Harcelés

Chapitre 2

Toujours stupéfait par sa réaction, je prends soin de fermer délicatement la porte de ma chambre avant de m'allonger sur le lit, en faisant attention de ne pas écraser mon chat installé confortablement dessus.

Je tente inlassablement de comprendre pourquoi ma mère réagit de la sorte et se met dans des états pareils pour un élément aussi futile. Je suis juste rentré avec un inconnu, ce n'est pas comme si je l'avais invité à la maison ou pire, si j'avais été chez lui. Elle ne peut s'empêcher de se faire du souci, quelque soit les circonstances.

Je culpabilise presque. Je n'aurais peut-être pas dû faire confiance à cet homme qui m'est inconnu, tout compte fait. Il a certainement une idée derrière la tête. J'en suis même persuadé, il me l'a avoué, il s'intéresse à Clara...

Mais pourquoi d'ailleurs? Vingt ans les séparent, ça n'a aucun sens... Je veux bien croire qu'il arrive qu'on soit désespéré à certain moment de notre vie mais de là à fantasmer sur une jeune fille alors qu'il pourrait être son père, c'est peu probable, et quelque peu malsain.

Et puis pourquoi ma mère s'est-elle renfermée quand elle a vu à qui je parlais dehors, en se permettant de regarder par la fenêtre. Est-ce qu'elle le connait? Je ne pense pas... Pourquoi le connaitrait-elle d'ailleurs?... Si tel était le cas, pourquoi me mentirait-elle en me disant que non, ça n'a pas de sens.... Je me pose bien trop de questions, elle doit sûrement être fatiguée, comme elle le prétend, un point c'est tout! Pas la peine de chercher midi à quatorze heures...

Soudainement, l'envie de voir Clara me toque à l'esprit et à mesure que mon attention se monopolise sur ce besoin, je suis obligé d'assouvir cette pulsion, c'est plus fort que moi. Elle est la seule personne, hormis mis Amandine, avec qui mes discussions puisse dériver sur n'importe quel sujet de conversation, et celui dont je projette de parlementer m'apparait assez important au point de justifier cette envie soudaine et imprévue de sortir pour la rejoindre.

Et sans vouloir alarmer ma mère avec une seconde sortie non prévue, je prétexte une omission de son chargeur de téléphone ce matin et qu'il est impératif que je lui ramène dans les plus brefs délais. Son visage n'a pas le temps de laisser apparaitre sa stupéfaction que je suis déjà en dehors de l'appartement.

Tout en recevant le message de confirmation de Clara, je m'empresse de sortir mon vélo du garage et me voilà pédalant énergiquement dans les rues de Beaulieu, regrettant amèrement de ne pas avoir prit la peine de me vêtir plus chaudement, le froid ne se gênant pas de me le rappeler en enveloppant l'intégralité de mon corps de sa rigueur hivernal.

Mes mains rougissant sous la force du vent qui les fouettent, j'alterne en tenant mon guidon d'une main pour amener l'autre en direction de ma bouche pour tenter au mieux de les réchauffer.

Du bout de la rue de la maison de Clara, je l'aperçois qui me fait signe de m'arrêter un peu plus loin pour que nous discutions en retrait de chez elle, ses parents ignorant le fait qu'elle fume. C'est mieux ainsi, du moins c'est ce qu'elle pense et je ne la contredis pas sur ce sujet. Moins les parents en savent, moins ils se font de souci pour leur progéniture.

Le souvenir de la protection excessive de ma mère doit certainement me faire raisonner de la sorte.

J'abandonne mon vélo contre une clôture pour lui faire la bise, remarquant au passage le résultat peu flatteur sur son visage de la coulée de larmes qui a précédé mon arrivée.

- Qu'est-ce qu'il se passe, pourquoi tu es dans cet état? dis-je d'une voix encore plus basse que l'idée dont je m'étais faite en ouvrant modestement ma mâchoire.

- Florian est venu tout à l'heure, il voulait qu'on discute. On est allé faire un tour avec sa voiture... Au début c'était tendu, je lui ai gueulé dessus comme une folle, sans avoir eu d'explications de sa part, mais j'en avais envie... Puis il m'a dit que c'était des conneries, qu'il n'avait jamais couché avec cette fille, qu'il ne pourrait jamais me faire ça, et tout ce qui va avec.