Sous haute tension

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Je suis tétanisée. Mes yeux sont écarquillés et mes mains retombent lâchement le long de mon corps. Les mains de Raphaël quittent à leur tour mes joues et ses lèvres s'éloignent. J'ai le souffle court. Le sien l'est aussi. Qu'est-ce qui vient de se passer au juste ? Raphaël met plusieurs secondes à relever le visage et à me faire face. Quand enfin il trouve le courage d'affronter mon regard, il affiche une mine indéchiffrable. Ses yeux ne sont pas fuyants, ils sont profondément ancrés dans les miens, de sorte que pendant un instant, j'ai la curieuse impression qu'il met mon âme à nue. Je suis la première à rompre notre échange silencieux, trop perdue. Toujours sans un mot, Raphaël fait deux pas en arrière et quitte le couloir aussi vite qu'il m'a embrassée. Je reste là, coite et incapable de remettre mes pensées en ordre. Les questions fusent dans ma tête si bien qu'un début de migraine me guette. Je clos mes paupières et mon cerveau se met en pause. Je me laisse tomber contre le mur et régule mon rythme cardiaque. Je rouvre les yeux, et fixe le couloir que le brun a emprunté il y a quelques minutes. Je suis sidérée. Raphaël Drockfeler vient de m'embrasser.

***

Mes yeux examinent les plats remplis au centre de la table. Un coup de coude me sort de ma transe. Je fusille mon frère d'un regard que je veux féroce. Il lève les yeux au ciel, comme si ma comédie ne le touchait pas et annonce :

- C'est ton tour.

- Mon tour ?

- De dire pourquoi tu es reconnaissante, idiote.

- Noah, grogne mon père, au bout de la table.

- Euh, ouais. Bien sûr, réponds-je en m'agitant.

Je lève mon verre rempli et réfléchis un instant.

- Je suis reconnaissante pour ma famille, ma moto.

A quelques places de moi, de l'autre côté de la table, Raphaël me fixe en silence. Je l'imite. Nos regards sont ancrés l'un dans l'autre. Tout semble se figer autour de nous. Il n'y a que le californien et moi. Je suis reconnaissante pour les baisers fougueux et pleins de passion. Un pincement à la cuisse me fait revenir à moi et pour la seconde fois, j'assassine mon frère de mes iris. Ses traits affichent un air mi-dégoûté mi-agacé.

- Espèce de tarée, chuchote-t-il de sorte que je sois la seule à l'entendre.

Je lui envoie un coup de genou discret pour le réprimander et colle un sourire sur mon visage pour sauver les apparences. Mes iris quittent ceux du brun aussi vite que l'idée disparaît de mon esprit. Je n'imagine même pas la tête de mon père si je sortais un truc pareil. A côté de Raphaël, Bowers fait des allers-retours entre son pote et moi. Ses sourcils sont froncés, signe qu'il ne comprend pas ce qu'il se passe. Rien d'étonnant, Mike est souvent à la ramasse. Je souris lorsque la chute de ma phrase m'apparaît comme un néon clignotant au beau milieu d'une salle plongée dans l'obscurité. Sans me défaire de mon rictus, je plonge mon regard dans celui du blond et déclare :

- Et, pour toutes les filles qui ont su rembarrer Mike comme il se doit quand il tentait de les draguer.

- T'es malade ou quoi ? Tu veux que je sois célibataire à vie ?

Sa mine est abasourdie. Il ne prête plus aucune attention à l'échange visuel que j'ai eu avec Raph, exactement comme je l'avais pressenti. Un coup d'œil à la tablée m'informe qu'il est le seul à ne pas être amusé par mes paroles.

- J'ai compris. T'es jalouse, c'est ça ?

Je ricane devant son sourire carnassier. Il semble tellement persuadé par ce qu'il avance.

- Pas le moins du monde. Ne le prends pas mal surtout, mais t'es pas vraiment mon type.

- Tu préfères les bruns ?

AdrénalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant