Chapitre 20 : Doux réveil

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Mozart ouvrit les yeux en baillant, et il replongea dans les draps, n'ayant aucune envie de se lever. L'odeur du tissu l'interpella toutefois et il redressa la tête, parcourant la pièce du regard. Il était dans la chambre de Salieri. Le jeune homme fronça les sourcils, il ne se souvenait pas être venu chez son aîné la veille. Pour être plus exact, il ne se souvenait de rien. Que faisait-il là ? Il était vrai qu'il venait assez souvent chez le compositeur, qu'il s'agisse de travail ou de simple visite personnelle, et encore plus depuis que leur relation avait passé un tournant décisif, mais généralement, il savait quand et pourquoi il se rendait ici. Il essaya de retracer le cours de sa dernière soirée, mais il ne parvint pas à se rappeler quoi que ce soit. Il fit la moue. Et pourquoi était-il seul dans ce grand lit ? Avoir le bonheur d'être chez son maestro sans pouvoir le serrer dans ses bras, ça perdait tout intérêt. Il inspira avec lassitude, et l'odeur de Salieri enivra ses narines. Finalement, cela avait tout de même un côté agréable. Il se roula dans les draps avec délice, et un son attira soudainement son attention. Une mélodie de piano, qui traversait délicatement les murs pour parvenir à ses oreilles. Un grand sourire éclaira le visage de l'autrichien. Antonio était en train de jouer avec son talent habituel dans son bureau. Quel réveil merveilleux. Il ferma les yeux pour se concentrer sur la musique. Le compositeur impérial n'était décidément pas n'importe quel musicien. Il méritait ses nombreux titres comme sa réputation. Bercé par les notes si délicates, Wolfgang retomba dans un sommeil profond, le sourire aux lèvres.


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Antonio ferma la porte de son bureau avant de traverser le couloir. Il entra silencieusement dans sa chambre et s'approcha du lit, dans lequel Mozart dormait profondément, le visage enfoui dans l'oreiller, un léger sourire étirant ses lèvres. Il était arrivé tard la veille, la nuit était déjà bien avancée, mais Salieri ne dormait toujours pas à ce moment là, il composait quand le blond avait toqué à sa porte. Salieri lui avait ouvert, surpris de le voir arriver si tard, et il avait rapidement compris. Mozart était ivre, et c'était par simple pulsion qu'il s'était rendu chez le compositeur impérial en sortant du bar dans lequel il s'était soûlé. Le brun s'assit sur le bord du lit, et il laissa ses doigts caresser le visage de l'ange endormi.
- Réveillez-vous, il est déjà plus de midi.
Les yeux de son cadet papillonnèrent un instant, et il posa un regard encore ensommeillé sur son hôte.
- Ne vous méprenez pas, je suis ravi de me réveiller dans vos draps, mais je dois bien avouer ne pas me souvenir d'être venu vous rendre visite. Auriez-vous l'obligeance de m'informer de ce qu'il s'est passé cette nuit ?
Antonio sourit, amusé.
- Vous êtes arrivé vers deux heures du matin, relativement bien éméché, je travaillais encore sur une partition et n'avais pas vu l'heure passée. Vous avez insisté pour que j'aille me coucher, et pour que je vous emmène avec moi dans mon lit. Nous nous sommes donc couchés, et ce matin, je n'ai pas voulu vous tirer d'un sommeil dont vous aviez grand besoin, donc quand je me suis levé, je vous ai laissé ici, et ai donné une journée de congé à mon personnel pour éviter d'éventuels problèmes.
Le jeune homme rigola doucement. Son aîné pensait à tout. Levant la tête, il fixa alors le maître de la chapelle avec malice.
- Et... Nous n'avons fait que dormir ?
- Oui, Wolfgang, nous n'avons fait que dormir. Vous aviez déjà le plus grand mal à marcher, et vous faire monter les escaliers a déjà été suffisamment éprouvant.
- Et bah chacun son tour hein.
Salieri se mordit la lèvre inférieure, embarrassé du souvenir dans lequel c'était l'autrichien qui l'avait aidé à rentrer après un excès grandiloquent avec l'alcool. Mozart se redressa aussitôt, attrapant son menton pour laisser son pouce glisser sur la lèvre malmenée.
- Ne vous ai-je pas déjà dit que vous êtes bien trop désirable lorsque vous faîtes ceci ? Souffla-t-il.
Salieri rougit violemment, tant par son mouvement inattendu que sa voix, exponentiellement sensuelle avec ce ton rauque ensommeillé.
- Si... Vous me l'avez déjà dit...
Le plus jeune sourit et il combla la distance entre eux pour s'emparer des lèvres de son maestro. Salieri répondit immédiatement au contact, si délicat, si agréable. Wolfgang enroula ses bras autour du cou de l'italien et il bascula en arrière, le faisant tomber sur lui. Surpris, Salieri ouvrit les yeux en grand, se voyant maintenant au dessus du jeune prodige, qui le fixait avec une adoration sans limites, les yeux brillants. L'homme se sentit happé par ce regard, et il ne put rien dire.
- Vous êtes à moi, Antonio Salieri...
Encore une fois, il resta silencieux, et s'abaissa juste pour cueillir les lèvres de Mozart une nouvelle fois. Après un long mais si délicat baiser, le blond sourit, amusé.
- Vous n'avez pas répondu.
- Que voulez vous que je réponde ? Vous m'avez fait succombé, je serais bien de mauvaise foi si j'essayais de contredire vos propos.
- Je croyais que votre fierté aurait pris le relai sur votre raison et que vous auriez au moins essayé de protester.
- Rien n'est au dessus de ma raison.
- Si, moi. Et mes lèvres sur vous, et mes mains sur votre corps si délicieux.
- Excepté vous. Mais que puis-je contre le favori des dieux ?
Ses yeux sombres furent parcourus d'un éclat particulier, et il enchaîna.
- Étrangement, j'adore l'idée d'être à vous... Wolfgang, je vous appartiens, corps et âme.
- C'est une belle déclaration, qui me touche infiniment, maestro. Sachez que c'est parfaitement réciproque. Après tous mes essais, j'ai enfin trouvé la perle rare qui fait chavirer mon cœur.
Ils se sourirent encore, et leurs lèvres se retrouvèrent dans la seconde. Mais il n'y avait pas d'ardeur cette fois-ci, ni de pulsions sexuelles à assouvir. C'était tout simplement doux, c'était tout simplement deux hommes qui se promettaient à la fois tout et rien à travers un baiser criant de sincérité. Antonio ne doutait plus. Il avait bien sûr peur pour sa réputation, peur d'être découvert, peur de ce qu'il ressentait, mais il ne voulait plus lutter. Il avait été seul toute sa vie, il avait trouvé les autres fades pendant tant d'années, alors qu'importe que la personne qui pouvait apaiser ses tourments, ses nuits et son âme soit un homme. Wolfgang Amadeus Mozart était un don du ciel, un don qui avait soulagé son existence d'un poids qui le condamnait jusque là à la souffrance. Et il comptait bien en profiter à chaque instant.

Mozalieri - Un jeu inavouableOù les histoires vivent. Découvrez maintenant