Cross My Heart - Livaï x OC/READER.

Chapitre 12 - Réflexions.

Est-ce que c'était normal de s'habituer autant à la mort ? À la perte d'un être cher ? Est-ce que c'était réellement à ça que j'étais condamnée ? À entrevoir une lueur d'espoir dans les ténèbres qui nous assaillent de tous côtés pour qu'elle disparaisse et s'éteigne aussi facilement que la mèche d'une bougie sur laquelle on aurait soufflé ? L'histoire de ma vie ne se résumerait donc qu'à ça ?

- On est presque arrivés, me disait-on.

Mais je m'en moquais. Le temps paraissait suspendu voir irréel. Je ne savais plus depuis combien de minutes j'étais sur le cheval de Livaï, ses bras entourant mon corps pour attraper les rênes et diriger son animal qui fendait l'air.

Tout ce que je voyais lorsque je fermais les yeux c'était la pluie de sang qui s'abattait sur moi, le demi corps de Charlotte laissant une nuée d'hémoglobine dans la neige blanche lorsque je le tirais vers moi.

Tout ce que j'entendais lorsqu'il n'y avait pas un bruit était le rire de Charlotte. Son soupir de soulagement en me voyant en vie. Ses paroles d'espoir en pensant à Mark.

- Dit Livaï... commençais-je la voix faible.
- Mmh...? me répondit-il, prudent.
- Où il s'en va, tout cet amour ?
- Quoi ?
- Quand les gens meurent, continuais-je, ce que l'on ressent, les sentiments que l'on éprouve, tout l'amour que l'on leur portait, où est-ce que cela s'en va ?

Livaï resta muet devant ma question et ne me répondit pas tout de suite. J'avais l'impression d'entendre son cerveau réfléchir à tout allure et même si je me trouvais devant lui je pouvais deviner facilement l'expression qu'il arboré sur son visage. Je pouvais m'imaginer nettement ses sourcils fins froncés, ses yeux aciers perdus dans le vide, sa bouche légèrement entrouverte.

- Relève la tête, m'ordonna-t-il.

Je ne comprenais pas pourquoi il me demandait cela mais je l'écouta. Nous sortions tout juste d'une immense forêt dont les arbres, nus de toutes leurs feuilles à cause de la saison, nous cachait tout de même le ciel. Ce dernier était dégagé et je remarqua avec étonnement que la nuit était déjà tombée sur notre monde. La tête en l'air, la brise sur mon visage, je pouvais distinguer nettement la lune pleine et lumineuse, ce soir-là, qui nous éclairait.

- J'aime à penser que tous ces sentiments se réfugient dans les étoiles, murmura Livaï. Et que c'est pour ça que lorsque l'on perd quelqu'un, elles brillent un peu plus.

Avec fascination, je continua de contempler les mille étoiles que je pouvais voir dans le ciel sombre.

- C'est ridicule, rétorquais-je, lorsque l'on perd quelqu'un les étoiles devraient justement moins briller.
- Pourquoi ?
- Parce que sans ces personnes, notre vie n'est plus si lumineuse.
- Justement, me contra le soldat, pourquoi est-ce que tu crois que les étoiles brillent un peu plus ? Parce que ceux qu'on aime et nos sentiments pour eux les rejoignent et rendent notre vie un peu plus terne mais notre ciel plus lumineux.

Sa réplique me coupa le souffle pendant un instant alors que seul les bruits des sabots de son cheval sur la terre sèche brisaient le silence.

- Alors, elles ont de la chance ces étoiles, non ?
- Elles ont de la chance, me confirma-t-il.

Durant le restant du trajet, Livaï et moi ne parlions plus. Je me sentais déshydratée, j'avais la gorge sèche et je me demandais pendant un instant si c'était pour cette raison que je n'avais pas pleuré.

Charlotte était sûrement mon amie la plus proche, la plus loyale, la première à me dire qu'elle me considérait vraiment. Étais-ce vraiment un hommage pour elle de n'avoir aucune larmes sur mon visage ?