Été 1969
Matthew Byrne soupira longuement. Il avait fini. Il pouvait se montrer satisfait. Les trois ouvrages étaient bien réalisés. Les reliures n'étaient pas ostentatoires. Discrètes, elles se fondraient aisément parmi les collections de la bibliothèque. Les couvertures et les dos ne portaient aucune mention de titre ou d'auteur. Seul indice, les représentations de sceaux, incrustés sur les premiers plats. Cela ne donnait aucun indice à qui n'aurait pas la curiosité d'ouvrir les livres en question. Seul un sorcier pouvait deviner de quoi il retournait.
Le premier livre, en cuir marron, et marqué du sceau des MacDonald, était la transcription du Devolatus qu'il s'était appliqué à illustrer en copiant au mieux l'original.
Le deuxième, en cuir carmin, et marqué du sceau d'Asham, regroupait les notes de la sorcière sur l'ensorcellement du Devolatus, et les sorts qui avaient été extraits du livre quand Adela s'était mise à le lire.
Le troisième, en cuir bleu nuit et marqué du sceau de Petrus, regroupait le journal et les sorts du sorcier. On y trouvait aussi bien des anecdotes sur sa quête des Porteurs, que des remarques sur ses rencontres. Notamment sur Ina et Ren.
Byrne se remémora le jour où il avait reçu les documents qu'il avait réuni dans ce troisème volume. Le paquet venait d'Europe. Pas d'expéditeur. Il contenait une simple boite en bois avec un fermoir sans serrure, dans lequel avait été déposé avec précaution les documents. Le tout était accompagné d'une simple note expliquant que le contenu de la boite avait appartenu au sorcier Petrus, dont Matthew se souvenait avoir lu le nom dans le récit d'Eldred concernant sa vie auprès de Pàl Skene et de son frère.
Ce jour-là, après tant d'années de silence, l'univers qu'il avait abandonné pour le bien de l'enfant, était revenu faire une incursion dans sa vie. Paulina et Hendry n'étaient pas venus en personne. Ce qui impliquait que le danger rodait toujours autour d'eux. Matthew avait donc choisi de se montrer discret. Le bonheur et la survie de Brunella en dépendaient.
Byrne avait commencé par faire le tri parmi tous les feuillets de Petrus, réunissant les sorts d'un côté, et les pages de journal, de l'autre. Plusieurs feuillets ne constituant aucun intérêt à ses yeux, soit parce qu'ils étaient illisibles, soit parce qu'il s'agissait de sorts inachevés, il les avait mis de côté pour le travail de reliure qu'il allait réaliser, non seulement pour les documents de Petrus mais aussi pour ceux d'Asham. Il avait trop longtemps repoussé le moment où il devrait s'occuper de l'héritage des créatures. Il ne pouvait plus laisser de côté ce que lui avait confié Paulina.
Byrne se leva pour ranger les nouveaux ouvrages parmi les livres de sa bibliothèque, déjà bien fournie. Il avait bel et bien fini. Pour autant, il ne pourrait jamais tourner définitivement cette page de sa vie et retourner à ses anciennes préoccupations. Il était toujours le gardien d'un certain nombre de secrets, en plus d'être le protecteur de Brune.
Avant qu'Etha ne les quitte pour éloigner Aloïs d'eux, les deux sorciers avaient joint leurs pouvoirs pour jeter un sort d'oubli à la petite fille. Ainsi, Matthew était devenu son oncle célibataire, professeur d'archéologie. Il l'avait emmenée jusqu'en Italie, sortant des radars des sorciers des îles britanniques.
Tant que l'un des deux sorciers serait en vie, Brune, rebaptisée Brunella, serait sous l'emprise du sort, à l'abri de l'univers périlleux, dans lequel elle avait malencontreusement et brièvement plongé, plus de 10 ans auparavant.
Ainsi, elle avait grandi dans l'insouciance, sans chagrin, ni regret. Un jour, elle retrouverait la mémoire. Mais tout ce qu'elle aurait vécu alors, lui permettrait de choisir de croire ou non, à ce bref épisode de sa vie aussi intense avait-il été. C'était un pari que Byrne espérait gagner.
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DEVOLATUS
Paranormal1957. Adela va mourir. Elle n'a pas 30 ans. Elle va laisser un mari qu'elle aime et une petite-fille qu'elle a promis de protéger. Elle est dévastée, mais n'a pas le temps de se perdre dans sa douleur. Le destin ou le sort en a décidé autrement. Par...