La cité des Anges

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Lorsque je descends au salon, il est quatorze heures trente-deux et Raphaël n'est pas là. Je m'assois sur le canapé et enfile mes chaussures. J'ai abandonné mon sweat gris dans ma chambre et l'ai remplacé par un haut court rouge. Lunettes de soleil en place sur le crâne, j'attends impatiemment l'arrivée du fils de Lauren. Je râle et pose rageusement mon portable sur le cuir blanc du fauteuil après quelques minutes. Existe-t-il une chose plus exaspérante au monde que d'attendre ? Dans la cuisine, les aiguilles de l'horloge murale se déplacent en laissant entendre un petit bruit répétitif et insupportable. Je soupire et fais claquer un par un mes ongles sur l'accoudoir. Je retourne mon téléphone, allume l'écran et y regarde l'heure. Une fois, puis deux. Cela ne sert strictement à rien, j'en suis consciente, pourtant, je ne peux m'en empêcher. La patience ne fait décidément pas partie des qualités dont je suis dotée. Au bout de dix minutes, je sens mon sang commencer à bouillir dans mes veines. Je laisse mes affaires en bas et grimpe quatre à quatre les marches de l'escalier. Je ne m'embête pas à frapper et ouvre la porte de la chambre dans un grand fracas. Raphaël se retourne, il ne semble pas surpris, seulement amusé. Il se contente de me fixer, son foutu sourire en coin scotché au visage. Et à cet instant, l'encastrer dans le mur m'apparaît comme la meilleure des idées !

- A quoi ça sert de me demander d'être ponctuelle si t'es incapable de respecter tes propres délais ? craché-je avec véhémence.

La colère monte en moi par vagues et j'ai une furieuse envie de lui faire ravaler le sourire à la con dont il ne se défait pas.

- Oh, je t'ai dit quatorze heures trente ? C'est quinze heures en fin de compte. J'ai oublié de te prévenir. Oups, rajoute-t-il sans jamais me quitter des yeux, la mine faussement contrite.

J'assimile ses paroles et me retiens de ne pas lui en coller une pour s'être foutu de moi. Je le fixe méchamment avant de faire demi-tour pour rejoindre ma chambre.

- Connard !

- Connasse !

Les portes de nos chambres se referment en même temps, dans un grand claquement qui fait trembler les murs du couloir. Heureusement que mon père et Lauren sont sur la terrasse sinon je sens qu'on aurait eu le droit à un remontage de bretelles dont seuls les parents en bonne et due forme. Je finis par redescendre au salon pour récupérer mon portable laissé sur le canapé et m'empresse d'envoyer un message à Lydia pour lui demander qui l'emmène au centre-ville. Avec un peu de chance, les jumeaux Blent passeront la prendre et je pourrais encore une fois profiter de leur gentillesse et de leur voiture. La réponse de mon amie ne tarde pas à arriver.

De Lydia : Raph. Problème ?

Je ne sais pas à quoi je m'attendais exactement, je n'ai jamais été une de ces filles à qui tout souriait. La chance a toujours été une sacrée garce avec moi. Je lui réponds rapidement.

A Lydia : Oui : Raphaël Drockfeler.

Je glisse mon téléphone à l'arrière de mon short et sors sur la terrasse. Mon père et ma belle-mère y sont installés, deux tasses de café fumantes devant eux. Lauren interrompt leur conversation quand elle me voit arriver.

- Vous n'êtes toujours pas partis ?

Son sourire est éclatant, comme toujours. Ses cheveux blonds sont tenus par une pince.

- Ton fils s'essaie à l'humour. C'était quinze heures en réalité.

- Mon fils est un petit con, affirme-t-elle très sérieusement, l'air désespérée par le comportement de son aîné.

Et je ne peux qu'acquiescer. Je glisse mes lunettes de soleil sur mon nez et dépasse la terrasse ombragée pour aller à la rencontre des garçons. Je les retrouve sur les transats du jardin, à discuter. Ils attendent sûrement que la température baisse un peu pour pouvoir faire une partie de soccer, une nouvelle habitude que mon frère a adopté depuis qu'il est arrivé ici. Je m'approche un peu plus d'eux et découvre Diego entre son frère et le mien. Il est allongé sur l'herbe, les bras et les jambes en étoile de mer. Il ferme les yeux.

AdrénalineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant