Chapitre 51 Dans l'obscurité

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1957, 26 avril

– J'en ai fini avec lui. Remettez-le au cachot. Il est temps pour moi d'y aller.

Sargon s'essuya méticuleusement les mains sur une serviette que lui avait tendu Cadmon. Son bras droit était revenu de sa mission des îles sans une piste valable, mais avec un étrange document. Une lettre. Plus exactement, une proposition. Et pas de n'importe qui, d'Aloïs Walsh, elle-même.

Il avait répondu favorablement et devait retrouver la sorcière à Paris pour en savoir plus et comprendre comment elle pourrait lui fournir les informations dont il avait besoin. Et surtout pour savoir quel serait son prix, car rien n'était jamais gratuit avec ce genre de personnage.

– À ce rythme, il ne tiendra plus très longtemps, dit alors Cadmon, le sortant de ses pensées.

– Peu m'importe. Il est probable que le rendez-vous avec Walsh me donnera pleinement satisfaction. J'en ai l'intime conviction. Elle a autant de haine envers le clan que moi.

– Elle en a aussi envers toutes les créatures, y compris vous, Maître, si je puis me permettre.

– En effet, Cadmon. Mais je suis sûr qu'elle saura mettre ces sentiments-là de côté. J'ai la conviction qu'elle attend quelque chose de moi, et tout comme elle, je ne donne rien sans rien. Notre entente ne peut que nous être favorable à tous les deux.

– Et la banshee ? Que faisons-nous d'elle ?

– Rien. Laissez-là roder. Elle ne peut plus entrer dans Vaucluse, nous nous ne sommes assurés. Elle est impuissante. Elle se résignera bientôt. Je la connais. Varna a survécu aux siècles parce qu'elle a un instinct de conservation très développé. Elle va me bouder un temps. Puis elle reviendra vers nous. Sa présence ne nous importune en rien. Allons-nous préparer.

***

Matthew Byrne ferma la porte doucement. Brune attendait dans le couloir. Elle se tenait bien droite, attentive et sérieuse. Si sérieuse pour une enfant de cet âge. Depuis son retour, elle suivait Adela comme son ombre. Durant la journée, elle se contentait de dessiner près d'elle, tout en étant disponible pour la moindre de ses demandes. La nuit, elle dormait avec elle quand c'était possible.

Jusqu'à présent, Etha les avait fait voyager deux fois. Après l'hôpital, ils s'étaient retrouvés dans l'ancienne demeure de la famille d'Etha. Celle-là même dans laquelle elle s'était réfugiée après qu'Aloïs se soit ancrée en elle. Ils n'y étaient restés que le temps de trouver mieux. Le mieux en question se trouvait être un manoir sur un rocher venteux face aux Orcades. L'endroit était humide et froid, mais il était peu probable que qui que ce soit les trouve ici. Enfin, c'était à espérer.

Toutefois, en prévision, Etha faisait des recherches pour leur prochain voyage. La jeune sorcière prenait son rôle très au sérieux. Surtout depuis son retour avec Brune et Paulina. Le sacrifice de Pàl lui avait porté un coup. Pas qu'elle aima particulièrement le diogonos, mais l'abnégation dont il avait fait preuve pour sauver Adela, lui avait montré que les créatures n'étaient pas ce qu'on avait prétendu lui en apprendre tout au long de sa jeunesse.

Elle avait compris que tous les diogonos n'étaient pas des monstres, comme elle avait compris autrefois que tous les hommes-loup n'étaient pas des traîtres. Elle s'appliquait donc à aider autant qu'elle pouvait ce clan bancal et à moitié détruit. Elle avait promis que leur prochain refuge serait plus douillet. Byrne l'espérait car Adela allait de plus en plus mal.

Le départ de Pàl avait provoqué chez elle un regain d'énergie pour terminer la transcription du livre. À présent que sa tâche s'achevait, sa santé s'étiolait à vue d'œil. Le sorcier la soulageait autant qu'il pouvait, mais c'était difficile de maintenir en vie quelqu'un d'aussi atteint par la maladie. Tout le monde en était conscient, y compris l'enfant.

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