d'autres pays d'Asie