Chapitre 24

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        Au bout de seulement une dizaine de minutes, Pierre arrête la voiture en plein milieu de nul part. J'ai beau regarder autour de moi, je ne vois aucune maison ou abri. J'ai réellement l'impression qu'il nous a emmené dans le lieu le plus reculé de France. 

        Je n'ai pas peur de lui, mais me retrouver seule, vraiment seule, avec lui m'affole un petit peu. Je le revois au-dessus de Théo, le poing levé, prêt à l'abattre sur mon ami. 

        Pierre sort de la voiture et claque violemment sa portière. Je sursaute dans mon siège. Je regarde par la vitre conducteur et le vois tourner en rond en marmonnant. Je détache ma ceinture et sort à mon tour de la voiture. Je reste de mon côté du véhicule en attendant un signe de sa part. 

        Son manège dure plusieurs minutes, finalement, il s'arrête et se tourne vers moi, les yeux noirs de colère. 

- C'était quoi tout à l'heure ? C'était pour me faire du mal ? 

        J'avale difficilement ma salive avant de lui répondre d'une toute petite voix. 

- Non, je ne sais pas comment on en est arrivé là. 

- Te moques pas de moi Charlotte ? Hier tu me fais une scène parce que je discute sagement avec Isabelle, et bizarrement, ce matin lorsque je viens te voir pour en discuter à tête reposée avec toi, je retrouve ton ex vautré sur toi prêt à te sauter. Ne va pas me dire que ce n'était pas par vengeance ou une connerie de ce genre. 

        Je me passe une main nerveuse dans les cheveux et me rends compte seulement maintenant que je n'ai pas pris le temps de me changer avant de partir. Je porte toujours mon jogging et mon big tee-shirt, et mes cheveux coulent le long de mon dos. 

        Je resserre mon manteau contre moi et m'adosse à la voiture. J'ai du mal à croire qu'il ose me demander des explications après la façon dont il m'a traitée. J'avoue que je ne suis pas blanche comme une colombe, mais il m'a quand même abandonnée pendant plus de quatre mois sans donner la moindre nouvelle. J'étais en droit de penser que notre histoire était terminée, et de passer à autre chose. 

        Je ne sais pas lequel de nous deux est le plus en faute. 

        Personnellement, je n'ai rien à me reprocher. 

        Hors de moi, je me retourne pour lui faire face.

- Tu te fou de ma gueule ! Pendant plus d'un mois je n'ai aucune nouvelle de toi, je fais le premier pas en t'envoyant un message, tu m'appelles en m'engueulant et après, un message une fois toutes les trente-six du mois, la semaine des quatre jeudis et des trois dimanches. Et tu crois que tu n'as rien à te reprocher ? Laisse-moi rire ! 

        Je me retourne et m'adosse de nouveau à la voiture. Je crois que je n'ai jamais été autant en colère de toute ma vie. Elle m'enflamme presque autant que le désir que je ressens dans les bras de Pierre. 

        Je ferme les yeux et appuie ma tête sur le toit du véhicule en soufflant. Le vent charrie mes cheveux contre mon visage. Je sens les doigts de Pierre les écarter et son corps se coller au mien. Je rouvre lentement les yeux et les plonge dans son regard brûlant de passion. Les larmes montent en moi. Je ne lui sers qu'à ça. Je ne suis qu'un objet sexuel pour lui. 

        Son pouce écrase la larme qui s'échappe de mon œil et me caresse doucement la tempe. Je penche ma tête sur sa main pour accentuer la pression. 

- Je suis désolé princesse. Je ne voyais pas les choses de cette façon. J'imaginais pas que tu réagirais comme ça. 

- Et tu pensais que j'allais réagir comment ? « Tu ne veux pas me parler de ton père accidenté ? Pas de problème mon chéri ! Après tout, je ne suis rien pour toi ! ». Franchement Pierre, tu vis au pays des Bisounours. 

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