Chapitre 45 Les ennemis de mes ennemis...

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1957, 22 avril (aube)

Adela s'était installée dans une grande pièce lumineuse qui avait dû servir autrefois de bureau de consultation. On y avait laissé qu'un monumental bureau, un fauteuil et d'innombrables étagères vides le long du plus grand mur. La tapisserie défraîchie arborait les traces décolorées d'anciens tableaux ; le parquet usé, celui d'un tapis. La poussière s'était invitée partout.

Adela n'était pas une fée du logis. Elle s'était donc contentée d'essuyer le bureau et le fauteuil. Le reste ne la dérangeait pas. Du moment que personne ne produisait de courants d'air, la poussière restait à sa place, et elle à la sienne.

De l'extérieur, le bâtiment paraissait abandonné. Pourtant, il ne l'était pas totalement. Seule la partie endommagée pendant la guerre avait été totalement évacuée. Le reste de l'hôpital accueillait encore quelques patients, notamment les cas les plus dangereux, car l'aile intacte était celle qui possédait les cellules sécurisées.

Après leur fuite du cottage, Byrne l'avait guidée directement vers cet endroit. Il savait pouvoir y trouver ce dont il aurait besoin pour soigner les deux diogonos. Adela avait obéi sans hésiter. Elle n'aurait su dire pourquoi, mais elle faisait confiance au sorcier. Elle avait eu raison.

Près d'elle, le coffret attendait qu'elle l'ouvre. Comme à chaque fois, elle redoutait l'épreuve autant qu'elle l'espérait. Ouvrir le livre c'était autant réveiller le mal et en faire naître un nouveau, que la promesse d'une nouvelle aventure. L'historienne avait pris le pas sur la femme en souffrance.

Elle s'assit au bureau en tournant le dos à la journée radieuse qui s'annonçait. Sa vie s'enfuyait. Elle n'avait plus de temps à perdre à s'extasier sur la beauté de la campagne.

***

Etha se réveilla dans l'humidité d'une cave, la douleur chevillée au corps mais sa détermination intacte. Autour d'elle des établis, des étagères, des instruments, des bouquets d'herbes ou de fleurs séchés suspendus aux poutres du plafond, des sacs de toile entassés un peu partout et des livres. Etha se trouvait sur le lit de camp de l'apprenti de Findan quand il devait surveiller des préparations de longues heures.

Elle toucha sa peau là où le sorcier avait appliqué des onguents et des cataplasmes pour aider à la cicatrisation des tissus. La peau était encore très irrégulière. Ce que lui avait fait Aloïs ne disparaîtrait pas aussi facilement. Etha frissonna à l'évocation de sa tortionnaire.

Bien que la sorcière parasite ne soit plus en elle, elle avait l'impression que son cœur portait encore la trace de son sceau. Si elle songeait à ce qu'elle avait subi, être en vie était un miracle. Non ! Pas un miracle ! C'était Brune. La petite Brune. La puissante Brune, investie d'un pouvoir bien plus grand qu'elle.

Etha espérait que l'enfant allait bien. Elle lui était redevable. Elle devait l'aider à se libérer à son tour, car, alors qu'Etha n'était plus qu'un souffle dans son propre corps, elle avait entendu les propos de Sargon, le Maître de la Confrérie, au sujet de l'enfant.

Etha voulait se venger de Batten et d'Aloïs. Elle leur ferait payer la mort d'Isha, mais avant, elle devait penser à Brune dont le sort était beaucoup plus pressant. Au milieu des créatures, elle était en réel danger. Et pour cela, elle devait trouver le clan McDonald ou ce qu'il en restait.

– Déjà réveillée ? Tu devrais continuer à te reposer. Tu n'es pas prête à te lever.

– Merci de ta sollicitude et de tes soins, Findan. Mais j'ai une mission urgente à accomplir. Sans compter que je te mets en danger en restant plus longtemps ici.

– En danger, nous le sommes tous. Aloïs est de nouveau dans la nature. Et même si elle n'a plus ton pouvoir, elle est définitivement une menace sans équivalent surtout si ce que tu m'as appris est vrai.

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